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Présidentielle : les onze candidats ont passé leur dernier grand oral à la télé

Par Benjamin Jeanjean

Ce jeudi soir sur France 2, les onze candidats à la présidentielle étaient tous présents sur le plateau de France 2 pour un ultime "débat" télévisé, même s'il ne s'agissait pas d'un débat au sens classique du terme. Voici les principaux points à retenir de cette soirée, candidat par candidat.

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Pas de débat entre onze candidats donc, mais un format inédit de onze interviews de 15 minutes "pour convaincre", avant une conclusion personnelle au choix de chaque prétendant à l’Élysée. Des prétendants qui ont jeté leurs dernières forces dans la bataille, à 24 heures désormais de la fin de la campagne électorale.

Jean-Luc Mélenchon

Tiré au sort pour être le premier à être interviewé, Jean-Luc Mélenchon a apporté avec lui un réveil, France 2 ayant demandé à tous les candidats d’apporter un objet représentatif du projet présidentiel qu’ils portent. Un réveil qui servirait à lui rappeler "qu’il est temps de changer notre manière de produire, d’échanger et de consommer, de sortir du nucléaire et de répartir plus justement les richesses", selon le candidat de la France Insoumise. Ce dernier a également développé lors de son interview ses propositions d’inscription dans le marbre d’un droit opposable à l’emploi. Toute personne chômeur de longue durée pourrait ainsi se voir proposer un contrat coopératif de cinq ans, l’État transformant en salaire le coût que représente aujourd’hui ces chômeurs (allocations, etc.). Jean-Luc Mélenchon a également expliqué une nouvelle fois sa volonté de créer 14 tranches d’imposition pour alléger le poids qui pèse aujourd’hui sur les classes moyennes et de taxer à près de 90% la dernière tranche, au-delà de 35 000 euros, avec quelques aménagements possibles.

Après avoir rappelé son projet "d’abolir la monarchie présidentielle et de mettre fin au règne de la caste" en convoquant une Assemblée constituante et en instaurant la possibilité d’un référendum révocatoire, Jean-Luc Mélenchon s’est également expliqué sur les questions internationales, ne reconnaissant à la France "ni maître, ni ennemi" parmi les grandes puissances. "Je suis pour une France indépendante et championne du monde de la paix, très orientée vers le système onusien. Je suis hostile au G8, au G20 et à tous ces petits clubs de riche qui font et défont le monde", a-t-il souligné.

Nathalie Arthaud

Deuxième candidat invitée sur le plateau, Nathalie Arthaud a amené avec elle une photo encadrée de Tommy Smith et John Carlos, athlètes titrés lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968 et figures emblématiques du combat des Noirs américains contre la ségrégation à l’époque. Reconnaissant qu’aucun régime actuel n’est un modèle pour elle ("il est à inventer"), la candidate de Lutte Ouvrière a affirmé militer pour "changer la société, et non pas la conserver". "Je trouve qu’il est utopique de considérer que l’humanité peut continuer sur cette voie-là, y compris dans les pays riches", a-t-elle ajouté. Rappelant son intention de nationaliser les banques, "qui ont fait la preuve de leur irresponsabilité, la crise de 2008 en est la preuve", Nathalie Arthaud a ensuite longuement évoqué sa proposition de réformer la composition des conseils d’administration des entreprises pour y intégrer davantage de "travailleurs, de salariés, d’usagers". Elle souhaite notamment "transformer tous les salariés en lanceurs d’alerte" en imposant le contrôle des travailleurs sur les décisions et comptabilités des entreprises, "pour permettre aux salariés de tout révéler sur l’argent qu’il y a réellement".

Sur les questions internationales, Nathalie Arthaud rappelle son souhait "d’arrêter les interventions françaises et de combattre l’impérialisme au Moyen-Orient", affirmant que le terrorisme islamiste "se nourrit des terrorismes d’État américains, russe, syrien, etc.".

