Reportage de Lionel Maillet
La grogne monte dans le monde agricole. Et une fois de plus c’est la grande distribution qui cristallise toutes les tensions. Les hypermarchés, accusés de casser les prix et d’acheter toujours moins chers aux producteurs, subissent déjà de plein fouet la fermeture des restaurants.
Le bras de fer avec la grande distribution ne date pas d’hier mais, en ce moment, le climat est particulièrement tendu. Les prix d’achat ont rarement été si bas, pas de quoi vivre pour les agriculteurs, alors que malgré la crise du Covid la grande distribution se porte encore mieux.
"Une salade se vend 15 à 20 centimes alors qu'elle coûte 30 centimes à produire"
En ce moment il faut trouver le courage de se lever le matin pour travailler à perte et pourtant c’est devenu le quotidien de Patrick Leveque. Ce producteur de salades basé dans le nord des Bouches du Rhône vend ses salades bien en dessous de leur cout de production. "Une salade, à produire aujourd'hui, elle coûte au minimum 30 centimes mais se vend (en supermarché) entre 15 et 20 centimes".
"La grand distribution qui est en train d'encaisser"
La faute à la grande distribution qui depuis 2 mois se livre à une guerre des prix encore plus acharnée explique celui qui est aussi le président de la FDSEA dans la région PACA. "Il faut que ce soit toujours moins cher avec sans cesse des promotions alors qu'il existe une loi qui explique que les producteurs doivent être rémunérés à leur juste valeur. Cette loi n'est pas respectée et, bien entendu, c'est la grand distribution qui est en train d'encaisser. Ça devient insupportable".
"Du travail pour rien"
Déjà mises à mal par la fermeture des restaurants, de plus en plus d’exploitations agricoles sont dans le rouge. Plutôt que de vendre à perte, ce couple de maraichers de Salon-de-Provence préfère jeter toute sa production de salades. "Je ne vais pas rentrer, couper 50 kilomètres pour aller livrer le négociant revenir avec le camion - ça fait 100 kilomètres - payer le gazoil... non, on préfère nettoyer et arrêter le personnel. C'est du travail pour rien. C'est comme si un bureaucrate, à la fin de la journée, on le regarde droit dans les yeux et on déchire ce qu'il a fait dans sa journée".
Les agriculteurs sont d’autant plus amers que le chiffre d’affaires de la grande distribution a augmenté de 1,8 % en 2020.
Lionel Maillet (avec Maxime Trouleau)