À quelques jours de la nouvelle année, alors que le pass vaccinal fait son entrée en scène en France, se pose la question de la campagne présidentielle. Comment concilier crise sanitaire et débats de fond ? Quoi qu'il en soit, tout cela ne va pas arranger Emmanuel Macron nous explique Arlette Chabot.
"La campagne sera différente, les Français vont s'en apercevoir. Une campagne sous Covid pose des questions sur l'organisation de cette campagne pour chaque candidat. Y aura-t-il de grands rassemblements, de grands meetings ? Les candidats y voient comme des démonstrations de force et de grands moments de mobilisations militantes. Souvenons-nous du meeting d'Éric Zemmour à Villepinte. La réflexion est ouverte pour la suite. La campagne commence vraiment en janvier".
"Ces rassemblements auront-ils lieu ? Il y a une question précise qui se pose pour le RN, par exemple, avec 3200 militants attendus mi-janvier à Reims pour le lancement, la convention présidentielle de Marine Le Pen. Le gouvernement va-t-il imposer des jauges pour ces rassemblements ? Chacun va choisir ses règles. Le Pass sanitaire, voire vaccinale, ne peut être imposé. En revanche, on sait qu'il est souhaité chez les Verts, les LR, les socialistes, les marcheurs et pas chez les autres évidemment".
"Il y aura donc moins de réunions publiques, plus d'interventions sur les réseaux sociaux. Et puis, deuxième conséquence, c'est évidemment un agenda politique bouleversé. Tout le mois de janvier ou presque sera consacré justement à ce débat. On se souvient des débats l'été dernier au mois de juillet pour l'extension du Pass, ça avait été fort, virulent, long, avec 2000 amendements déposés par les parlementaires, des discussions interminables entre l'Assemblée et le Sénat. Chacun, encore une fois, va jouer contre le gouvernement. Le RN et LFI dénoncent déjà des atteintes aux libertés".
"Les débats de campagne vont être, un peu, perturbés. En tout cas, il y a un soucis commun pour tous, c'est le risque de l'abstention, la désertion des bureaux de vote, la crainte si l'épidémie continue à se développer avec un très mauvais souvenir des élections régionales et les 65% d'abstention au second tour".
La situation sanitaire va-t-elle profiter à Emmanuel Macron ?
"La gestion quotidienne d'une crise aussi grave place naturellement Emmanuel Macron au centre de la vie, de la nation et non plus seulement de la vie politique. Cela renforce naturellement sa fonction de président protecteur lui offrant la possibilité d'être présent dans les médias et de parler quand bon lui semble".
"En même temps, il faut être limite complotiste pour imaginer - comme Éric Zemmour - une dramatisation de la situation sanitaire pour éviter de parler des sujets "beaucoup plus importants" comme l'immigration. Ou alors, tous les dirigeants de la planète et singulièrement en Europe seraient tous en train d'instrumentaliser la crise sanitaire à leur profit".
"Pour l'instant, c'est vrai, le chef de l'État profite d'une bonne cote de popularité pour sa gestion de la crise. Mais qu'en sera-t-il demain ? Les décisions sont souvent contestées. On en revient au débat sur le pass vaccinal voire l'obligation vaccinale. Les choix peuvent être remis en cause. La situation à l'hôpital revient en force aussi dans les débats. Donc je pense que le président de la République aurait préféré conserver sa fonction de président-candidat en charge de la bonne marge de l'Union Européenne à partir du mois de janvier".
"Sur ce plan là, il devrai aussi gérer la crise sanitaire aux dépens de ses autres ambitions. L'épidémie est plus un fardeau qu'une chance pour Emmanuel Macron".
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