Le premier train à grande vitesse de jour reliant Paris à Berlin a pris le départ lundi à 09h55, avec pour ambition de répondre à la demande croissante de train des Européens, de plus en plus nombreux à y recourir pour leurs déplacements internationaux.
Violoncelle sur le dos, Lea Bader n'a pas hésité au moment de choisir entre l'avion et le train. "Pour moi, c'est évident parce que j'ai un violoncelle et j'aurais eu besoin de deux billets en avion", explique-t-elle.
Avec ses deux jeunes enfants, elle a opté pour un mode de voyage plus lent, mais plus confortable à ses yeux, "et maintenant, c'est direct. Avant il fallait changer et c'était horrible parce qu'à chaque fois il y avait un problème, un retard", se remémore-t-elle.
En Allemagne, plus d'un tiers des trains à grande vitesse sont arrivés en retard en 2023 et les fermetures de larges tronçons de lignes pour des travaux de maintenance ou de réparation sont devenues la norme pour les voyageurs.
Kevin Kern, Berlinois de 33 ans, a payé son billet une centaine d'euros. "Pour l'environnement, c'est mieux de prendre le train", justifie-t-il. Un voyage en train entre les deux capitales émet 100 fois moins de CO2 qu'un voyage en avion, selon la SNCF.
- Nouveau pont -
Cette liaison "crée un nouveau pont entre les deux grands centres culturels et politiques de notre continent", a salué Anja Schöllmann, directrice de la production de la Deutsche Bahn.
"Huit heures de train, ça peut être long, on a un peu hésité" avant de se lancer, a confié le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou, finalement convaincu que "les gens peuvent rester (assis) huit heures, dès lors que c'est confortable et qu'on a un bon équipage".
Les deux plus grosses compagnies européennes ont donc décidé d'approfondir leur coopération, qui a déjà permis de transporter 30 millions de voyageurs entre les deux pays. "Le trafic international européen représente presque un tiers du trafic TGV" de la SNCF, insiste Jean-Pierre Farandou.
Les trains, des ICE de la Deutsche Bahn en raison du manque de rames disponibles à la SNCF, partiront une fois par jour dans chaque sens, à 09H55 de Paris et à 11H54 de Berlin. Ils rouleront à 320 km/h en France, mais seulement à 250 km/h en Allemagne, où la très grande vitesse n'existe pas.
Trouver des sillons pour circuler sur le réseau allemand, extrêmement dense, n'a pas été chose facile, selon Alain Krakovitch, directeur de TGV-Intercités. Il espère pouvoir revoir les horaires pour un départ plus tôt de Berlin l'an prochain, et gagner ainsi quelques minutes sur le temps de voyage.
Car cette liaison directe ne fait gagner que 20 à 30 minutes par rapport aux trajets avec correspondance existants.
- Concurrence de l'aérien -
Le prix peut aussi constituer un frein, alors que les compagnies low cost sont très compétitives sur cette liaison. Pour un aller-retour sur une semaine en mars, le voyage en train coûte 198 euros, contre 92 euros en avion avec la compagnie easyJet.
"Les réservations marchent très bien. (...). On a déjà des taux d'occupation supérieurs à 80%", soutient, confiant, Jean-Pierre Farandou. "Je suis convaincu que ce train aura beaucoup de succès et que des gens préfèrent s'installer confortablement plutôt que d'avoir parfois des acheminements un peu plus compliqués" vers des aéroports souvent loin des centres-villes, a-t-il poursuivi.
Le voyage entre Paris et Berlin, long de 1.100 km, est probablement le maximum que peut offrir le train à grande vitesse tout en restant attractif, concède le patron de la SNCF. Au-delà, il faut donner la priorité au train de nuit, affirme-t-il.
Le train de nuit entre Paris et Berlin, relancé il y a tout juste un an après près de dix ans d'interruption, a justement connu de nombreux ratés depuis. Le service a même été interrompu entre août et octobre en raison de travaux sur le réseau allemand.
Mais pour ce TGV, M. Farandou se dit "parfaitement confiant" quant à la régularité du service.
AFP / Paris (AFP) / © 2024 AFP