Arnaud Mimran, ancien "golden boy" condamné pour escroquerie à la taxe carbone, est menacé par un procès aux assises pour notamment deux meurtres en bande organisée et la complicité d'assassinat de son ancien beau-père, le milliardaire Claude Dray, des crimes commis entre 2010 et 2014.
Le parquet de la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Paris a requis vendredi son renvoi devant la cour d'assises pour quatre faits criminels, a-t-il indiqué à l'AFP.
Joint par l'AFP, l'avocat de M. Mimran n'a pas réagi dans l'immédiat.
Arnaud Mimran, 53 ans, en détention provisoire, est soupçonné d'avoir commandité l'assassinat en octobre 2011 dans son hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) de son ancien beau-père, le milliardaire Claude Dray qui avait fait fortune dans l'immobilier. M. Mimran aurait fourni pour cela à "son ou ses exécutants des informations et des moyens indispensables" à sa réalisation, d'après le parquet.
Arnaud Mimran est aussi mis en cause pour le meurtre en bande organisée de Samy Souied, figure majeure de la fraude à la taxe carbone, assassiné de plusieurs balles, porte Maillot, à Paris, par deux individus à scooter, le 14 septembre 2010, rappelle le ministère public.
Albert Taieb, lui, a été tué par 16 coups de couteau en 2014 par deux individus dans le 17e arrondissement de Paris alors qu'il raccompagnait à son domicile Cyril Mouly, dont il était en quelque sorte l'homme à tout faire.
Cousin de Marco Mouly, condamné dans l'affaire de la fraude à la taxe carbone, Cyril Mouly était visé par la tentative d'assassinat mais a réussi à fuir.
- "Toute-puissance" -
Après des années d'enquête, les procédures distinctes sur ces trois homicides confiées à la Brigade criminelle de Paris ont fini par être regroupées, et Arnaud Mimran a été mis en examen pour ces faits à partir d'avril 2021.
Dans ses réquisitions dont l'AFP a eu connaissance vendredi, le parquet évoque les pistes "nombreuses et variées", parfois "invraisemblables", explorées par l'enquête, pour s'arrêter sur "la seule finalement crédible et étayée: celle faisant d'Arnaud Mimran le commanditaire et principal bénéficiaire des décès de Sami Souied et Claude Dray, comme du projet ayant visé, en vain, à éliminer Cyril Mouly" et ayant abouti à la mort d'Albert Taieb.
Les trois premiers étaient "créanciers" de M. Mimran, des dettes qui avaient fait germer "de franches inimitiés".
Le ministère public relève aussi que ces homicides "minutieusement préparés et exécutés" ont nécessité des "informations que détenait Arnaud Mimran" seul.
Le parquet demande en revanche un non-lieu concernant deux hommes également soupçonnés du meurtre en Samy Souied, Djoudi Khider et B. K., même si le premier pourrait être jugé en correctionnelle pour des infractions relatives aux armes.
"Mon client est innocent comme nous le crions depuis le début de cette procédure", a assuré l'avocate de B. K., Me Ménya Arab-Tigrine.
Il revient désormais aux juges d'instruction d'ordonner ou non un procès aux assises, une décision qui pourrait intervenir rapidement, selon plusieurs sources proches du dossier.
"Les parties civiles attendent justice et vérité. Les charges sont accablantes et le procès révélera au grand jour les nombreux éléments du dossier", a déclaré Me David-Olivier Kaminski, avocat de plusieurs parties civiles et notamment de Cyril Mouly.
Au cœur d'une série récente de Canal+, Arnaud Mimran a accumulé les ennuis judiciaires depuis sa condamnation en 2016 dans l'affaire liée à "l'escroquerie du siècle" sur le marché des quotas d'émissions de CO2 en 2008-2009.
En décembre 2022, il a été condamné en appel à treize ans de réclusion criminelle pour la séquestration d'un financier suisse en vue de son extorsion.
Le parquet relève son "fonctionnement psychologique marqué par la toute-puissance, l'absence de limites ou encore une capacité à imaginer des scenarii complexes".
Il remarque ainsi qu'il est apparu à "proximité immédiate de chacune des trois scènes de crimes étudiées".
Des écoutes ont aussi établi que M. Mimran avait formulé depuis sa cellule des menaces de mort à l'encontre des principaux magistrats qui ont suivi son dossier ou du journaliste de Mediapart Fabrice Arfi, qui a enquêté sur le sujet.
Par Murielle KASPRZAK, Guillaume DAUDIN / Paris (AFP) / © 2025 AFP