Alors que la contestation des agriculteurs contre la nouvelle carte des zones défavorisées se poursuit, de nouveaux motifs de mécontentement sont apparus.
À Bordeaux, une centaine d'agriculteurs manifestaient ce mercredi matin devant le conseil régional, puis devant la préfecture, avec une dizaine de tracteurs, contre le Mercosur, traité de libre-échange avec l'Amérique du Sud. Le Mercosur, c'est la ruine de l'élevage de qualité en France, selon Julien Rouget, secrétaire général des Jeunes agriculteurs de Nouvelle-Aquitaine : "Le traité du Mercosur, on sait que ça va être huit à dix fois plus important que le traité du Ceta. Avec 100 000 tonnes d’importation de viande bovine, on va complètement plomber les marchés français et européen, ça va faire chuter les prix de ces filières. On va en plus importer de la viande de mauvaise qualité, avec des produits aux hormones et aux OGM, tout ce qui va à l’encontre du travail effectué depuis des mois avec les États généraux de l’alimentation, où on affirme vouloir une alimentation plus locale, plus saine, plus bio. Aujourd’hui, on brade complètement nos principes français."
Autre source de contestation, la disparition annoncée des aides aux zones pastorales pour les éleveurs. Ce mercredi, plus de 800 jeunes agriculteurs de moins de 35 ans étaient reçus par Emmanuel Macron à l'Élysée, quelques jours avant l'ouverture du Salon de l'agriculture.
Un salon auquel aurait pu participer Lise Roland, mais cette dernière, éleveuse de 300 brebis limousines en Haute-Corrèze, a décidé de boycotter l'événement, après avoir constaté qu'un tiers de ses terres ne bénéficieraient plus de ces aides : "Ces surfaces représentent un tiers de mes revenus agricoles annuels. La conséquence, pour moi, serait d'arrêter l'activité intégralement. J'ai pris le parti de m'installer sur le plateau des 1000 vaches parce que j'avais envie de garder mes brebis sur ces surfaces et je me rends compte aujourd'hui que l'État ne suit pas les engagements qu'il m'avait donné. Moi, si je n'avais pas eu ces surfaces, ça n'aurait pas été rentable et je ne me serais pas installée."
Pour le porte-parole de la confédération paysanne en Corrèze, Denis Campmas, ce sont près de 500 fermes qui pourraient disparaître dans le Limousin. lui-même est éleveur depuis dix ans avec sa femme et va perdre entre 10 et 15 000 euros d'aides : "En nombre de fermes, en nombre d'exploitants, on ne représente pas grand-chose, alors qu'avec le problème des zones défavorisées, ce sont des milliers d'éleveurs qu'ils sont en train de foutre sur le carreau. Alors 50 ou 100 en plus sur le Limousin, ça ne pose pas de problème au ministère. On ne fait pas tourner l'économie mondiale, on est autonomes, on se débrouille sur nos fermes, on nourrit sainement les gens, on vend sur de petites filières, il n'y a pas de gros échanges internationaux. C'est ça la différence par rapport au maïs, au soja, où tout le monde fait du fric. Sur mon exploitation, il n'y a que moi qui vit. On ne fait pas tourner la méga-machine, c'est pour ça qu'on veut nous faire disparaître."
Propos recueillis par Christophe Bernard et Fany Boucaud pour Sud Radio