Benjamin Stora a remis au président son rapport sur la réconciliation des mémoires.
On craignait le pire. Au départ, on pense à une idée fausse: on ne parle pas de ce passé. Si. Peut-être trop. Macron, en novembre 2016 disait après de la colonisation : "c’est un crime contre l’humanité, une vraie barbarie. Et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face, en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes". Le monde entier, pas seulement l’Occident a été colonisateur. La première colonisation de l’Algérie a été par les Arabes. C'est un jugement moral rétrospectif: le meilleur moyen de ne rien comprendre. Selon Boualem Sansal, c'est une découverte d’importants gisements gaziers: Pas le moment de froisser les Algériens.
Vous êtes rassurée ?
Ce n'est ni une repentance, ni des excuses. C'est un cinglant démenti aux propos présidentiels. Stora déplore que "l’enjeu ne soit pas de comprendre mais d’avoir eu raison dans le passé". Il sait que chacun avait ses raisons. Chacun a commis des crimes. Cette Commission Mémoires et Vérité. Plus une flopée de gestes symboliques. Un peu trop même comme la Panthéonisation de Gisèle Halimi. Les commémorations, dont celle à haut risque du 19 mars 2022 pour les 60 ans des accords d’Evian est le meilleur instrument de la mémoire, c’est la vérité historique, de la Recherche, de l'ouverture des archives.
Donc, vous applaudissez ?
Sauf que pour se réconcilier il faut être deux. Macron a certainement convaincu le président Tebboune. Mais soigné en Allemagne, lâché dit-on par ses protecteurs militaires. Or, c'est une constante en Algérie: c’est toujours l’armée qui contrôle le jeu politique. Autre constante: l’instrumentalisation frénétique de la colonisation, explication de toutes les faillites algériennes, et pas du tout la corruption. La dénonciation du Parti de la France est le seul référent du nationalisme algérien.
Finalement, tout ça ne sert à rien ?
Réconciliation franco-française ? Cette guerre a touché 7 millions de personnes dont 1,7 millions de Français d’origine algérienne. Beaucoup ont été élevés dans le ressentiment. C'est le risque que les réflexes victimaires reprennent le dessus en cours de route, qu’on n’ose pas leur dire qu’il y a aussi un héritage positif de la colonisation.
Si on joue le jeu de la vérité, c'est l'occasion de prouver à Macron et à ces jeunes français que la culture française existe, qu’on peut aimer son pays sans réécrire son histoire. Bref, que nous croyons à la primauté de la raison même si ce qui se passe dans nos universités permet souvent d’en douter.