Marine Le Pen

Troisième prétendant à l’Élysée, Marine Le Pen a apporté avec elle une clé. "Un chef d’entreprise de Moselle m’a symboliquement offert la clé de son entreprise. Cette marque de confiance a été pour moi un vrai moment d’émotion, et moi je veux rendre aux Français les clés de la maison France", a-t-elle expliqué. La candidate du Front national a affirmé vouloir "engager une grande négociation pour rendre aux Français leur souveraineté en termes de frontières, de lois, d’économie et de monnaie", développant longuement sa proposition de retour à une monnaie nationale qui "permettrait d’être plus compétitif, de partir à la conquête du monde" selon elle. Pour sa carte blanche, Marine Le Pen a souhaité mettre l’accent sur la sécurité et le terrorisme, deux sujets "totalement absents de la campagne" d’après elle. Elle plaide notamment pour "maîtriser nos frontières nationales, mettre en œuvre la réorganisation des renseignements, reconstituer les moyens de la police et de la gendarmerie, s’attaquer au communautarisme, fermer les mosquées radicales et expulser les fichés S étrangers".

À l’international, Marine Le Pen a également fustigé l’accord sur le contrôle des migrants entre la Turquie et l’Union européenne : "Nous n’avons pas d’accord avec la Turquie. C’est Mme Merkel qui y est allée sans demander l’avis de personne". La candidate frontiste a également confié avoir été "déçue" par la décision de Donald Trump de frapper militairement la Syrie. "Il a pris une décision en désaccord avec ses engagements, lui qui avait dit vouloir être le président des États-Unis, pas le président du monde", a-t-elle déploré.

François Asselineau

Candidat de l’Union populaire Républicaine, François Asselineau est venu avec un rameau d’olivier, "un symbole de paix, un symbole millénaire, un symbole de la République, un symbole qui figurait sur la pièce de 1 Franc, un symbole méditerranéen, et l’avenir de la France passe aussi par la Méditerranée". Il a d’emblée défendu son vaste projet de nationalisations massives, assurant vouloir le faire par souci de préservation des services publics."Les Français attendent du chef de l’État qu’il assure l’égalité entre tous. Ces services publics sont menacés années après années par les traités européens. L’article 106 du Traité de l’Union européenne notamment met en concurrence les services publics entre eux", précise-t-il.

Lors de sa carte blanche axée sur le "Frexit", François Asselineau a déchiré sur le plateau un document de la Commission européenne établissant des orientations économiques annuelles, avant de promettre de "passer le Smic à 1300 nets par mois, de stopper la hausse de la fiscalité ménages et de sauver nos services publics et notre Sécurité sociale". Il a par ailleurs promis de mettre son mandat en jeu au bout de 3 ans s’il n’arrive pas à "faire baisser de 1,5 millions le nombre de chômeurs en France". Le candidat de l’UPR a également fustigé "l’état d’urgence permanent dont on a vu la totale inefficacité le 14 juillet dernier à Nice" et la participation de la France à des interventions militaires illégales.

Benoît Hamon

Benoît Hamon est, lui, venu avec une carte vitale représente la protection sociale. "Je pense que celle-ci est menacée par le projet politique de certains et la réforme des retraites d’autres, et on n’en a pas tellement parlé (…) car le spectacle a pris le dessus sur le programme et les idées", a-t-il expliqué. Le candidat socialiste a rappelé son diagnostic d’une "raréfaction du travail dans les économies développées dont la France". "On ne peut plus penser le travail comme nos ancêtres le pensaient", a-t-il ajouté avant de préciser certains aspects de sa mesure-phare, le revenu universel. "Le revenu universel va permettre à 19 millions de personnes de bénéficier d’une augmentation de pouvoir d’achat. Ce n’est pas une incitation à l’oisiveté, c’est le contraire. Plus votre salaire augmente, plus la part du revenu universel baissera : c’est donc une valorisation du travail. Quel est le but ? On consomme plus, donc on remplit le carnet de commandes des entreprises et on crée de l’emploi", a-t-il indiqué.

