Pour présenter le plan Pauvreté, Emmanuel Macron a symboliquement choisi le musée de l’Homme, bâtiment consacré à l’évolution des sociétés, à partir duquel le président détaillera les mesures adoptées par le gouvernement pour enrayer la pauvreté en France. Un plan Pauvreté particulièrement attendu au vu de l’urgence de la situation : trois millions d’enfants vivent sous le seuil de pauvreté, soit un sur cinq et toujours selon l’Insee, près de 5 millions de personnes vivent avec moins de 815 euros mensuels (statistiques de 2016). Alors, ce plan Pauvreté sera-t-il à la hauteur ? « Non », répond Laurent Mauduit, qui pense qu’il sera au contraire « décevant ».
« On avait déjà quelques indices. Vous vous souvenez de la formule terrible du chef de l’État ; “les aides sociales ça coûte un pognon de dingue”. Il y a aussi eu le report de l’annonce du plan Pauvreté au mois de juillet, qui avait suscité l’indignation de toutes les associations humanitaires. Ce qui avait d’ailleurs fait dire à Benoît Hamon que ce gouvernement était pauvrophobe. »
« Il y aura une refonte du RSA, une refonte de la CMU, ceci est le bienvenu, souligne-t-il, mais il faut tout de même bien mesurer qu’en France, pays riche, il y a 9 millions de pauvres. Ce qu’il faudrait en France, c’est un véritable plan Marshall. »
« Emmanuel Macron est un pompier pyromane »
Pour Laurent Mauduit, la pauvreté est la conséquence directe de la précarisation du travail en France, causée par une plus grande flexibilité de ce marché, souhaitée par le gouvernement lui-même. « D’où vient la pauvreté ? Il y a d’abord le chômage, soit 5 millions de personnes voire plus. Il faut bien comprendre pourquoi 5 millions, insiste le cofondateur de Mediapart. On a vécu presque 40 ans de dérégulation du travail, CDD, travail à temps partiel, petits boulots, le résultat est qu’en 1981, 90% des emplois créés étaient des emplois à durée indéterminée. Maintenant, la statistique est totalement inversée : 85% des emplois créés relèvent de ce que les statisticiens appellent les formes particulières d’emplois. »
« Des petits boulots qui nous ont fait entrer dans un univers de précarité », souligne Laurent Mauduit. « Toutes les dispositions de la loi Travail prises par Emmanuel Macron l’an dernier vont contribuer à ce que l’on appelle l’uberisation de la société. Il y a donc une forme d’hypocrisie au plan Pauvreté, parce que le gouvernement affiche l’ambition de limiter un tout petit peu les effets désastreux des dégâts qu’il aura lui-même causés. CQFD, Emmanuel Macron est un pompier pyromane », conclut-il.