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Élisabeth Lévy : "Frontex : Fabrice Leggeri a tenu compte de la réalité"

Le patron français de l’agence européenne Frontex, Fabrice Leggeri, a démissionné. Élisabeth Lévy réagit.

Le patron français de l’agence européenne Frontex, Fabrice Leggeri, a démissionné. Élisabeth Lévy réagit.

Frontex, c'est l'agence de garde-frontières et de garde-côtes, créée en 2015, chargée du contrôle des frontières européennes. Fabrice Leggeri, 54 ans, énarque, normalien,  qui a fait carrière dans les ministères régaliens en France, avait été nommé en 2015, reconduit en 2019 pour muscler l’organisation. Mais depuis deux ans, il en butte à une campagne médiatique lancée par De Spiegel, les ONG et soutenue par Ursula von der Leyen. On l’accuse d’avoir couvert la Grèce, en 2020, quand elle a refoulé vers les eaux territoriales turques les migrants qui voulaient accoster à Lesbos et Evros. C'est le principe de non-refoulement: dès qu’un migrant met le pied sur le sol européen, il a le droit de rester jusqu’à l’examen définitif de sa demande d’asile. L’esprit est d’interdire le renvoi  d’une personne dans un pays où il risque la persécution. Mais Fabrice Leggeri a tenu compte de la réalité. Il a vu que l’asile devient une nouvelle filière d’immigration, l'instrumentalisation des migrants par la Turquie, qui les pousse vers l’UE (ou monnaye sa retenue), et le nombre des entrées illégales qui ne cessent d'augmenter.

Fabrice Leggeri a eu droit au service grand luxe : un rapport de l’OLAF, l'organisme anti-fraude de l’UE, a dénoncé sa gestion. Ce serait drôle d’auditer toutes les agences de l'Union européenne, c'est un très bon job pour Mckinsey ! Ces règlements de comptes qui sont l’ordinaire des grandes boutiques internationales. 

Quelles sont les véritables raisons de sa démission ?  

C'est un conflit idéologico-philosophique sur la mission de Frontex. Les uns veulent une police, les autres des assistantes sociales. Pour Leggeri, Frontex est une police des frontières : "Nous sommes un partenaire opérationnel, respectueux des procédures, mais pas une agence humanitaire. Il avait même commencer à armer ses agents. Cela a fait hurler les ONG et les médias, et donc pour la Commission qui est de plus en plus sous leur influence. Pour eux, Frontex est une surveillance des Etats pour vérifier le droit des migrants, et l'assistance aux traversées illégales. D'ailleurs, les agents sont désormais flanqués de commissaires aux droits. 

Si on l'applique à tous les pays, même ceux où la personne ne risque pas de persécution, le principe de non-refoulement signifie qu'il n'y pas de frontières, que l’Europe est un droit de l’homme. C'est très raccord avec la pente idéologique de l’UE. No border. Fliquage des Etats. Droits illimités. 

Comment arbitrer entre l’humanitarisme de l’UE et le réalisme de Leggeri ? C'est très simple. C'est aux peuples de décider. La plupart pensent que l’Europe ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Ils veulent des frontières et donc une police pour les protéger. 

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