Michel Sardou a annoncé qu'il quittera la France si Jean-Luc Mélenchon devient premier ministre.
Dans ce grand entretien à Paris Match, il dit aussi que si ça se produit, il fera un grand duché en Normandie. Bref, c’est une boutade. D’ailleurs Jean-Luc Mélenchon, pour une fois, n’a pas éructé mais fait un tweet affectueux : « Je veux vous convaincre de rester en France quand nous aurons gagné. Beaucoup de Français vous aiment et le pays a besoin de votre affection aussi. »
En revanche, ce qui est vrai, c’est qu’il ne croit plus à la politique. Je le cite : "Mitterrand avait le charisme, Rocard a donné de l’espoir, Chirac était sympathique. Mais Mélenchon promet n’importe quoi et Macron ce qu’il dit, il ne le fait pas. Son en même temps me fait chier. Bref, s’il y a une chanson à faire avec la politique c’est « je n’y crois plus »". Il ajoute : "Ce siècle, pardon, est à chier : avec les réseaux sociaux, metoo, l’écriture inclusive…Ce pays est bouffé par les normes et la bureaucratie. C’est comme si tous ces règlements avaient été inventés pour aller à l’encontre du bonheur des gens"
N’est-ce pas la complainte d’un privilégié ?
Le privilège, c’est de pouvoir le dire. Des millions de gens pensent comme Michel Sardou : que la politique était mieux avant. Mais s’ils le disent, ils sont traités de réacs, de ploucs. S’ils n’aiment pas leur époque, ce sont des vieux cons. Mais la réalité, c'est que beaucoup de Français sont désespérés par l’état de leur pays. Les événements du Stade de France sont emblématiques de ce délitement dont parlait la tribune des généraux. Ce désespoir est aggravé par le sentiment d’impuissance. On ne croit plus à la politique. Et on regarde avec envie les Britanniques qui à travers la Reine célèbrent ce qui les rassemble.
Michel Sardou ne devrait pas dire, même pour blaguer qu’il partira. Car des millions de Français qui partagent son désenchantement ne peuvent pas caresser cette échappatoire. Mais il peut au moins être leur porte-parole. Et puis, comme le disait Gramsci, il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté. Autrement dit, quand une partie des élites pratique le déni de réel, la lucidité est déjà une forme de résistance.
Alors merci, monsieur Sardou.