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Mois sans tabac: la grossesse, moment crucial pour arrêter de fumer

"Mon conjoint me disait: tu n'arriveras jamais à arrêter de fumer ! Ma récompense, ça a été de le narguer…", s'amuse Fanny, maman d'un nouveau-né, Telio, qui comme beaucoup de femmes enceintes, s'est efforcée de réduire drastiquement sa consommation de tabac.

ULISES RUIZ - AFP/Archives

"Mon conjoint me disait: tu n'arriveras jamais à arrêter de fumer ! Ma récompense, ça a été de le narguer…", s'amuse Fanny, maman d'un nouveau-né, Telio, qui comme beaucoup de femmes enceintes, s'est efforcée de réduire drastiquement sa consommation de tabac.

"J'avais déjà essayé avant, mais ça n'avait pas été concluant. Là je ne voulais pas empoisonner cet enfant que j'attendais depuis 11 ans", dit, cinq jours après son accouchement, cette Lyonnaise de 42 ans, suivie à l'hôpital Femme Mère Enfant.

Grâce à l'aide d'une sage-femme tabacologue, elle est "descendue à 15 cigarettes, puis six, cinq, quatre, trois..." "J'étais fière. Les deux dernières, en début d'après-midi et avant le coucher, s'accrochent", explique-t-elle à l'AFP à l'approche de la campagne du Mois sans tabac, en novembre.

Si la grossesse est un moment crucial pour cesser de fumer, pour la santé de la future mère et celle de son enfant, une fumeuse sur deux en France échoue dans un sevrage parfois compliqué par des difficultés sociales, un accès à l'accompagnement inégal et un défaut d'information.

"La grossesse est un levier hyper intéressant mais les femmes les plus dépendantes n'arrivent pas à arrêter. L'enjeu est de ne pas les culpabiliser mais de les soutenir", affirme David Saint-Vincent, psychologue au CHU de Rouen.

- "Peur d'être en manque" -

Les conséquences peuvent être lourdes pour 85.000 enfants nés chaque année de mères qui fument jusqu'au 3eme trimestre (12% des femmes): "Prématurité, poids de naissance diminué, augmentation des risques d'addictions et du tabagisme, troubles psychiatriques, d'obésité et d'asthme…", rappelle le ministère de la Santé.

Or se sevrer, même en fin de grossesse, aura "un bénéfice", explique Marie Van der Schueren, médecin tabacologue au CHU de Caen. "Les moyens d'arrêter existent, encore faut-il savoir comment les prescrire, les utiliser."

Celles qui n'y arrivent pas en début de grossesse "ont une dépendance physique à la nicotine", indique Maud Catherine Barral, la sage-femme qui a suivi Fanny. "On leur donne des substituts nicotiniques: un patch associé à des gommes, des pastilles, un inhaleur, un spray".

Remboursés sur prescription et sans plafond par l'Assurance maladie, ces substituts peuvent être prescrits par médecins, infirmiers, sages-femmes ou kinésithérapeutes.

Les fumeuses ont "peur d'être en manque" mais "quand on a trouvé la bonne dose, elles sont très étonnées de se sentir aussi bien sans fumer" rapporte Corinne Adler, sage-femme tabacologue à la maternité parisienne des Bluets.

"La nicotine ne donne pas de maladies, contrairement à la combustion de la cigarette qui libère 4.000 composés toxiques. Mais elle provoque une dépendance: pour sevrer la femme en douceur, il ne faut pas hésiter à lui donner suffisamment de nicotine. Puis il faudra l'aider à se sevrer des substituts", dit-elle.

- "Mères jeunes, précaires" -

"D'après les données scientifiques obtenues dans une étude française, réussir à faire au moins trois arrêts répétés d'une semaine, grâce au suivi tabacologique, plutôt que de continuer à fumer quelques cigarettes par jour, permet d'augmenter de façon significative le poids de naissance du bébé", rapporte le docteur Anne-Laurence Le Faou, addictologue à l'hôpital parisien Pompidou.

Mais l'accompagnement n'est pas toujours accessible aux "mères jeunes, précaires, en difficulté socio-économique", souligne le Dr Van der Schueren.

"Pour certaines, c'est déjà difficile d'arrêter l'alcool… arrêter le tabac est vécu comme une double peine. Alors que pour optimiser les choses, il faudrait arrêter les deux", poursuit-elle.

"Des récompenses financières sous forme de bons d'achat pourraient fonctionner pour aider au sevrage des femmes enceintes ayant des difficultés sociales", plaide le Dr Le Faou.

Chaque femme confrontée à cette addiction célèbre ses victoires à sa façon, selon Mme Barral: "Elles vont dessiner, peindre, tricoter, se promener, respirer 10 minutes". "Une patiente d'origine brésilienne danse... Plus tu t'es fait plaisir dans la journée moins tu as de frustration, moins tu as de frustration moins tu as envie de fumer."

Quatre sur cinq maintiendront leur arrêt du tabac.

Par Rébecca FRASQUET / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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