Il est 10h41 lundi quand plusieurs centaines de personnes, principalement des Allemands et des Espagnols, observent une minute de silence dans la commune du Vernet (Alpes-de-Hautes-Provence), pour rendre hommage aux victimes du crash d'un avion de la Germanwings, survenu dix ans auparavant.
Cet Airbus A320 de la compagnie low-cost allemande, filiale de la Lufthansa, avait été précipité délibérément sur le flanc d'une montagne proche par son copilote, Andreas Lubitz, 27 ans, sous antidépresseurs, qui avait profité de l'absence momentanée dans le cockpit du commandant de bord pour commettre son acte suicidaire, entraînant dans la mort les 149 autres passagers et membres d'équipage.
L'avion reliait Barcelone (nord-est de l'Espagne) à Düsseldorf (ouest de l'Allemagne) avec six membres d'équipage et 144 passagers, originaires de 19 pays, en majorité des Allemands (72) et des Espagnols (50).
"Malgré 10 ans de passé, cela me semble comme si c'était hier. J'ai perdu ma fille dans cet accident, elle était professeure", raconte Engelbert Tegethoff, les larmes aux yeux, à l'issue d'une cérémonie de recueillement privée, marquée par des prises de paroles et d'intermèdes musicaux, organisée pour ces quelque 360 proches des victimes.
Sa fille, Stefanie, accompagnait avec un autre professeur 16 élèves du lycée Joseph-König de Haltern am See en Rhénanie-du-Nord-Westphalie (ouest de l'Allemagne) qui revenait d'un voyage scolaire en Espagne.
Une cérémonie du souvenir s'est d'ailleurs tenue en parallèle dans cet établissement: à 10h41, heure exacte du crash le 24 mars 2015, plusieurs centaines d'élèves et d'enseignants se sont rassemblés dans la cour de l'établissement pour observer une minute du silence devant le plaque commémorative au pied de laquelle avaient été déposées de nombreuses fleurs et 18 bougies en souvenir des victimes.
"Je viens chaque année, depuis que cela a lieu, toujours ici", a expliqué Sabine Herzogenrath. Cette Allemande de 59 ans a perdu dans le crash son frère, sa belle-soeur et son neveu. Ce moment de recueillement s'est révélé "très important. Sans cela, je ne sais pas comment je pourrai gérer le deuil. Nous le partageons avec les autres gens, avec lesquels nous formons presque une famille désormais".
- Règles renforcées -

Cérémonie commémorative marquant le dixième anniversaire du crash de l'Airbus A320 de la Germanwings, le 24 mars 2025 au Vernet, dans les Alpes-de-Haute-Provence
Christophe SIMON - AFP
A l'issue de la cérémonie, certains sont partis se recueillir sur une stèle adjacente ou encore au cimetière du Vernet, village le plus proche du lieu de l'impact, où sont enterrés les restes des corps non identifiés. Un peu plus tôt, plusieurs officiels français, allemands et espagnols ainsi que le patron de Lufthansa y avaient déposé des gerbes de fleurs.
Certains, bravant le froid et un ciel couvert, ont emprunté un chemin de randonnée qui mène au col du Mariaud, à 1.500 mètres d'altitude, pour se recueillir en face du site du crash sur une plateforme, où est dressé un mémorial de cinq mètres de diamètre intitulé "Sonnenkugel" (sphère solaire en allemand), renfermant des souvenirs personnels des familles.
"Nos pensées accompagnent les proches et les amis des victimes, dont la douleur et le deuil restent immenses, même après une décennie", a déclaré le PDG du groupe Lufthansa, Carsten Spohr.

Photo diffusée, le 13 avril 2015, par le ministère français de l'Intérieur montrant des débris prélevés sur le site du crash de l'Airbus A320 de la Germanwings au Col de Mariaud, au Vernet, dans les Alpes-de-Haute-Provence
Yves MALENFER - Ministsère de l'Intérieur/AFP/Archives
Suite à ce drame, l'industrie aéronautique avait imposé l'obligation d'avoir constamment deux personnes dans le cockpit simultanément. Une procédure finalement abandonnée car jugée peu efficace. En revanche, le suivi médical et psychologique des pilotes a été amélioré et des systèmes de prévention et de détection plus sophistiqués ont été imposés.
En mars 2022, la justice française avait clôturé l'enquête sur ce crash sans lancer de poursuite, considérant le geste "suicidaire" du copilote comme imprévisible.
Les crashs intentionnels de pilotes d'avion restent des actes extrêmement rares dans l'histoire récente de l'aviation civile. En mars 2022, 132 personnes avaient péri dans l'accident délibéré d'un Boeing 737-800 en Chine.
Le plus important accident de ce type répertorié est lui survenu en octobre 1999 lorsqu'un un Boeing 767 d'EgyptAir s'était abîmé dans l'océan Atlantique, au large des côtes du Massachusetts (nord-est des États-Unis), peu après son décollage de New York à destination du Caire, faisant 217 morts.
Par David COURBET / Le Vernet (France) (AFP) / © 2025 AFP