Le pape François a terminé dimanche une visite "historique" éclair en Corse par un entretien avec Emmanuel Macron après une messe géante, des bains de foule et un plaidoyer pour une laïcité qui ne soit "pas statique et figée".
Depuis cette île méditerranéenne, il a aussi exprimé son "soutien" aux habitants de l'archipel français de Mayotte dans l'océan Indien face à "la tragédie" causée par un cyclone qui pourrait avoir fait des centaines, voire des milliers de morts, selon les autorités. Le président français a promis devant le pape "d'agir" face à cette catastrophe où "certains, ont tout perdu".
Le pape a décollé de l'aéroport d'Ajaccio à 19H15 heures locales après s'être entretenu 40 minutes avec le président Macron qui lui a assuré que sa visite était "un grand honneur pour la ville d'Ajaccio, pour la Corse et pour la France".
Auparavant, au théâtre de verdure du Casone, sous une grande statue de Napoléon, le pape a présidé une messe d'1H30 devant une foule de 7.500 personnes composée de fidèles, évêques, politiques et membres des confréries. La présidente autonomiste de l'Assemblée de Corse, Marie-Antoinette Maupertuis a ouvert la messe en langue corse.
Vêtu d'une cape rose caractéristique du troisième dimanche de l'Avent dans la liturgie catholique, le souverain pontife a remercié le cardinal de Corse François-Xavier Bustillo "pour toute cette journée au cours de laquelle (il s'est) senti à la maison".
Au total, quelque 17.400 personnes ont suivi la messe, selon une source sécuritaire, soit directement au Casone soit sur des écrans géants installés notamment place Miot, une grande esplanade face à la Méditerranée.
- "Emotion" -
"Solennité, sincérité, émotion, tout est mêlé", a confié à l'AFP Fabienne Mazza, l'une des 300 choristes qui ont chanté pour le pape.
"Je trouve ça exceptionnel, je suis émue, c'est un moment magique, une chance unique", avait affirmé le matin Solène Pianacci, directrice d'école de 44 ans, sous les plafonds peints de la cathédrale Notre-Dame de l'Assomption.
Chaudement applaudi, salué par les cris "evviva u papa!" ("vive le pape" en corse), François avait parcouru la ville en papamobile sous un soleil radieux, bénissant de nombreux enfants sur son passage, une dame de 108 ans et... une pizza tendue par un commerçant local.
Dans cette île qui affiche 80% de catholiques, selon le Vatican, le pape a défendu dimanche matin "un concept de laïcité qui ne soit pas statique et figé, mais évolutif et dynamique", en clôture d'un congrès sur la religiosité populaire en Méditerranée.
Sur ce sujet objet de polémiques récurrentes en France, il a plaidé pour une laïcité capable "de promouvoir une coopération constante entre les autorités civiles et ecclésiastiques pour le bien de l'ensemble de la communauté, chacune restant dans les limites de ses compétences et de son espace".
Il a également mis en garde contre "le risque" que "la piété populaire soit utilisée, instrumentalisée par des groupes qui entendent renforcer leur identité de manière polémique en alimentant des particularismes, des oppositions, des attitudes d'exclusion", dans un message pouvant s'adresser aux nationalistes corses.
- "Paix" -
Dans un second discours à la cathédrale, le jésuite argentin a lancé un appel en faveur de "la paix" pour "tout le Moyen-Orient" citant notamment la Palestine, Israël, le Liban et la Syrie, mais aussi "pour le peuple ukrainien et le peuple russe".
Une semaine après la réouverture de Notre-Dame de Paris, à laquelle il n'a pas assisté malgré l'invitation du chef de l'Etat, le pape, qui fêtera ses 88 ans deux jours après ce voyage, s'est entretenu avec Emmanuel Macron à l'aéroport. Ce dernier lui a offert l'ouvrage "Rebâtir Notre-Dame de Paris", livre officiel de la restauration de la cathédrale dévastée par un incendie le 15 avril 2019.
En fauteuil roulant, avec encore un hématome au visage, résultat d'une chute au saut du lit il y a quelques jours, François était arrivé peu avant 09H00 pour cette visite, la première jamais organisée par un pape en Corse.
Paraissant en bonne forme à Ajaccio, le pape en est reparti visiblement marqué par la fatigue et a annulé son habituelle conférence de presse dans l'avion du retour, une première depuis le début de son pontificat en 2013.
Le chef de l'Eglise catholique s'était précédemment rendu deux fois sur le territoire français depuis le début de son pontificat en 2013, à Strasbourg en 2014 et à Marseille en septembre 2023, mais il n'y a jamais effectué de visite d'Etat.
Par Gaël BRANCHEREAU, Maureen COFFLARD, Claire GALLEN / Rome (AFP) / © 2024 AFP