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Dérapage budgétaire: la guerre est déclarée entre le Sénat et l'ex-majorité

Guerre ouverte entre le Sénat et l'ex-majorité sur le dérapage budgétaire: la chambre haute a accusé mardi les précédents gouvernements "d'irresponsabilité" et "d'attentisme" face à la dérive des finances publiques, dans un rapport qualifié "d'attaque indigne" par le camp macroniste, qui crie au "mensonge".

STEPHANE DE SAKUTIN - AFP

Guerre ouverte entre le Sénat et l'ex-majorité sur le dérapage budgétaire: la chambre haute a accusé mardi les précédents gouvernements "d'irresponsabilité" et "d'attentisme" face à la dérive des finances publiques, dans un rapport qualifié "d'attaque indigne" par le camp macroniste, qui crie au "mensonge".

Bruno Le Maire, Gabriel Attal, Elisabeth Borne, Emmanuel Macron... Après plusieurs auditions, la commission des Finances du Sénat n'a épargné personne.

Selon les conclusions de la mission d'information, tous les anciens dirigeants, à Bercy, à Matignon comme à l'Elysée, ont leur part de responsabilité dans le creusement du déficit public, attendu à 6,1% du PIB fin 2024, contre 4,4% prévu initialement. Déficit qui ne passerait sous les 3% autorisés par l'UE qu'en 2029, faisant de la France un mauvais élève européen.

"Au sentiment général du déni collectif sur la situation des finances publiques, s'ajoute désormais un sentiment d'irresponsabilité de ceux qui étaient alors au gouvernement", a lancé lors d'une conférence de presse le rapporteur de cette mission "flash", Jean-François Husson (Les Républicains).

"Le gouvernement connaissait en réalité l'état critique de nos finances publiques dès le mois de décembre 2023. Il aurait dû, selon nous, réagir vigoureusement. Mais il ne l'a pas fait", a repris le président socialiste de la commission des Finances Claude Raynal.

Très remontés face à ces accusations, MM. Le Maire, Attal et Mme Borne ont fait bloc dans la foulée lors d'un briefing à la presse, tenu conjointement aux côtés de l'ex-ministre du Budget Thomas Cazenave.

"Ce n'est pas un rapport, c'est un réquisitoire d'opposants politiques truffé de mensonges, d'approximations et d'affirmations spécieuses", a dénoncé Bruno Le Maire. "Une attaque indigne qui repose sur des allégations qui sont irréalistes ou mensongères", a abondé l'ancienne cheffe du gouvernement Elisabeth Borne.

- "Calculs à courte vue" -

Les deux sénateurs, opposants de longue date au camp présidentiel, n'ont "pas trouvé un seul élément tangible attestant que la situation des finances publiques n'aurait pas été prise au sérieux", a renchéri Gabriel Attal. "Pour une raison simple, il n'y en a pas".

Dans son rapport adopté à l'unanimité, le Sénat estime pourtant que de nombreux mois ont été "perdus" dans le rétablissement des comptes, en raison des remaniements et surtout de la dissolution, prémisse d'une "trop longue attente dans la désignation du nouveau Premier ministre".

Il regrette aussi l'absence de budget rectificatif au printemps, décidée selon eux par des "calculs à courte vue" sur fond d'élections européennes et de risque de censure.

L'Assemblée nationale s'apprête à prendre le relais: elle diligentera dans les prochaines semaines une commission d'enquête sur le même thème.

L'ancien minsitre de l'Economie Bruno Le Maire avant son audition par la commission des finances du Sénat sur le dérapage budgétaire, à Paris le 7 novembre 2024

L'ancien minsitre de l'Economie Bruno Le Maire avant son audition par la commission des finances du Sénat sur le dérapage budgétaire, à Paris le 7 novembre 2024

Bertrand GUAY - AFP

Le dossier est ultrasensible, en plein coeur d'un automne budgétaire à haut risque pour le gouvernement de Michel Barnier, menacé de censure par les oppositions à l'Assemblée nationale, où le camp gouvernemental est très minoritaire.

D'où l'intérêt pour le Sénat et sa majorité de droite de crever l'abcès au plus vite, pour éviter de rééditer de nouvelles "erreurs de pilotage".

- Notes internes -

Autre intérêt pour LR: se différencier de l'ex-majorité macroniste, alors que la droite fait désormais partie de la coalition gouvernementale et tente de justifier son soutien à un budget très impopulaire, avec "60 milliards d'euros" d'effort demandés à toutes les strates de l'économie.

En attendant, l'accueil glacial de ce rapport par le camp présidentiel perturbe encore un peu plus l'unité du "socle commun"...

Les versions divergent en effet sur les informations dont les anciens dirigeants disposaient dès la fin 2023.

Les sénateurs s'appuient notamment sur diverses notes internes du Trésor, ainsi que sur une missive envoyée le 13 décembre 2023 par Bruno Le Maire et Thomas Cazenave à Elisabeth Borne, lui recommandant de communiquer sur "le caractère critique de (la) situation budgétaire".

L'ancienne Première ministre Elisabeth Borne avant son audition par la comission des finances du Sénat sur le dérapage budgétaire, à Paris le 15 novembre 2024

L'ancienne Première ministre Elisabeth Borne avant son audition par la comission des finances du Sénat sur le dérapage budgétaire, à Paris le 15 novembre 2024

Bertrand GUAY - AFP

"Les ministres ont tenu un double discours" entre cette note interne et leurs prises de position publiques rassurantes de l'époque, s'indigne la mission sénatoriale.

"Mensonges ! Nous avons réagi immédiatement, alerté la Première ministre et anticipé en prenant des mesures de correction", a balayé Bruno Le Maire.

Les anciens responsables ont tous assuré avoir "maîtrisé la dépense", en annulant notamment des milliards de crédits début 2024. L'explication, selon eux, réside surtout dans une erreur d'évaluation des recettes, inférieures de 41,5 milliards d'euros aux prévisions en termes de prélèvements obligatoires.

Par Antoine MAIGNAN / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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