L’étude de la Fondation pour l’innovation politique met en exergue la citation de Raymond Aron : "Je crois que tout est toujours en question, que tout est toujours à sauver, que rien n'est définitivement acquis et qu'il n'y aura jamais de repos sur la terre pour les hommes de bonne volonté". Pour Dominique Reynié, "la phrase de Raymond Aron est magnifique en elle-même, parce qu’elle donne à penser et au fond, elle résume très bien l’inquiétude qui traverse notre étude et qui en a suscité la conception". "Le XXIe siècle, nous y sommes depuis plus de 20 ans. C’est peut-être le siècle qui va voir la disparition de la démocratie, l’attrition des libertés et la remise en cause des libertés".
"Je ne veux pas prononcer une phrase comme ça qui serait ronflante et aurait pour effet de capter l’attention", explique Dominique Reynié. "Mais nous avons toute une série de raisons de penser, en observant le monde, que les libertés ne sont plus ce qu’elles étaient. Il y a parfois de très bonnes raisons. À la fin quand même, il y a moins de libertés. Ainsi, peu à peu, on voit se défaire quelque chose qui n’est que le résultat d’un très long processus historique et d’une très grande fragilité", juge le directeur de Fondapol, la Fondation pour l’innovation politique.
"Dans des pays où il n’y a pas la démocratie, on rêve de liberté"
"L’enquête est déterminée par cette question. Ensuite, j’ai souhaité que nous donnions des éléments objectifs et des éléments de mesure. J’ai donc défini un périmètre de pays pertinents, 55 pays, notamment des pays comme l’Inde ou le Mexique. Pour cela, il fallait évidemment que je mobilise des ressources", explique Dominique Reynié. "J’ai donc trouvé des partenaires, qui sont d’autres fondations. Une fondation américaine, japonaise, argentine, brésilienne, allemande, etc.".
"Nous, la Fondation pour l’innovation politique, nous sommes la fondation leader sur cette enquête. Nous avons rédigé le questionnaire. Puis ensuite rédigé l’analyse des résultats, la publication et nos partenaires sont associés dans la diffusion de ce travail. Celui-ci est déjà traduit en anglais et sera traduit en espagnol, en portugais, en japonais et en arabe pour commencer", raconte Dominique Reynié. "C’est un travail qui est censé questionner dans le monde qui s’interroge sur l’avenir des libertés. Dans le monde démocratique, mais aussi au-delà. Parce que dans des pays où il n’y a pas la démocratie, on rêve de liberté. Le goût de la liberté est plus affiné quand nous ne sommes pas nés dedans", juge-t-il.
"Nous pouvons nous exprimer librement, cela est vérifiable"
Pour Dominique Reynié, "les critères pour dire qu’un pays est une démocratie, c’est la possibilité que nous avons de nous exprimer librement". "Cela ne veut pas dire que nous ne nous disputons pas. Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas des désaccords qui sont parfois farouches. Mais nous pouvons nous exprimer librement, et je crois que cela est vérifiable. La presse est libre. Et même chacun de nous, nous avons des opinions", explique-t-il. "Moi, qui ai des opinions, j’ai aussi, sans le savoir toujours, mes propres intérêts qui se mêlent à tout cela. C’est pour chacun la même chose. Nous avons des préférences et des intérêts. Et puis, il y a la possibilité bien sûr de choisir ceux qui vont faire la loi, les représentants, ceux qui vont nous gouverner, les gouvernants. Nous avons des élections".
Il y a bien entendu "des motifs de critique" selon Dominique Reynié. "Ces critiques sont d’ailleurs un aspect que nous trouvons dans notre étude, ce que j’appelle la critique démocratique de la démocratie. Il y a une critique de la démocratie qui consiste à dire qu’il faudrait un autre régime autoritaire. C’est une version qui n’est pas la version dominante. Et vous avez une version très répandue qui est la critique démocratique de la démocratie", explique-t-il. "La démocratie est considérée, dans beaucoup de pays, comme n’étant pas à la hauteur des principes sur lesquels elle se fonde. Il s’agit d’une critique qui est saine, qui est nécessaire et qui est la sève de l’idée démocratique".
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