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Deux médecins touchent près de 100.000 euros pour passer d'un désert médical à un autre

Deux médecins généralistes âgés de 60 ans, qui étaient dans la Sarthe, ont prétendu partir en retraite après 25 ans dans leur commune pour s’installer dans une autre commune dans la Manche et ils ont reçu l’aide pour s’installer dans un désert médical. Le docteur Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, nous explique.

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Jean-Paul Ortiz, interviewé par Cécile de Ménibus et Patrick Roger sur Sud Radio dans "C'est à la Une".

"Je pense que cela traduit seulement le manque de médecins qui atteint l’ensemble du pays, quels que soient les endroits. On le voit en particulier dans le sud de la France, ce qui n’avait jamais été le cas avant. On a mis en place des aides à l’installation et ce qu’ont fait ces deux médecins est tout à fait réglementaire et légal. Alors bien sûr, c’est choquant, c’est un effet d’aubaine dont ils profitent", juge Jean-Paul Ortiz.

"Nous manquons de médecins partout. Il faut continuer les aides à l’installation. Ce schéma-là, on ne l’avait jamais imaginé quand on avait mis en place ces aides à l’installation. Il faut probablement redéfinir les choses. Si des médecins quittent des zones sous-denses et qu’ils vont s'installer dans une autre zone sous-dense, ce n’est pas l’esprit de ces aides à l’installation bien évidemment, ça il faut donc l’empêcher. Malheureusement, c’est vrai que c’est compliqué partout", explique le président d’honneur de la CSMF.

 

"Les médecins peinent à s'installer"

"C’est choquant. Je crois qu’il faut mettre en place un mécanisme qui empêche des médecins qui sont installés dans une zone sous-dense d’aller s’installer dans une autre zone sous-dense et de bénéficier des aides à l’installation. Mais il faut aller plus loin dans le raisonnement", juge Jean-Paul Ortiz. "Aujourd’hui, pourquoi un certain nombre de médecins peinent à s’installer ? Pourquoi les anciens prennent la retraite à 60 ou 65 ans ? Parce que le métier n’attire pas".

"Il faut revaloriser le métier de médecins de ville. Il faut, lorsqu’on veut faire du cumul emploi et retraite, dispenser les médecins des cotisations ou leur donner un plus de retraite. Bref, il faut essayer de tout faire pour maintenir une offre de médecins dans le territoire parce que les Français souffrent trop de ça, nous en sommes conscients. Nous essayons de trouver des solutions pour répondre aux besoins de la population, c’est notre responsabilité collective et on voit bien que ce que l’on a mis en place dans certains cas, peut dériver", explique l’ancien président de la CSMF.

 

"Il faut soutenir la médecine libérale"

"Je sais que certains départements mettent en place des médecins salariés par exemple. Un médecin salarié aujourd’hui, voit moins de patients qu’un médecin libéral parce qu’il fait 35 ou 40 heures et qu’un médecin libéral en fait 55. Il faut dire aux responsables politiques de faire attention. Chaque fois que vous créez un poste de médecin salarié, quelque part, vous participez à l’aggravation de la diminution de l’offre de soins", juge Jean-Paul Ortiz. "Il faut au contraire multiplier et soutenir les médecins libéraux parce qu’ils vont avoir plus de patients, ils vont prendre en charge plus de Français qui en ont besoin".

"On ne peut pas laisser des millions de Français, on parle de 3 millions de Français qui aujourd’hui n’arrivent pas à avoir de médecin traitant. Là-dedans, il y a 600.000 patients qui sont atteints de pathologie chronique. Nous, médecins, ça nous choque, on ne peut pas rester comme ça. Il faut absolument soutenir la médecine libérale, on est prêts à assumer cette responsabilité vis-à-vis de la population et il faut qu’on nous y accompagne", explique Jean-Paul Ortiz. "Tout le monde doit se retrousser les manches et se mettre autour de la table avec l’État, l’assurance maladie, les professionnels de santé, les médecins libéraux, les collectivités locales dans toutes leurs dimensions, les départements, les communautés de communes, les grosses communes entre elles, etc. On ne peut pas laisser les départements se tirer la bourre pour avoir un médecin".

 

"L'administration n'a pas mis en place les garde-fous nécessaires"

"C’est choquant mais compréhensible parce que les politiques sont soumis à la pression de leurs élus. Donc, le maire, le président du département, de la communauté de communes, est prêt à mettre la main à la poche et à mettre beaucoup d’argent sur la table pour essayer de trouver des médecins. Je crois que ce n’est pas la bonne solution", explique Jean-Paul Ortiz. "Voyons comment un maire d’une commune met à disposition d’un médecin, un petit local où il viendra deux fois par semaine alors qu’il vit ou exerce à 20 ou 30 km de là et l’assurance maladie paie le déplacement", propose-t-il.

"Je trouve, en tant que médecin, qu’ils ont bénéficié d’un effet d’aubaine et en tant que citoyen, ça me choque", explique-t-il à propos des deux généralistes. "Mais ils n’ont pas fraudé, ils ont utilisé une disposition qui est parfaitement réglementaire, qui est parfaitement cadrée. Ce ne sont pas des voleurs. On peut dire que l’administration n’a pas mis en place tous les garde-fous pour éviter ce type de dérive parce qu'on n'avait pas pensé à ce type de mécanisme. Mais encore une fois, je crois qu'il va falloir que tout le monde prenne conscience que l’on mettra pas un médecin dans chaque village. Il faut inventer une nouvelle façon d’accéder aux soins pour les Français avec en particulier le numérique, mais il n’y a pas que ça et il faut accompagner les médecins libéraux pour qu’ils se réorganisent", explique Jean-Paul Ortiz.

 

Retrouvez "C’est à la Une" chaque jour à 7h10 dans le Grand Matin Sud Radio avec Patrick Roger et Cécile de Ménibus.

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