Revenons sur l’interview de Xavier Bertrand au JDD.
Et par là-même tirer mon chapeau au président des Hauts-de-France. La grande classe. Je ne parle pas de son programme mais de sa conception de la politique. En effet, même pour sauver son siège, il ne passera aucune alliance, ni avec le RN, ni avec En Marche. Veut-il s’interdire l’hésitation et la tentation des tractations, éviter les pressions de ses colistiers ? Quoiqu’il arrive, il a déjà déposé ses listes pour les deux tours. No way back. Il veut être jugé sur son bilan. Du coup, quand il dit que s’il perd, il fera autre chose, on a envie de le croire.
Sa méthode contraste cruellement avec celles des Machiavel de bacs à sable de la majorité. Du Mitterrand, mais sans le talent. Ne revenons pas sur les palinodies Pacasiennes. Dans le Nord, ils envoient cinq ministres dont ceux de la Justice et de l’Intérieur. « Ils vont pouvoir tenir leur Conseil des ministres à Lille », oserait-on. J’ignore quel grand communicant les conseille, mais cette stratégie n’est pas seulement minable, elle est inefficace. Plus personne ne croit aux éléments de langage, ceux usés trop usés de la lutte contre le Rassemblement National. Leur objectif, finalement, est de cogner sur Bertrand et ainsi favoriser le RN pour en arriver au duel de second tour Macron / Marine Le Pen. En somme, Macron prend le risque de placer sur orbite présidentielle un parti que son Garde des sceaux qualifie de menace pour la démocratie dans le seul but d’augmenter ses propres chances de rester à l’Elysée. L’intérêt général ne pèse pas lourd dans ces calculs de bas étage.
Certes mais Xavier Bertrand pourrait perdre dès juin.
C’est là qu’il fait preuve de panache. Il joue sa carrière sur un coup. Qu’il puisse envisager de faire autre chose que de la politique quand tant d’élus sont shootés au pouvoir, fut-il très limité, est rafraîchissant. Et cela témoigne d’un certain équilibre personnel.
Surtout, il prend des risques, accepte le jugement des électeurs sans les soumettre à un chantage infantilisant – moi ou le populisme. Le courage est l’essence de la politique. Il ne mise pas l’avenir des Français mais le sien.
C’est, à mon avis, un excellent calcul. S’il gagne les régionales, il aura conquis à la loyale sa stature de présidentiable. Un type à qui on peut faire confiance. S’il perd, il perdra seulement le pouvoir. Et gardera l’essentiel : son honneur.