Yves Veyrier : "il y a des situations qu'on peut améliorer dans le cadre du système actuel de retraites"
Dix jours avant l'appel à la grève du 5 décembre, Yves Veyrier, secrétaire général de Force Ouvrière, est reçu le 25 novembre par le Premier ministre Édouard Philippe. Y a-t-il encore quelque chose à négocier pour éviter un jeudi noir ?, l'interroge Patrick Roger. "je l'espère, répond Yves Veyrier, on ne lâche rien ! Je vais pouvoir encore essayer d'expliquer ce soir au Premier ministre les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas en accord avec l'idée d'un régime unique par points. Je l'ai déjà fait, j'ai quelques doutes sur le fait que je serai entendu. Je veux espérer à chaque fois que nos arguments finiront par être entendus.
Nous proposons de défendre le système actuel de retraites avec ses régimes, mais aussi d'améliorer les situations qui posent problème, notamment la situation des femmes aujourd'hui. Il y a des situations qu'on peut améliorer dans le cadre du système actuel de retraites".
Finalement, il s'agit de résistance pour ne rien changer ? "On ne peut pas nous dire il n'y a qu'une seule vérité, celle du gouvernement !, s'insurge Yves Veyrier. In fine, le gros problème avec le régime unique par points, c'est que le seul objectif est de soit contraindre ceux qui ont encore un travail à travailler plus longtemps, soit voir leur pension baisser. L'objectif du régime unique par points est de donner au gouvernement dans l'avenir tous les leviers pour agir sur le niveau des pensions et l'âge effectif du départ à la retraite".
"Nous appelons l'ensemble des salariés, du public et du privé, à la grève le 5 décembre"
Sur la clause du grand-père, qui voudrait que la réforme ne concerne que les nouveaux entrants sur le marché du travail, "ça signifie que le futur régime ne sera pas aussi favorable, ne comportera pas de droits équivalents à ceux d'aujourd'hui. On ne parle que des régimes spéciaux, qui ne sont qu'une très faible partie du sujet ! C'est le régime de base de la Sécurité sociale qui va être supprimé". Mais ce sont les gens qui bénéficient des régimes spéciaux qui risquent de bloquer la France, remarque Patrick Roger. "Nous appelons l'ensemble des salariés, du public et du privé, à la grève le 5 décembre, corrige Yves Veyrier. Si tout le monde s'y met, nous pourrons être entendus. C'est un grand classique sur les retraites, on nous agite systématiquement les régimes spéciaux, les problèmes d'inégalité ou de privilèges, alors que la réalité n'est pas du tout celle-là".
La réalité est aussi que des personnes du régime général partent plus tard et avec des salaires parfois moindres que des personnes dans la fonction publique, notamment dans la RATP. "C'est lié à des régimes qui tiennent compte de spécificités des métiers exercés, justifie Yves Veyrier : être conducteur de train ou de métro, ça use beaucoup plus que d'autres métiers, c'est la prise en compte de la pénibilité, qui est insuffisante dans le privé".
Y a-t-il autre chose que la réforme des retraites dans cette grève ? Le pouvoir d'achat ? L'anxiété face à l'avenir ? "Il y a effectivement une situation plus générale, confirme Yves Veyrier. Nous allons justement ce soir déposer nos revendications sur la situation actuelle en matière de retraites et parmi elles, il y a par exemple l'efficacité des aides publiques aux entreprises, la compensation intégrale des exonérations de cotisations qui bénéficient aux entreprises. C'est la partie des recettes qui font qu'on est capable de préserver le système de retraites. Pour qu'on puisse préserver le droit de partir à la retraite à 62 ans. Nous avons un système de retraites qui fait que nous avons le plus faible taux de pauvreté parmi les retraités en Europe. Nous n'avons pas de raisons de supprimer un système qui fonctionne. Nous avons des choses à améliorer, c'est là-dessus qu'il faut agir".
"J'appelle à la sagesse : revenons autour de la table de négociations sans préalable, sans imposer un système"
"Les syndicats, FO en particulier, ont décidé d'appeler à la grève à partir du 5 décembre, car nous avons malheureusement l'expérience des mobilisations précédentes. Des manifestations très réussies n'ont pas suffi à se faire entendre. Donc cesser le travail, c'est le moyen de se faire entendre, c'est un droit constitutionnel". La France sera-t-elle bloquée à partir du 5 décembre pendant plusieurs semaines ? "Tout dépendra du fait qu'on arrive à se faire entendre. Nous sommes déterminés et j'appelle à la sagesse : revenons autour de la table de négociations sans préalable, sans imposer un système".
Concernant le service minimum, "il y a déjà des dispositions prévues, qui obligent dans le secteur public à déposer un préavis de grève, se déclarer individuellement en grève. Le service minimum existe dans le secteur hospitalier, parce qu'il y a des enjeux de sécurité. Les services essentiels sont les services qui ont un impact sur la sécurité et la santé".
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