Avant sa sortie, le film "Novembre", consacré aux attentats du 13 novembre suscite la polémique…et un procès ! La réaction d'Élisabeth Lévy.
L'histoire racontée par Sifaoui dans le JDD. Le film, réalisé par Cédric Jimenez avec Dujardin et Kiberlain, sort le 5 Octobre. Le litige porte sur le personnage de Sonia, pseudonyme de la femme qui avait appris aux FDO qu’Abdelhamid Abaoud, le chef du commando, se cachait à Saint Denis. Il a été tué avec son complice dans l’assaut le 18 novembre. Elle vit désormais sous une fausse identité.
Dans le film, son personnage, rebaptisé Samia, appelle le numéro vert: «Je sais où se cachent les deux terroristes». Et Samia porte le hidjab. Pourtant, ce n'est pas du goût de Sonia. Pour elle, le voile est le symbole d’une infériorisation de la femme que les islamistes veulent imposer comme norme. Pour son avocate Samia Maktouf, le film la présente comme «porteuse de convictions religieuses et a fortiori d’une idéologie djihadiste comparables à celles des terroristes». Elle a saisi le tribunal en référé pour demander, non pas l’interdiction mais l’insertion au générique d’une mention précisant que les convictions personnelles de Samia ne reflètent pas celle de Sonia.
Qu’en pensez-vous ?
Sur le plan juridique, je ne sais pas si la liberté de création peut être limitée par la vérité historique. Mais si une œuvre de fiction prétend refléter cette vérité, le spectateur doit être informé des libertés prises par le cinéaste. D’où la mention: toute ressemblance avec des faits ou des personnages réels est fortuite.
S’agissant de ce film, on a au moins le droit de critiquer vertement le choix du réalisateur. Mettre un voile à Sonia n’est pas innocent, c'est une fa façon de proclamer qu’il n’y a aucun rapport entre l’islam et l’islamisme , ce que j'appelle le "rienàvoirisme". La preuve: c'est cette femme voilée, héroïne qui prend des risques pour sauver des vies.
Bien sûr, on ne saurait tracer un signe d’égalité entre islam et terrorisme, ni d’ailleurs entre islam et islamisme. Sauf que la frontière n’est pas aussi nette et claire qu’on nous le dit. Comme Sonia-Samia, je pense que la généralisation du voile révèle (malheureusement) l’islamisation d’une partie de l’islam.
En réalité, le cinéaste nous joue l’air du pas d’amalgame. Les victimes du 13 novembre ne méritent pas d’être instrumentalisées au service de cette propagande.