Guillaume Peltier : "Il nous semble très imprudent d'annoncer la réouverture des écoles, des collèges et des lycées le 11 mai"
L'intervention du chef de l'État lundi 13 avril a duré 27 minutes. "C'était encore à l'évidence trop long et trop imprécis estime Guillaume Peltier, mais il y a eu quelques lueurs admet-il : le 11 mai, un mea culpa sur les failles d'un système bureaucratique et financier qu'Emmanuel Macron avait pourtant tant promu. La lueur d'un homme d'État plutôt qu'un homme de communication ou de théâtre, et une lueur d'empathie, en particulier pour tous ceux qui ne peuvent pas accompagner ceux qui meurent. Mais les mots ne suffiront pas, les mots ne suffiront plus affirme le député. Sur la question des masques, sur les écoles, tant reste à dire. On voit bien les immenses failles de l'État stratège".
Concernant l'échéance du 11 mai, selon Guillaume Peltier, "avoir une perspective était indispensable, une forme de méthode. Mais on peut encore douter de la faisabilité des conditions strictes de la sortie du confinement : la capacité de la France à produire des masques en nombre, la question centrale des tests que nous sommes incapables de produire de manière souveraine et indépendante et surtout, la réouverture des écoles sans sécurité sanitaire ! Il nous semble très imprudent d'annoncer la réouverture des écoles, des collèges et des lycées le 11 mai dénonce le député. Je suis très dubitatif et sceptique sur l'imprécision de cette date. Emmanuel Macron a dit qu'à compter du 11 mai, elles pourront rouvrir de manière progressive, mais il a oublié d'évoquer la nécessité de consulter de manière très méticuleuse le parlement, les personnels de l'Éducation Nationale, les représentants syndicaux et des parents d'élèves pour être certain, et on en est loin, que l'ensemble des dispositifs nécessaires à une reprise des écoles soit possible regrette-t-il. Rien que la question des masques et des gestes barrière pour nos enfants, surtout en bas âge, tout cela n'est pas levé".
En Allemagne, ils annoncent une reprise partielle des activités dans quelques jours et peut-être aussi la réouverture des écoles soulève Patrick Roger. "Des différences considérables se sont creusées entre la France et nos voisins européens, en particulier l'Allemagne et l'Autriche soutient Guillaume Peltier. En Allemagne, c'est deux à trois fois plus de lits de réanimation, une capacité à produire des masques et des tests qui n'ont rien à voir avec la France. La France est incontestablement en retard estime-t-il. La date du 11 mai pour la reprise du travail est une bonne chose, pour le retour à l'école c'est imprudent" insiste-t-il.
"On demande la reconnaissance de l'état de catastrophe sanitaire"
Guillaume Peltier demande des clarifications sur les masques et sur les tests de dépistage. Pour lui, "il y a plutôt une politique de l'autruche. Comme la France est incapable de produire des tests en nombre, le président de la République a annoncé qu'on ne testerait pas toute la population. Il y a bien sûr un enjeu sanitaire, mais plus inquiétant, c'est le flou artistique sur les grandes questions économiques et sociales ! considère le député. Je pense à tous nos travailleurs, à tous nos entrepreneurs. Rien ou si peu n'a été dit pour nos artisans, nos indépendants, nos patrons de TPE-PME sur la question de l'état de catastrophe sanitaire, qui n'est toujours pas reconnu en France et qui empêche d'obliger les assureurs à prendre leur responsabilité".
Guillaume Peltier reconnaît que "le président de la République a enfin évoqué la question lourde de l'absence d'implication des assureurs dans la gestion de la crise économique", mais il explique que les Républicains ont déposé une proposition de loi qui demande la reconnaissance de l'état de catastrophe sanitaire, "qui est le seul moyen aujourd'hui d'actionner de manière obligatoire les assurances pour lutter contre les pertes d'exploitation et sauver la trésorerie des entreprises. De la même manière, j'ai déposé une proposition de loi pour supprimer pendant 3 mois les charges sociales et fiscales qui pèsent sur les toutes petites entreprises qui sont en grande difficulté et qui, n'ayant pas de chiffre d'affaires, pourraient ne pas rouvrir. Il y a pour l'instant un report de ces charges sociales précise Patrick Roger. "Oui l'État ne peut pas tout, reconnaît le député, mais il doit prendre en considération le tissu remarquable des toutes petites entreprises, artisans et commerçants qui sont en grande difficulté : il faut la suppression pure et simple des charges fiscales et sociales !"
"La France ne se redressera que par le travail et une meilleure récompense du travail"
Plus largement, Guillaume Peltier a trouvé Emmanuel Macron "très en retrait et faible sur les enjeux économiques et la France d'après. Rien sur la valeur travail et la nécessité de mieux répartir les richesses, entre le capital et le travail. Il faudra poser la question de la récompense des héros du quotidien, du peuple travailleur qui tient la France debout aujourd'hui". Selon lui, "à égalité, les Français sont angoissés de la crise sanitaire, mais aussi des enjeux économiques et sociaux. Ne sous-estimons pas la violence économique et sociale de la crise que nous connaissons. Il faut dire aux Français la vérité : la France ne se redressera que par le travail et une meilleure récompense du travail".
Guillaume Peltier a émis l'idée de supprimer jusqu'à 5 jours de RTT pour financer l'agriculture et la santé notamment. "La première des priorités, c'est de récompenser mieux et davantage le travail et augmenter les revenus, par une baisse des charges et des cotisations insiste-t-il. Il faudra également contraindre les puissants, en particulier les banques, les assurances, les sociétés d'autoroutes, à participer à l'effort national : je proposerai un plan de lutte contre la fraude sociale et fiscale".
Emmanuel Macron a annoncé une aide exceptionnelle pour les familles les plus modestes et les étudiants. "La fraternité avec les plus modestes est toujours une bonne idée affirme Guillaume Peltier. Mais attention au double échec de la France que nous subissons depuis une quarantaine d'années : la rente des plus puissants et l'assistanat d'une minorité. Or la France ne se redressera que par une seule valeur : le travail, et donc sa récompense, et donc l'idéal de justice. Plutôt que d'augmenter les minima sociaux, il faut augmenter les salaires".
"Ne partez pas à l'étranger cet été : profitons de l'été qui vient pour redynamiser l'économie française"
Les frontières de l'Union européenne vont rester fermées. "Emmanuel Macron est encore sur la politique du 'en même temps' estime Guillaume Peltier. On nous a ri au nez quand nous avions proposé le contrôle des frontières mi-février ! rappelle-t-il. Chacun comprend et conçoit aujourd'hui la nécessité de mieux contrôler nos frontières. Et il faudra aussi un contrôle des frontières nationales ajoute-t-il, pour limiter la propagation du virus".