J'ai vu ça dans un article du Monde, de la correspondante à Bruxelles: les rédacteurs en chef de la télévision publique ont reçu la consigne de mieux traiter quatre thématiques : diversité, visibilité, Outre-mer et Europe. D’après la consœur, une partie variable des rémunérations dépend de leur capacité à atteindre cet objectif. Passons sur l’aspect financier, même si ce mélange de démocratie populaire et de management capitaliste est assez rigolo.
En quoi cette ligne éditoriale est-elle un problème ?
Pour la clarté, séparons les sujets. Pour ce qui est de la diversité/visibilité, c'est la grande affaire de Delphine Ernotte. On comprend bien les enjeux, dit Le Monde. J’ai du mal. C'est un ordre du CSA. Une autorité administrative intervient sur le contenu de l’information. Pour ce qui est de la visibilité: ils comptent les personnes "perçues comme non blanches". 25 % dans la société, 15 % sur nos écrans. Chacun devient un étendard: des noirs, handicapés, pauvres. Et quid des minorités non-visibles comme les Berrichons ?
Pour ce qui est de la diversité: le mot dicte la chose. Il faut montrer une image positive, raconter le grand rêve multiculturel. Le meilleur des mondes. En revanche, oui, l’Outre-mer devrait être traitée comme le reste de la France.
L’Europe aussi non ?
Ah l’Europe, c’est la France ? On ne m’a rien dit. Cela dit, sur l’Europe, Le Monde a levé un lièvre. Constat: les sujets sur l'UE sont des catastrophes d’audience. Pas seulement parce que l’UE ennuie les gens, parce qu’ils ne l’aiment pas. Résultat: 2,7 % du temps des JT selon la fondation Jean Jaurès.
Macron veut que ça change. Montrer une Europe qui avance pour la présidence française de 2022. Clément Beaune cherche donc "tous les moyens possibles de contrainte ou de pression pour obliger les chaînes publiques à parler davantage d’Europe" a-t-elle expliqué lors de son audition à l'Assemblée Nationale en septembre. Les amendements à la loi audiovisuel en ce sens votés, avant l’interruption de l’examen.
On l’a compris, le souhait du monarque exaucé par les députés n’est pas seulement qu’on parle d’Europe, mais qu’on en parle bien en diffusant le catéchisme bruxellois. Conclusion, pour nos gouvernants, la mission de France Télévisions n’est pas d’éclairer le public en parlant du monde tel qu’il est, mais d’édifier les masses en montrant le monde tel qu’eux-mêmes voudraient qu’il soit. Et France Télé s’exécute. Ce n’est pas de l’information mais de la propagande. Payée par vous et moi.