Un avocat a demandé lundi l'ouverture d'une enquête pour "entrave à la justice" dans l'affaire de viol survenue en 1998 au sein de l'établissement de Bétharram (Pyrénées-Atlantiques), après qu'un ancien gendarme eut évoqué une "intervention" de François Bayrou, qui dément.
Cette demande d'enquête pénale, qui vise aussi des faits présumés de "recel de crime", a été déposée lundi auprès du parquet général de Pau par Me Jean-François Blanco qui représentait, en 1996, le premier élève de cet établissement catholique à avoir porté plainte - pour une violente claque d'un surveillant.
Dans le magazine "Sept à Huit" diffusé dimanche sur TF1, le gendarme chargé de l'enquête sur le père Carricart, ex-directeur de l'institution accusé de viol en 1998, a évoqué une "intervention" de François Bayrou, dont plusieurs enfants ont fréquenté Bétharram, auprès de la justice à l'époque.
Au moment de la mise en examen du suspect, le juge chargé du dossier lui aurait déclaré: "Le procureur général demande à voir le dossier, M. Bayrou est intervenu auprès de lui".
Pour Me Blanco, également élu d'opposition (EELV) à Pau, ville dont le Premier ministre est resté maire, ces "très graves accusations" justifient sa "demande d'enquête sur l'enquête, pour savoir qui a fait quoi, et comment M. Bayrou serait intervenu auprès de la justice".
"On ne peut pas rester sans réponse, il faut que François Bayrou soit convoqué pour s'expliquer", explique-t-il à l'AFP.
"Il n'y a jamais eu d'intervention de ma part, auprès de quiconque, ni sur cette affaire, ni sur aucune autre", a réagi François Bayrou auprès du journal Sud Ouest, ajoutant que sa version était "confirmée" par l'avocat de la victime et l'ancien juge d'instruction.
"Je ne connaissais pas ce procureur général qui est décédé, me dit-on il y a plus de vingt ans", a-t-il poursuivi. "Tout ça c'est des fake news, des fantasmes purs et simples, pour détruire. On a tous vécu l'affaire Baudis - lui y a laissé la peau", a ajouté le Premier ministre.
- "Demandes déguisées" -
Le juge chargé du dossier de viol, en 1998, a affirmé à plusieurs reprises avoir parlé de l'affaire, à l'époque, avec l'actuel chef du gouvernement.
![C'est une institution presque bicentenaire, longtemps prisée des familles aisées béarnaises, mais les plaintes déposées par d'anciens élèves racontent une face plus sombre de l'établissement privé Notre-Dame-de-Bétharram (Pyrénées-Atlantiques)](https://www.sudradio.fr/wp-content/uploads/2025/02/ce2e82a221756861f51a0ffa3e41bffbd0ae8c66.jpg)
C'est une institution presque bicentenaire, longtemps prisée des familles aisées béarnaises, mais les plaintes déposées par d'anciens élèves racontent une face plus sombre de l'établissement privé Notre-Dame-de-Bétharram (Pyrénées-Atlantiques)
Philippe LOPEZ - AFP/Archives
"François Bayrou a fait la démarche de venir me voir lorsque le prêtre était en détention. Il s'inquiétait pour son fils scolarisé à Bétharram. Il disait qu'il ne pouvait pas croire que le père Carricart avait fait ce qu'on lui reprochait", a déclaré Christian Mirande à La République des Pyrénées.
Interrogé sur d'éventuelles pressions, il avait ajouté avoir "dû répondre à de nombreuses questions (...) notamment de la part du procureur général" de l'époque, ajoutant que "c'étaient des demandes un peu déguisées".
Mais l'ancien juge a assuré à TF1 que François Bayrou, "en aucun cas", ne lui avait "demandé de modérer (s)es décisions". "Je n'ai vraiment pas le souvenir qu'on m'ait dit que Monsieur Bayrou était intervenu", complète-t-il.
Samedi à Pau, après avoir rencontré des victimes de Bétharram, le Premier ministre a affirmé que le juge, son voisin à Bordères où il habite, lui avait parlé de la plainte pour viol en 1998, sans que lui-même ne sollicite une rencontre. Et pour M. Bayrou, leur conversation a eu lieu après la remise en liberté du religieux, et non avant.
La demande d'enquête de Me Blanco porte aussi sur les conditions de "la fuite" du père Carricart qui, libéré sous contrôle judiciaire huit jours après sa mise en examen, avait rejoint Rome, où il s'est suicidé en 2000.
Lundi matin, le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard, a redemandé la démission de François Bayrou en l'accusant à nouveau de mentir.
AFP / Biarritz (AFP) / © 2025 AFP