Sa gifle avait donné de l'élan à sa campagne présidentielle en 2002. Mais deux décennies plus tard, si François Bayrou est devenu Premier ministre, l'enfant qui avait tenté de "lui faire les poches" est en prison.
La scène se passe le 9 avril 2002 dans le quartier populaire de la Meinau, dans le sud de Strasbourg, à moins de deux semaines du premier tour de la présidentielle, qui verra la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour.
Lors d'une rencontre tendue avec des habitants, François Bayrou gifle un jeune garçon puis lui lance: "Tu ne me fais pas les poches".
L'incident fera décoller la campagne du candidat UDF, qui ne dépassera toutefois pas les 7% des voix au premier tour du 21 avril.
Quant au garçon âgé de 11 ans à l'époque, Yacine G., il a mal tourné.
Dix ans plus tard, il est condamné à quatre mois de prison ferme pour "outrage et violences" lors d'une altercation avec des policiers à la Meinau. Il avait déjà six condamnations à son casier.
Plus grave, en mai 2022, il écope de 10 ans de prison ferme pour trafic de drogue, comme le rapportent alors les Dernières nouvelles d'Alsace (DNA). Il est le plus lourdement condamné d'un groupe de sept hommes et trois femmes à la tête d'un trafic entre les Pays-Bas et l'Alsace.
Yacine G. se fait alors appeler "Sam Sam" mais son surnom de "Bayrou" lui colle à la peau dans son quartier, raconte un de ses anciens avocats, Thomas Beaugrand.
"Ça l'a servi, en lui donnant un côté sympa", témoigne Me Beaugrand pour l'AFP. "Mais ça a aussi attiré la lumière sur lui, y compris de la part des policiers. Pour un délinquant, il vaut mieux ne pas être trop exposé..."
Son ancien avocat voit en lui un homme "malin", qui "aurait pu faire autre chose" que du trafic de drogue.
"Il arrivait à se faire passer pour la cinquième roue du carrosse dans un trafic de drogue, même quand ça n'était pas le cas, et ça marchait. Mais il a poursuivi son parcours de délinquant et n'a plus été cru", déplore-t-il.
L'AFP avait croisé l'intéressé lors d'une rencontre avec des détenus l'an dernier à la maison d'arrêt de Strasbourg. Lors d'une discussion consacrée aux médias, il avait fait preuve d'une grande connaissance des questions d'actualité.
L'homme est également "déterminé", selon Me Beaugrand, qui rapporte qu'il a tenté de s'évader en sautant un mur élevé à la maison d'arrêt de Sarreguemines avant de se détruire la rate. "On l'a retrouvé entre la vie et la mort dans un caniveau."
AFP / Strasbourg (AFP) / © 2024 AFP