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A Mayotte, l'hôtellerie-restauration tente de se remettre à flot après Chido

Le nez dans un calepin dans son local cuisine, Julien Bisson fait le point sur les commandes. "On fournit actuellement 100 à 200 repas pour les gendarmes, en attendant de rebondir", lance le gérant du restaurant Lapouz Noz, en Petite-Terre à Mayotte.

PATRICK MEINHARDT - AFP/Archives

Le nez dans un calepin dans son local cuisine, Julien Bisson fait le point sur les commandes. "On fournit actuellement 100 à 200 repas pour les gendarmes, en attendant de rebondir", lance le gérant du restaurant Lapouz Noz, en Petite-Terre à Mayotte.

Pour l'instant, son établissement ne peut rouvrir.

La structure qui protégeait ses tables et accueillait ses clients a en effet complètement disparu avec Chido qui a balayé cet archipel de l'océan indien le 14 décembre, causant la mort d'au moins 39 personnes et des dégâts colossaux.

Dans la cuisine, "les assiettes ont valsé et la toiture s'est percée", inondant une partie des équipements. "On a perdu tout le stock de nourriture", précise le dirigeant, privé d'électricité pendant plusieurs semaines.

"J'avais justement rempli les frigos et congélateurs avant le cyclone pour qu'on ait de quoi reprendre l'activité rapidement", explique M. Bisson, qui a "tout donné à la population pour éviter de jeter", près de 100 kilos de langoustes, des longes de poissons, filets de bœufs et bavettes.

"Une partie n'a pas eu le temps d'être consommée", regrette toutefois celui qui évalue ses pertes de nourriture à près de 15.000 euros et estime qu'environ 80.000 euros seront nécessaires pour réparer les dégâts.

Un investissement que des propriétaires s'apprêtent à assumer. "Nous n'étions pas assurés pour le matériel", soupire M. Bisson, qui emploie sept salariés.

Un hélicopètre de l'armée française survole la ville côtière de Dzaoudzi, à Mayotte, le 28 décembre 2024, deux semaines après le passage du cyclone Chido

Un hélicopètre de l'armée française survole la ville côtière de Dzaoudzi, à Mayotte, le 28 décembre 2024, deux semaines après le passage du cyclone Chido

PATRICK MEINHARDT - AFP/Archives

Selon Carla Baltus, présidente du Medef local, "de nombreuses entreprises se sont rendu compte que leur assurance était limitée et ne les couvrait pas en cas de catastrophe naturelle". Et les restaurants "sont nombreux à avoir perdu" leurs locaux.

"Beaucoup ont été soufflés ou à moitié endommagés", précise Mme Baltus, selon qui "certaines entreprises ne pourront pas reprendre leur activité avant six mois".

L'hôtellerie-restauration représentait en 2021 seulement 5,7% des emplois salariés à Mayotte, selon l'Iedom, l'organe de la Banque de France dans les territoires d'Outre-mer.

- "Faire illusion" -

De l'autre côté du boulevard des Crabes, qui relie le rocher de Dzaoudzi au reste de Petite-Terre, l'emblématique restaurant Le Faré reste porte close.

Le baobab majestueux qui surplombait sa terrasse s'est effondré avec la puissance des vents. A l'intérieur, les chaises et tables en morceaux s'entassent dans un coin, tout comme des planches de bois déchiquetées.

Un peu plus loin, en rejoignant la commune de Dzaoudzi, les deux salariés de la pizzeria "Star Pizza" s'activent en milieu d'après-midi. Devant les dizaines de sachets d'emmental qui meublent l'étagère du fast-food, Olivier (prénom modifié) gratte un reste de pâte collé au fond d’un plat.

"Il n'y a quasiment aucun restaurant qui a repris donc, nous, on n'arrête pas", se réjouit le salarié qui voit les clients défiler. Pour autant, la pizzeria n'a rouvert qu'il y a onze jours. "On est resté un mois sans électricité", raconte le salarié contraint de se débarrasser "des merguez, de la viande hachée et de tout le stock de fromage".

Un gendarme français patrouille dans une rue de Dzaoudzi, à Mayotte, le 28 décembre 2024

Un gendarme français patrouille dans une rue de Dzaoudzi, à Mayotte, le 28 décembre 2024

PATRICK MEINHARDT - AFP/Archives

Pour les habitants, la situation de l'hôtellerie-restauration est désolante.

"Il n'y avait déjà pas beaucoup d'offres et très peu de touristes, mais là, tout est réduit à néant", souligne Yann, qui vit à Mamoudzou. "Les hôtels et restaurants vont mettre des années à s'en remettre. Et c'est une crise économique qui nous pend au nez".

A côté de l'aéroport, l’hôtel Ibis, qui emploie 40 salariés, a fermé 15 de ses 82 chambres à cause de la violence de l'événement climatique.

"Les vitres ont explosé, le mobilier a volé, les chambres ont été inondées", raconte Laura, confinée dans une chambre de l'établissement quand les vents à 200 km/h ont soufflé en décembre.

Depuis, "tout a été sécurisé et on nettoie au fil des jours", souligne Seth Cisse, le directeur, qui a commandé des rouleaux de laine de verre et des plaques de plâtre.

"Ça va nous servir à refaire les cloisons mais c'est du provisoire, ça permet de faire illusion. Il faudra tout enlever pour refaire proprement la structure. Mais ça prendra au moins un an", estime celui qui négocie actuellement avec les assurances.

Pour autant, le directeur "ne se plaint pas". L'hôtel est complet et accueille les gendarmes en renfort. "On peut louer les chambres dans lesquelles ont a mis des planches de bois pour sécuriser les fenêtres. Elles ne pourraient pas être occupées par des clients classiques. Mais en ce moment, personne n'a le choix, tous les hôtels sont endommagés..."

Par Jéromine DOUX / Dzaoudzi (France) (AFP) / © 2025 AFP

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