Pour sa carte blanche, Benoît Hamon a mis l’accent sur l’Europe, fustigeant une "austérité voulue par les Allemands, qui se traduit par une menace de dislocation du projet européen". Le candidat socialiste ne pense pas cela dit que la solution soit de "sortir de l’Europe". Sur le plan international, le député des Yvelines souhaite par ailleurs revenir sur les accords de vente d’armes à l’Arabie Saoudite et au Qatar ("Ces accords ne se justifient plus aujourd’hui. Nous devrions être arbitres et non pas alliés des régimes sunnites"). "Il n’y a pas de solution politique en Syrie avec Bachar el-Assad. Je ne hiérarchise pas l’horreur entre Daesh et Bachar qui gaze son peuple. C’est cette position qui a fait l’honneur de la France dans son histoire", a-t-il par ailleurs indiqué.

Nicolas Dupont-Aignan

Apportant avec lui une petite statue qui lui a été apportée par un enfant en situation de handicap il y a plusieurs années, Nicolas Dupont-Aignan a confié qu’il "aimerait qu’on parle davantage de tous ces gens qui souffrent terriblement, alors que les hommes politiques ne parlent que d’eux". Interrogé sur le volet social de son programme, le candidat de Debout la France a réaffirmé son intention de soumettre l’octroi des minimas sociaux à des conditions, "pour donner à ceux qui les reçoivent une chance d’insertion". Il a également évoqué le cas de l’Europe, assurant être "le seul candidat venu avec un projet de traité alternatif" et plaidant pour un euro-franc, une monnaie flexible qui permettra selon lui d’avoir "les avantages de l’euro sans les désavantages".

Enfin, Nicolas Dupont-Aignan a également rappelé sa prudence sur le théâtre syrien. "Si les frappes chimiques sont de Bachar el-Assad, il faudra être impitoyable. Mais il faut vérifier, je me souviens des manipulations de l’Irak en 2003", a-t-il déclaré.

Philippe Poutou

Venu avec un drapeau de la Guyane, Philippe Poutou a souhaité "rendre hommage au mouvement social en Guyane aujourd’hui et à la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales". Il a par la suite plaidé pour un "travail garanti pour tout le monde", sous la forme d’un CDI. Critiquant une "société ou au moins une économie qui fonctionne pour faire du profit et remplir les poches des actionnaires", le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste a par ailleurs mis l’accent sur l’écologie lors de sa carte blanche. "Il y a un problème de destruction de l’environnement avec le rouleau compresseur du capitalisme", a-t-il déclaré avant d’assurer vouloir mettre en place un service public de l’énergie, "pour une politique cohérente de sortie du nucléaire et des énergies fossiles". Enfin, il a également plaidé pour une absence de contrôle aux frontières au niveau international. "C’est pour nous fondamental", a-t-il martelé. 

Emmanuel Macron

"J’avais ramené une grammaire et je l’ai laissée dans ma loge". Emmanuel Macron est le premier candidat à chambouler quelque peu ses plans au vu de la fusillade terroriste des Champs-Elysées qui a tué un policier ce jeudi soir, les événements étant connus au compte-gouttes par les candidats dans leur loge. "Le premier devoir du Président, c’est de protéger, et ce soir on sait qu’un policier a été tué et un autre blessé. Cette menace fera partie du quotidien de ces prochaines années", a-t-il affirmé. L'ancien ministre de l'Économie a par la suite abordé le volet "logement" de son programme. "Je vais libérer l’offre de logement. Il y a aujourd'hui un problème d’envolée des loyers dans les zones tendues (Grand Paris, Lyon, région proche de la Suisse et Aix-Marseille). Je veux lancer grandes opérations d’intéret national, raccourcir les délais et avoir un permis unique dans des délais record pour construire rapidement les logements manquants, qu’ils soient libres ou sociaux", a-t-il promis.

Dégainant une carte blanche centrée sur l’éducation, le candidat d'En Marche! a rappelé sa proposition de ramener à 12 élèves par classe de CP et CE1 dans les zones REP et REP+ (enseignement prioritaire), car "c’est là que se concentre l’échec scolaire". Interrogé sur sa vision de la culture française, il a martelé que, selon lui, "la culture française est un fleuve qui se nourrit de multiples affluents. C’est une langue, une histoire, mais aussi la capacité à s’en affranchir à chaque fois et à aspirer à l’universel et à des chemins de traverse". Enfin, désapprouvant l’utilisation d'armes chimiques en Syrie, Emmanuel Macron s'est dit "prêt à prendre [ses] responsabilités pour des frappes ponctuelles afin de détruire des stocks d’armes chimiques", si possible dans le cadre d'une coalition.

