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En Seine-Saint-Denis, le nouvel évêque se veut un "avocat des quartiers"

Passé par Trappes et la Thaïlande, Étienne Guillet, le nouvel évêque de Saint-Denis, se veut "avocat des quartiers" plus que "cadre sup' de l'Église" à la tête de ce diocèse catholique pauvre, à forte concurrence religieuse.

Ian LANGSDON - AFP

Passé par Trappes et la Thaïlande, Étienne Guillet, le nouvel évêque de Saint-Denis, se veut "avocat des quartiers" plus que "cadre sup' de l'Église" à la tête de ce diocèse catholique pauvre, à forte concurrence religieuse.

À 48 ans, cet homme affable et charpenté deviendra dimanche l'un des plus jeunes évêques de France avec une ordination dans la basilique Saint-Denis, nécropole des rois de France, devant 3.000 personnes attendues.

Une brusque mise en lumière pour ce diplômé d'école de commerce, qui venait tout juste d'être nommé curé de Mantes-la-Jolie après neuf ans passés à Trappes. Deux paroisses de quartiers populaires d'Île-de-France qui ont nourri une "histoire de cœur avec les lieux où l'Église est minoritaire".

"J'avais peut-être déjà accompagné certaines des questions que je vais retrouver ici, de multiculturalisme, de fragilités des populations, de jeunesse, de minorité de l'Église", suppute-t-il pour expliquer sa nomination par le pape, lui-même grand défenseur des défavorisés et des "périphéries" où les catholiques sont minoritaires.

Dans les locaux de l'église Saint-Paul-de-la-Plaine à Saint-Denis où il reçoit quelques journalistes, Étienne Guillet professe "l'espérance" pour les populations de Seine-Saint-Denis.

Le nouvel évêque de Saint-Denis, Etienne Guillet, pose le 14 février 2025 devant la basilique Saint-Denis, au nord de Paris

Le nouvel évêque de Saint-Denis, Etienne Guillet, pose le 14 février 2025 devant la basilique Saint-Denis, au nord de Paris

Ian LANGSDON - AFP

"En français dans le texte, ça veut dire quoi ? Croire en les populations, que personne n'est bloqué. Témoigner que ces gens ont du talent. Que tout n'est pas un drame", énumère-t-il.

Ce fervent partisan du dialogue interreligieux insiste qu'un prêtre a "charge d'âmes, pas juste celles des baptisés, mais de tous les habitants": "le soin des populations musulmanes, le soin des personnes qui rejoignent le département, c'est une préoccupation de l'Église".

Malgré ses 86 paroisses et sa centaine de prêtres en activité, le diocèse de Saint-Denis ne revendique que 22.000 pratiquants sur une population de 1,7 million d'habitants, au sein de laquelle la concurrence religieuse est forte entre l'islam et les évangéliques.

"L'Église en Seine-Saint-Denis est un des visages nouveaux de l'Église aujourd'hui, avec des fidèles afro-antillais emplis de ferveur et d'une énergie nouvelle", explique l'évêque de Nanterre Matthieu Rougé, qui salue en Étienne Guillet "un homme remarquable, de grande qualité humaine" et alliant "simplicité, zèle missionnaire et intelligence humaine".

- Aumônier de forains -

"Il saura faire vivre l'Église dans ce contexte très multiculturel", ajoute-t-il, tandis qu'un bon connaisseur des cercles catholiques salue "un homme solide" et qui "va aux frontières".

Le nouvel évêque de Saint-Denis, Etienne Guillet, pose le 14 février 2025 devant la basilique Saint-Denis, au nord de Paris

Le nouvel évêque de Saint-Denis, Etienne Guillet, pose le 14 février 2025 devant la basilique Saint-Denis, au nord de Paris

Ian LANGSDON - AFP

Parmi ses sources d'inspiration, Étienne Guillet cite l'archevêque salvadorien Oscar Arnulfo Romero, défenseur des pauvres assassiné en pleine messe en 1980, mais aussi l'écrivain libano-français Amin Maalouf, "qui parle de la difficulté de concilier nos identités plurielles".

Cet amateur de Paul Claudel et de littérature du monde arabe, grand fan de marche en pleine nature, avoue aussi un goût pour le cirque - il a lui-même été aumônier des forains et gens du cirque depuis 2015.

Né en 1976 et élevé dans un village des Yvelines, passé par le scoutisme et l'Edhec, une grande école de commerce, Étienne Guillet part après ses études en coopération avec les Missions étrangères de Paris en Thaïlande, où il accompagne des prisonniers - une mission qu'il a poursuivie en tant qu'aumônier à la prison pour mineurs de Porcheville en 2008.

Ordonné prêtre en 2006, à l'âge de 29 ans, il devient en 2015 curé de Trappes, ville populaire des Yvelines qui venait de connaître une "hémorragie de jeunes" partis faire le jihad en Syrie. Sur les 90 départs, 60 y mourront.

"Les déplacements gouvernementaux à Trappes étaient toujours pour annoncer les mauvaises nouvelles. Et c'était dur ça, parce que les populations n'ont pas demandé à avoir une étiquette, elles veulent juste finir le mois, être comme les autres et réussir", se souvient-il.

Témoin d'une "percée de fierté chrétienne parmi les jeunes", il plaide aussi pour "les accompagner, pour qu'on ne soit pas dans une démarche identitaire de plus".

Et sur des territoires où l'islam est la religion phare, il défend une logique "joyeuse et fraternelle". Mais "il nous faut absolument pouvoir tenir la voix dans le dialogue avec les musulmans", et "être aussi un peu courageux parce qu'à certains moments, il faut dire, voilà, je vais aussi te dire ce que je porte", ajoute-t-il.

Par Alexandre MARCHAND, Claire GALLEN / Saint-Denis (AFP) / © 2025 AFP

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