On sait désormais que tous les commerces pourront rouvrir le 11 mai, à l’exception des cafés et des restaurants.
On ne sait rien du tout. Déconfinement régionalisé, territorialisé, municipalisé, rentrée à la carte, Macron dit blanc, Philippe noir, Castaner gris, Lemaire bleu et Véran voit rouge. Qui plus est, ils nous précisent que si on ne continue pas à se confiner, il n’y aura pas de déconfinement du tout. On ne sait plus à quel médecin se vouer, ni à quelle autorité.
Ajoutez que les préfets et les maires pourront adapter les principes aux réalités locales (et à leurs lubies personnelles ) et vous avez une idée de ce que sera le déconfinement : une gigantesque usine à gaz réglementaire où notre belle et grande administration pourra déployer son talent inégalé pour compliquer les choses. "Il faut qu'aux alentours du 5 mai, tout soit très clair", a affirmé le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc. C’est mal parti.
Cependant, pour les commerces, ça semble acté.
À l’exception des cafés-restaurants, dont Emmanuel Macron reçoit les représentants ce matin, tous pourront ouvrir le 11 mai. Pour peu que les conditions de sécurité sanitaire soient « totales pour les salariés, les entrepreneurs et les commerçants. » La machine ministérielle devrait accoucher d’un protocole national de déconfinement, puis de guides de bonnes pratiques, métiers par métiers.
L’exécutif commence sans doute à craindre que nous, la France, mourrions guéris, alors que le seuil des dix millions de salariés au chômage partiel est franchi et que l’urgence économique commence à prendre le dessus sur l’impératif sanitaire. Beaucoup ne retrouveront pas leur emploi, il faut bien que les autres se remettent au travail. Et quels que soient nos efforts communs, la sécurité ne sera pas totale.
Reste que les cafés et les restaurants sont un casse-tête sanitaire ?
Pas sûr qu’un café soit plus dangereux que les galeries Lafayette, le métro ou la cantine. Certes - sauf quand la musique l’interdit -, c’est un endroit où on parle et on rit, des activités éminemment contagieuses. Le bistrot n’est pas seulement un centre de profit, mais un théâtre de la vie, intime et social, le refuge de la pause déjeuner, peut-être le dernier lieu de rencontres improbables. C’est aussi un art français. Nous n’avons pas les usines allemandes, ni les tests coréens ni les masques marocains, mais des cafés et restaurants que le monde nous envie. Pour Bruno Le Maire, "rien ne serait pire pour cette profession que de rouvrir dans la précipitation ». Mais pour beaucoup, il pourrait y avoir pire : ne pas rouvrir du tout.