Le dispositif téléphone grave danger, expérimenté en 2009 en Seine-Saint-Denis et élargi à toute la France cinq ans plus tard, "sauve des vies", indique une étude publiée mardi sur les féminicides, menée par l'Observatoire départemental des violences faites aux femmes.
"Un outil de protection comme le téléphone grave danger sauve des vies", a assuré Ernestine Ronai, responsable de l'Observatoire lors de l'ouverture à Bobigny de la 20e édition des Rencontres Femmes du monde en Seine-Saint-Denis.
Attribué sur décision du procureur et bénéficiant d'une géolocalisation, le téléphone permet à la femme, en appuyant sur une simple touche, d'être mise en relation avec un professionnel de la lutte contre ces violences.
Alors qu'elles n'étaient que 727 à en bénéficier en 2019, 4.972 femmes se sont vu attribuer un tel appareil en 2024 en France.
Vendredi matin à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), une femme a déclenché son téléphone alors que son ex-compagnon venait de la bloquer avec sa voiture, a-t-on appris de source policière.
Fuyant à pied à la vue des policiers, l'homme a été interpellé et placé en garde à vue.
Dans un département aussi urbanisé que la Seine-Saint-Denis, le délai moyen d'intervention des forces de l'ordre après le déclenchement d'un téléphone grave danger est de 5 à 6 minutes, selon le procureur de la République de Bobigny Eric Mathais.
Depuis le déploiement du dispositif dans ce département francilien, une seule bénéficiaire a été tuée par son conjoint: en novembre 2021, Bouchra Bouali n'avait pas son téléphone sur elle car elle n'avait pas été prévenue de la sortie anticipée de prison de son conjoint.
Ce féminicide a donné lieu, deux mois plus tard, à la publication d'un décret obligeant désormais la justice à prévenir une victime de la remise en liberté de son agresseur.
Au sein du deuxième tribunal de France après celui de Paris, les violences intra-familiales sont "un contentieux massif en augmentation constante (...) qui mobilisent 25% de l'activité" de la juridiction, a signalé Eric Mathais lors du colloque.
Peimane Ghaleh-Marzban, président du tribunal, a ajouté que "ce n'est pas en regardant quelqu'un dans les yeux que vous allez savoir s'il va commettre un assassinat: ce n'est que par une augmentation générale de la protection et par une sévérité accrue qu'on peut y arriver".
En 2023, 96 femmes ont été victimes de féminicide conjugal en France, un chiffre en baisse de 19% par rapport à 2022, selon le dernier bilan du ministère de l'Intérieur publié lundi, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes.
AFP / Bobigny (France) (AFP) / © 2024 AFP