Et l’on reparle du loup en France. Éternel sujet de débat et d’affrontements entre éleveurs de troupeaux et défenseurs de cette espèce, le prédateur doit prochainement faire l’objet d’un plan spécial présenté par Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire. Mais alors qu’une réunion de concertation était prévue ce mardi, elle a été repoussée à vendredi. Député européen et figure de la Confédération Paysanne, José Bové était l’invité du Grand Matin Sud Radio pour en parler.
"Je pense qu’aujourd’hui l’État est embarrassé car personne ne veut véritablement prendre la mesure du problème. On se retrouve aujourd’hui avec un ministre qui doit arbitrer et qui, au lieu de le faire à partir d’éléments scientifiques à disposition et des analysées menées par des organismes très variés, s’enferme dans une bataille qui consiste à savoir combien de loups y a-t-il en France, quelle est la réalité des attaques, l’expansion du loup, etc. Il faut donc reprendre le dossier à zéro", préconise-t-il.
"Il faudrait des clôtures de 2m50 à 3m de haut..."
Le célèbre syndicaliste agricole plaide notamment pour une meilleure estimation de la population lupine en France. "Dans le sud-Aveyron, là où j’habite, on nous a annoncé au départ un, puis deux loups. Avec les prélèvements d’ADN que nous avons fait nous-même avec des médecins, on arrive à recenser 11 individus différents. Si on extrapole ces chiffres à l’ensemble du territoire, on se rend compte qu’on n’est pas du tout dans les chiffres annoncés de quelques centaines…", assure-t-il avant d’aborder la question de la protection des troupeaux contre le loup. "Les mesures de protection ne fonctionnent pas. Si on veut avoir des brebis dans les pâturages en extérieur, il faudrait des clôtures de 2m50 à 3m de haut, il faudrait avoir des gros chiens blancs des Pyrénées, un chien pour 30 brebis… Vous imaginez ce que ça veut dire. Les coûts sont gigantesques, on parle de plusieurs dizaines de milliers d’euros par exploitation. Surtout, ça empêche tous les autres usages de la nature. Demain, vous n’irez plus ramasser de champignons et aller sur les grands chemins de randonnée si ces chemins traversent des pâturages car les attaques de chien deviennent de plus en plus importantes, à tel point que dans certains secteurs, les gendarmes ne reçoivent même plus les plaintes ou les classent sans suite", déplore-t-il.
José Bové en appelle enfin à des mesures plus radicales pour "stopper cette hémorragie dans les élevages de plein air". "Il faut prendre conscience de la réalité : il y a plus d’individus que prévu. Ensuite, il y a 40% de loups hybrides (croisement avec des chiens) dans les pays limitrophes que sont l’Italie et l’Espagne. Sur notre territoire, on arrive au même chiffre. Or aujourd’hui, les hybrides ne sont pas protégés par la convention de Berne. Il faudrait donc pouvoir les éliminer systématiquement par des personnes assermentées. On ne peut pas supporter que les troupeaux deviennent les garde-manger des loups. C’est effectivement plus facile pour eux d’attaquer des brebis que d’aller courir dans la nature derrière un chevreuil, un cerf ou un sanglier…", plaide-t-il.
Réécoutez en podcast l’interview de José Bové dans le Grand Matin Sud Radio