Un nom de famille irrémédiablement lié à la Ve République: Jean-Louis Debré, proche de l'ancien président Jacques Chirac, ex-président de l'Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, est décédé dans la nuit de lundi à mardi à l'âge de 80 ans.
La famille de l'ancien élu de l'Eure a annoncé le décès mardi matin à LCI, dirigée par l'un de ses fils, le journaliste Guillaume Debré. L'actuelle présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a déploré la perte d'un "immense serviteur de l’État".
L'Assemblée lui rendra hommage mardi après-midi avant la séance de questions au gouvernement, et le Sénat également au début de la séance.

Le président de la République Jacques Chirac (D) raccompagne le nouveau président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré, le 5 mars 2007, au Palais de l'Elysée à Paris, après la prestation de serment des membres de cette institution
PATRICK KOVARIK - AFP/Archives
"Jean-Louis Debré a consacré sa vie à une certaine idée de la France", a réagi sur X Emmanuel Macron, saluant "un homme de droit et de droiture".
"C'était un personnage truculent et assez unique (...) héritier d'une grande famille politique", a commenté sur France Inter l'ancien Premier ministre, et maire du Havre, Édouard Philippe.
Le fils de Michel Debré, rédacteur de la Constitution de la Ve République et premier chef de gouvernement de Charles de Gaulle en 1959, était un proche de Jacques Chirac, dont il fut conseiller dès les années 1970.

Jean-Louis Debré, alors président de l'Assemblée nationale, lors d'une séance de questions au gouvernement le 29 novembre 2006 à l'Assemblée nationale à Paris
THOMAS COEX - AFP/Archives
L'ancien patron des députés LR (ex UMP, ex-RPR), Christian Jacob, a salué "le fidèle grognard de Jacques Chirac, celui qui aura apporté une réelle contribution à la victoire de 1995".
Docteur en droit sans avoir passé le bac, magistrat instructeur puis député (1986), soutien de Jacques Chirac dans sa guerre interne à droite avec Édouard Balladur, il fut nommé ministre de l'Intérieur de 1995 à la dissolution de 1997, marquant l'opinion publique par l'évacuation de sans-papiers occupant l'église Saint-Bernard à Paris.
Accédant à la présidence de l'Assemblée nationale après la réélection de Jacques Chirac en 2002, Jean-Louis Debré y gagna une image plus consensuelle et fut ensuite nommé à la présidence du Conseil constitutionnel (2007-2016).
Ses successeurs lui ont rendu hommage, Laurent Fabius saluant "son attachement au service de la République" et Richard Ferrand "son indépendance d'esprit et son humanité".

Le président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré pose le 1er octobre 2013 à Paris
Eric Feferberg - AFP/Archives
Parmi de nombreux ouvrages publiés, il raconta notamment son expérience à la tête de l'institution de la rue de Montpensier. Mais aussi ses rapports parfois tendus avec Nicolas Sarkozy, dont le Conseil constitutionnel a, après sa défaite face à François Hollande en 2012, confirmé le rejet des comptes de campagne.
-"Voix singulière" et "humour décapant"-
"Il savait cultiver sa voix singulière, et la défense des libertés, avec un humour décapant. Je n'oublie pas que l'une de ses dernières pièces fut consacrée aux femmes qui firent la France !", a commenté la présidente (Les Républicains) de la région Ile-de-France Valérie Pécresse.
Auteur de livres politiques et de romans policiers, familier des planches de théâtre, Jean-Louis Debré - dont le frère jumeau Bernard Debré, professeur urologue réputé et lui aussi député, est décédé en 2020 - fut également, pendant plus de vingt ans, député de la première circonscription de l'Eure (Évreux), où lui a succédé Bruno Le Maire en 2007, détenue depuis juillet 2024 par le Rassemblement national.

Le président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré pose le 1er octobre 2013 à Paris
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"Ce grand connaisseur et ce grand serviteur de nos institutions aura marqué de ses convictions gaullistes la vie politique française", a réagi sur X le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (LR).
Les premiers hommages sont également élogieux à gauche, à l'image de François Hollande qui a salué à la fois l'homme "passionné, ardent, fiévreux" dans sa défense de Jacques Chirac et de ses "convictions gaullistes", mais aussi sa "grande capacité d'indépendance".
"Nos débats passionnants et respectueux dépassaient nos divergences", a souligné le secrétaire national du Parti communiste Fabien Roussel.
"Il était de ceux pour qui l'idée républicaine restait un idéal et même davantage qu'une Constitution (...) Sa fidélité à cette attitude nous est léguée comme un exemple", a réagi sur X le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.
Par Baptiste PACE / Paris (AFP) / © 2025 AFP