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Donc, selon Jean-François Delfraissy, tout le monde ne sera pas déconfiné en même temps ?
Si vous avez besoin d’une douche froide je vous recommande l’audition devant la commission des lois du Sénat de ce professeur de médecine qui préside le Conseil scientifique “COVID 19”.
D’abord, le déconfinement, ce ne sera peut-être pas pour le 11 mai. Si les conditions opérationnelles ne sont pas réunies, il faudra donc décaler les tests et le traçage numérique des nouveaux cas.
Ensuite, ce ne sera pas pour tout le monde. Écoutez plutôt :
“Nous avons, à la sortie du confinement, 18 millions de personnes qui, sont à risque d’être contaminées et de continuer à développer une forme grave. Donc, pour ces 18 millions de personnes, ce n’est pas un scoop, il faudra continuer le confinement.”
Ces 18 millions de personnes, ce sont les plus de 65 ou de 70 ans, les personnes souffrant d’une pathologie chronique et les jeunes présentant des facteurs de risque comme l’obésité. Et Macron a aussi parlé des personnes souffrant d’un handicap sévère.
Qu’est-ce qui vous choque, dans ces propos ?
D’abord, pour Jean-François Delfraissy, “vieux” est synonyme de “malade” qui lui-même veut dire “fragile”. Et ça commence à 65 ans. Ensuite, il s’exprime comme s’il gouvernait la France. Je ne me rappelle pas l’avoir élu. Son rôle c’est de conseiller, pas de décider. Cette confusion est entretenue par les médias qui titrent tous derrière l’AFP : 18 millions de Français devront rester confinés après le 11 mai.
Confier le pouvoir aux blouses blanches, c’est décider que la santé est le seul impératif qui vaille. Et c’est dangereux pour la démocratie.
Dangereux, mais en quoi ?
Parce qu’il ne s’agit plus d’isoler les personnes effectivement contagieuses, mais les personnes à risque sur la base d’un raisonnement statistique. Demander aux vieux, aux obèses, aux malades et aux handicapés de rester chez eux, cela revient à dire haut et fort que seuls les jeunes et les bien-portants sont considérés comme utiles à la collectivité. Les autres, on veut bien les soigner mais qu’ils évitent tout de même de tomber malades.
Le pire, c’est que nous nous servons d’eux comme miroir de notre humanité : regardez comme nous sommes bons avec les faibles ! Regardez comme nous protégeons nos anciens ! Drôle de protection qui s’exerce par la relégation.
Mais que suggérez-vous, qu’on les laisse mourir comme lors de la canicule de 2003 ?
Tout d’abord, cessons de considérer l’âge comme une maladie. Ensuite, arrêtons de prendre les vieux pour des cons. Ils sont peut-être même capables d’apprendre les mesures-barrières. Mais je ne crois pas qu’ils accepteront d’être traités comme des citoyens à part, au seul motif qu’ils sont à risque.