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Dérapage sur Vallaud-Belkacem: le RN rattrapé par ses vieux démons

Le RN s'en serait bien passé juste avant les législatives: le dérapage du député Roger Chudeau sur l'ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem met à mal la stratégie de dédiabolisation du parti, même si jusqu'ici rien ne semble empêcher sa progression dans les sondages.

Miguel MEDINA - AFP/Archives

Le RN s'en serait bien passé juste avant les législatives: le dérapage du député Roger Chudeau sur l'ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem met à mal la stratégie de dédiabolisation du parti, même si jusqu'ici rien ne semble empêcher sa progression dans les sondages.

L'impossible normalisation? Durant cette campagne éclair, le parti lepéniste doit déjà faire face aux controverses à répétition sur le passif sulfureux de certains de ses candidats sur les réseaux sociaux, des propos "racistes, antisémites et homophobes", dénoncés par le Premier ministre Gabriel Attal.

Cette fois, c'est un député sortant - que des membres du RN présentaient comme un potentiel ministre de l'Education nationale - qui plonge son camp dans la tourmente.

Sur BFMTV, Roger Chudeau s'en est pris à l'ancienne ministre socialiste de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem. La nomination de cette "Franco-Marocaine" fut une "erreur" et "pas une bonne chose pour la République", a-t-il lancé.

Plus largement, ce candidat à sa réélection dans le Loir-et-Cher pense "que les postes ministériels doivent être détenus par des Franco-Français", pour éviter un "problème de double loyauté".

"Il s'agit là d'un insupportable procès en déloyauté qui est fait, à travers moi, à des millions de Français", a réagi vendredi soir Najat Vallaud-Belkacem sur France Info.

Il y a "derrière cette idée qu'une personne binationale ne pourrait pas être ministre parce qu'elle serait supposément forcément déloyale à la France", a poursuivi l'ex-ministre.

Vendredi matin, M. Chudeau a annulé une interview sur Sud Radio, d'après la station, et ce sont les cadres du parti qui sont venus prendre leurs distances, jusqu'à Marine Le Pen elle-même.

Roger Chudeau a un avis "personnel", "totalement contraire en réalité au projet du Rassemblement national", a taclé sur CNews la triple candidate à la présidentielle.

"On ne peut pas" lui "retirer l'investiture à deux jours" du premier tour, mais "je pense que le président du parti", Jordan Bardella, "ne laissera pas les choses en l'état", a-t-elle assuré, alors que le RN est déjà confronté à une polémique sur sa proposition d'exclure les binationaux des postes "extrêmement sensibles" de l'Etat: nucléaire, défense, renseignement...

La suppression générale de la double nationalité figurait plus largement dans le programme de Marine Le Pen en 2017, avant qu'elle ne l'enlève à l'approche de l'élection suivante. "Je me suis rendu compte que les binationaux ressentaient" cela "comme une forme de suspicion" et "je trouvais ça profondément injuste", a-t-elle affirmé vendredi.

- "Double allégeance" -

Le procès en "double allégeance" des binationaux a régulièrement été agité à l'extrême droite, notamment chez Jean-Marie Le Pen, qui en 1989 avait interrogé le secrétaire d'Etat Lionel Stoléru, de confession juive, sur une supposée "double nationalité" qu'il n'avait pas.

Najat Vallaud-Belkacem à Lyon le 1er juin 2021

Najat Vallaud-Belkacem à Lyon le 1er juin 2021

JEFF PACHOUD - AFP/Archives

Depuis les propos de M. Chudeau, la polémique ne cesse d'enfler. Ironiquement, Najat Vallaud-Belkacem a "remercié" M. Chudeau pour "ce bel aperçu de ce que donnerait le RN au pouvoir: incompétence, racisme et mensonge".

Le parti montre son "vrai visage", celui d'"un racisme décomplexé", a réagi la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (Renaissance).

"On doit s'indigner de ces choses-là", a souligné le chef de l'Etat, Emmanuel Macron, depuis Bruxelles.

"Le président de la République et d'autres en font des caisses" et "utilisent ça" de façon "électorale", a répondu le député RN Jean-Philippe Tanguy sur BFMTV, tout en regrettant les propos "pas fondés" de Roger Chudeau qui "n'engagent que lui".

Plus largement, le camp présidentiel a recensé dans une "carte de la honte" interactive les propos controversés de plus d'une centaine de candidats RN aux législatives des 30 juin et 7 juillet.

Investie dans les Côtes-d'Armor, Françoise Billaud avait relayé sur Facebook une image suggérant de soutenir "l'hétérosexualité pendant qu'elle est encore légale". En juillet 2021, elle avait partagé une publication d'un internaute montrant la tombe de Pétain, avec la légende "23 juillet 1951, mort en détention de Philippe Pétain, Maréchal de France", comme l'a relevé le quotidien Libération. Son compte a été supprimé depuis quelques jours.

En Côte-d'Or, René Lioret fustigeait les "racailles africaines" sur les réseaux sociaux. A Paris, Agnès Pageard a relayé un message qui dénonçait "le degré de connivence au sommet de l'Etat" de plusieurs personnalités juives.

Opposée à François Hollande en Corrèze, la candidate RN Maïtey Pouget a estimé vendredi midi sur LCI, depuis la halle du marché de Brive-la-Gaillarde, que la France "commence à être envahie" par l'immigration, mais pas "à cette heure-là" car "ils dorment".

Ces polémiques n'ont jusqu'ici pas freiné la course en tête du Rassemblement national dans les sondages, qui le créditent de 36% à 37% des intentions de vote au premier tour.

Le bloc RN est "dans une dynamique profonde", estime le sondeur Brice Teinturier (Ipsos) et "on ne peut pas exclure, loin de là, une majorité absolue" à l'issue du second tour.

Par Adrien DE CALAN / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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