La vie, c’était mieux avant ? Pas sûr, si l’on écoute aujourd’hui les jeunes Français de moins de 26 ans qui, à en croire un sondage publié dans Le Parisien, se montreraient plutôt confiants dans leur avenir. Invité du Grand Matin Sud Radio ce mardi, le sociologue Michel Maffesoli n’est pas étonné d’un tel résultat. "Ça ne me surprend pas, je considère que ces jeunes générations n'ont plus du tout les mêmes valeurs que celles qui étaient les nôtres (individualisme forcené, recherche d’une société parfaite par le politique, quelque chose de très rationnel…). Ils vivent en tribu, tournés vers l’autre, les copains, avec des valeurs de solidarité et de générosité. Ce n’est plus seulement le rationnel mais aussi les vibrations, l’émotionnel… De fait, il n’y a pas chez eux ce pessimisme quand on pense au lendemain", analyse-t-il.
Un optimisme ambiant que le marasme socio-économique dans lequel la France est plongée depuis dix ans ne vient pas plomber, bien au contraire. "Il y a une sorte de sentiment tragique : ça ne marche pas, il y a la crise économique, et pourtant on fait avec ! Quand Galilée a été condamné sous l’Inquisition, il disait "Et pourtant, la Terre tourne". Ici, c’est un peu du même ordre. Oui, il n’y a pas de travail, et pourtant on va bricoler. Oui, c’est difficile de trouver des appartements, mais on va se mettre en colocation, faire du covoiturage ou du co-working, etc. C’est ce vitalisme que les experts de la société «officielle» (journalistes, politiques, universitaires…) ont du mal à comprendre. Il y a de la vitalité dans l’air, c’est indéniable au vu de ce sondage. (…) Le grand critère était la valeur travail. Je pense que c’est une valeur qui ne marche plus. En revanche, il y a maintenant cette idée de création : faire de sa vie une œuvre d’art, ne plus perdre sa vie à la gagner, etc.", assure Michel Maffesoli.
Selon le sociologue, la crise actuelle a au contraire permis aux jeunes générations de se concentrer sur l’essentiel à leurs yeux. "La crise leur sert pour mieux vivre le présent. En grec – excusez-moi d’être pédant –, la crise signifie le crible : c’est-à-dire qu’on rejette quelque chose et qu’on garde ce qui mérite d’être gardé. En l’occurrence, je dirais qu’on garde le qualitatif de l’existence : vivre ici et maintenant. Il est assez intéressant de voir comment ces jeunes générations qui n’ont pas appris le latin déclinent avec loisir le Carpe Diem !", souligne-t-il.
Retrouvez en podcast toute l’interview de Michel Maffesoli dans le Grand Matin Sud Radio