Jacques Cheminade

Apportant avec lui une paire de bifaces de la préhistoire, "le premier outil de l’histoire, mais pas un instrument de guerre", Jacques Cheminade a longuement évoqué la finance lors de son passage, pointant du doigt "une dette de 239 milliards en 1979, de 2900 milliards aujourd'hui, et entre-temps une dépense de 1400 milliards d'intérêts en empruntant". Regrettant que "le vrai représentant de l’Europe aujourd’hui [soit] Mario Draghi à la BCE", il a proposé la création d'une "banque nationale représentée dans son conseil par toutes les catégories de la population".  

Lors de sa carte blanche, Jacques Cheminade a insisté sur la culture et l’éducation, en proposant notamment d'augmenter le budget de la culture à 2% du PIB. "C’est une priorité : quand les enfants pensent, la société s’améliore", a-t-il expliqué. Celui qui se présente pour la troisième fois à l'élection présidentielle plaide également pour une réforme de la justice, à laquelle "70 % des Français ne croient pas".

Jean Lassalle

De son côté, Jean Lassalle a apporté avec lui deux livres, l'un sur sa marche à la rencontre des Français, l'autre sur sa rencontre avec des Européens. "Je veux redonner à la France un espace politique économique et financier qu’elle n’a plus", a-t-il posé d'emblée, avant d'indiquer vouloir "retirer nos troupes du Proche-Orient, car elles électrisent les deux cotés de la Méditerranée, et relancer la diplomatie française, qui fut l’une des meilleures des siècles durant". L'élu du sud-ouest s'est ensuite longuement expliqué sur sa rencontre passée avec Bachar el-Assad. "Je suis allé en Syrie en 1990 et en 1994, comme au Liban. J’avais découvert plus de mini-jupes à Alep que de voiles islamiques. Pourquoi avons-nous fermé notre ambassade à Damas et tous nos consulats ? Et puis j’ai vu les contrats faramineux d’armes à l’Arabie saoudite et au Qatar, dont personne n’ignore les liens qui les unissent à Daesh et al-Nostra. Donc je suis allé sur le terrain voir ce qu’il en était", s'est-il justifié.

Pour sa carte blanche, Jean Lassalle annonce vouloir "réunir la France, ce pays en a besoin" et faire des campagnes de France une "grande cause nationale, alors que 260 exploitations agricoles ferment toutes les semaines". Il ne souhaite pas sortir de l'Union européenne mais revenir à une Europe des nations. "Cela fait 25 ans que ce rêve exceptionnel s’évanouit devant nos yeux. Les Européens n’en peuvent plus, n’ont plus de gouvernement chez eux. Je veux fonctionner sous l’égide de l’Europe des nations", a-t-il indiqué.

François Fillon

Dernier candidat à s’exprimer devant Léa Salamé et David Pujadas, François Fillon n’a, lui, apporté aucun objet car il n’est "pas fétichiste", préférant évoquer la fusillade des Champs-Elysées. "La nation est solidaire avec les policiers ce soir. En face d’un acte dont on ne peut pas qualifier la nature mais qui ressemble terriblement à un acte terroriste, j’annule mes déplacements prévus demain dans ma campagne", a-t-il indiqué. Axant une grande partie de son intervention sur la situation internationale et le terrorisme, le candidat Les Républicains a appelé à "lutter contre la montée du fondamentalisme à l’intérieur de la religion musulmane, ce qui pose le problème de tous ces penseurs radicaux qui influencent les musulmans".

Profitant de sa carte blanche pour évoquer "l'unité de la nation", il a assuré vouloir que "l’école de la République apprenne les fondamentaux mais aussi une histoire qui fasse que les jeunes Français se sentent membres d’une communauté nationale et qu’ils en soient fiers". Il souhaite par ailler "aider les musulmans de France à éradiquer l’intégrisme qui gagne du terrain à l’intérieur de cette religion".

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