La révélation de l’affaire Weinstein aux États-Unis a engendré une vague de réactions à Hollywood mais aussi en France, que ce soit dans le milieu du cinéma ou dans la société en général. En France, le hashtag #balancetonporc a connu un grand succès ce week-end sur Twitter, laissant la parole à de très nombreuses femmes racontant leurs propres expériences vécues de harcèlement ou d’agression sexuelle. Porte-parole de l’association Osez le féminisme, Marie Allibert était l’invitée du Grand Matin Sud Radio ce lundi pour en parler.
"Quand un grand scandale de ce genre se produit, il y a toujours derrière un pic de dénonciations, avec des blogs ou des petits Tumblr pour encourager les femmes à témoigner. L’enjeu pour nous, c’est que ça continue et que la tension ne se relâche pas. Qu’il n’y ait pas seulement le bénéfice de l’impact médiatique de l’affaire en cours, mais une prise en compte durable de la difficulté qu’ont les femmes à parler et surtout à porter plainte dans ces cas-là", déclare-t-elle.
"Réformer la façon dont les femmes sont accompagnées par la police et la justice"
"Que ce soit l’affaire DSK, l’affaire Baupin, etc., elles créent une vague d’indignations de femmes qui arrivent à témoigner avec beaucoup de courage. Mais derrière, il ne se passe pas grand-chose. La raison, c’est qu’au-delà du témoignage de ces femmes, il faudrait réformer la façon dont elles sont accompagnées par la police et la justice quand elles essayent de franchir la porte d’un commissariat pour porter plainte. Libérer la parole des femmes est une première étape, mais le but réel est de mettre fin à l’impunité de ces hommes agresseurs qui bénéficient actuellement d’une grande clémence", ajoute-t-elle.
Pour Marie Allibert, la question de la prescription légale notamment est très importante. "En termes de violences sexuelles et sexistes, on sait que les femmes sont agressées la plupart du temps (80% des cas environ) par quelqu’un de leur entourage. Du coup, ça rend encore plus difficile le fait d’arriver à parler, a fortiori pour une victime mineure au sein d’un contexte familial particulier. Toutes les femmes victimes de violences sexuelles rapportent le fait qu’elles ont une grande culpabilité, qu’elles ont honte, etc., mais quand il s’agit d’une personne qu’elles connaissent, c’est encore pire. (…) Les délais de prescription actuels permettent à une femme mineure de porter plainte dans les vingt ans qui suivent sa majorité. Ça paraît très long à tout le monde, mais vingt ans habitée par le traumatisme d’un inceste ou d’une agression sexuelle…", explique-t-elle.
Réécoutez en podcast l’intégralité de l’interview de Marie Allibert dans le Grand Matin Sud Radio