Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a jugé jeudi "affligeante" la suspension par Sciences-Po Strasbourg de son partenariat avec une université israélienne, l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) craint une "dynamique de boycott académique".
"C'est une décision qui est affligeante, qui me désole profondément", a déclaré M. Barrot sur BMFTV/RMC, interrogé sur la suspension par l'Institut d'études politiques de Strasbourg de ses liens avec l'université Reichman, près de Tel-Aviv, en raison de "positions bellicistes" concernant la guerre à Gaza.
"L'université, c'est le lieu du débat, de la tolérance, c'est le temple de l'esprit critique", a déclaré M. Barrot.
"Ce n'est pas cette université qui aujourd'hui bombarde au Liban ou à Gaza. Je rappelle que c'est d'ailleurs dans les universités israéliennes que l'on trouve les plus fervents partisans de la paix et de la solution à deux Etats", a-t-il dit.
"Je déplore cette décision adoptée à des fins de prise de position politique par le conseil d'administration d'un établissement public et en désaccord avec la direction de l'établissement", avait commenté le ministre (LR) de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Patrick Hetzel, dans un message posté mercredi sur X (ex-twitter).
En France, un mouvement étudiant propalestinien s'est développé en 2024 dans certains établissements d'enseignement supérieur et en particulier les instituts d'études politiques, avec à la clef des manifestations et parfois des occupations de bâtiments.
M. Hetzel avait mis en garde début octobre les présidents d'université sur leur responsabilité dans le "maintien de l'ordre" avant l'anniversaire de l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023. En retour, le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon avait appelé à "mettre des drapeaux palestiniens partout où c'est possible".
La décision de Sciences-Po Strasbourg a été prise en juin mais révélée mercredi par le quotidien régional Les dernières Nouvelles d'Alsace (DNA).
Tout en condamnant "sans réserve l'attaque terroriste subie par la population israélienne le 7 octobre 2023", les auteurs de la motion ont dénoncé les "positions de l'université en question, profondément bellicistes et dénuées de toute perspective humaniste, pacifiste et critique au regard de la guerre en cours à Gaza".
La motion avait été soumise par la liste Solidarit'Etudiants, qui dispose de huit des 10 sièges des représentants étudiants au conseil d'administration, et a également été soutenue par certains enseignants.
Le directeur de l'IEP, Jean-Philippe Heurtin, a exprimé à l'AFP sa "forte hostilité" à cette motion.
C'est une mesure "discriminatoire", estime l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), craignant une "dynamique de boycott académique" à l'encontre des établissements israéliens et une "recrudescence de l'antisémitisme" en France.
L'UEJF prévoit de "contester" juridiquement cette décision qui menacerait "la sécurité des étudiants juifs", selon son président Yossef Murciano.
AFP / Paris (AFP) / © 2024 AFP