Le rapporteur public, magistrat indépendant dont les avis doivent éclairer les juridictions administratives, a recommandé mardi l'annulation de la décision de la préfecture du Nord de résilier en 2023 le contrat entre l'Etat et le lycée musulman lillois Averroès.
Cette préconisation va à l'encontre des deux décisions prises en référé dans ce dossier.
Elle est également contraire à celle prise la semaine passée par le tribunal administratif de Lyon, également en référé, qui a refusé de restaurer le contrat d'un des deux seuls autres lycées musulmans conventionnés, Al Kindi.
Le rapporteur public du tribunal administratif de Lille a relevé des "vices" dans la procédure, et jugé que les "manquements" soulevés par la préfecture n'étaient "pas de nature à justifier" la résiliation du contrat.
Le 7 décembre 2023, le préfet du Nord a mis fin au contrat d'Averroès pour "manquements graves aux principes fondamentaux de la République", le privant de subventions publiques depuis la rentrée 2024.
Le rapporteur a estimé que l'administration avait commis une "erreur d'appréciation" et que les droits de la défense n'avaient pas été respectés en raison "du défaut d'accès à certains documents" cités dans le rapport de la préfecture.
Le rapporteur public a contesté pendant plus d'une heure, point par point, la plupart des griefs de la préfecture à l'encontre de l'établissement, affirmant qu'ils n'étaient pas établis.
Le préfet avait notamment dénoncé la mention, dans la bibliographie d'un cours d'éthique musulmane du lycée, d'un recueil de textes religieux contenant des commentaires prônant la peine de mort en cas d'apostasie ainsi que la ségrégation des sexes.
Or "aucun élément ne permet de dire" que cet ouvrage "aurait été étudié", selon le rapporteur public.
La préfecture évoquait aussi la prépondérance d'ouvrages religieux sur l'islam au détriment des autres religions au Centre de documentation et d'information (CDI) de l'établissement.
Le rapporteur public a toutefois relevé "10 livres traitant de religion autre que l'islam" et "d'autres livres traitant de la laïcité" dans le CDI.
Tout en concédant que certains manquements soulevés étaient bien établis, le rapporteur public a estimé qu'ils n'étaient pas suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de ce lycée avec l'Etat.
"C'est un soulagement pour Averroès", a réagi mardi Me Guez Guez après les conclusions du rapporteur public.
AFP / Lille (AFP) / © 2025 AFP