La course à l'Hôtel de ville de Paris s'accélère: à moins d'un an et demi des municipales, la maire socialiste Anne Hidalgo a décidé de ne pas briguer un troisième mandat et déjà confié la relève au sénateur PS Rémi Féraud, déclenchant une guerre de succession au sein de la gauche parisienne.
Aux commandes de la capitale depuis 2014, Anne Hidalgo a mis fin à un suspense de plusieurs mois en annonçant mardi qu'elle ne se représenterait pas en 2026, comme elle en a décidé "depuis longtemps".
"Je me suis toujours inscrite dans l'idée que deux mandats étaient suffisants pour mener à bien de profonds changements", ajoute la maire, 65 ans, dont le second mandat aura été marqué par le succès populaire des Jeux olympiques et paralympiques.
Anne Hidalgo assure qu'elle sera "maire jusqu'au dernier jour, avec la même énergie" qu'à son arrivée à l'Hôtel de ville en mars 2014 où elle avait succédé au socialiste Bertrand Delanoë, après en avoir été la première adjointe.
En dix ans de mandat, la première femme à diriger la capitale a rendu Paris plus cyclable et plus piétonne, mais elle est vivement critiquée sur l'endettement, ses choix d'aménagements et une façon de gouverner jugée trop verticale.
Elle dit avoir voulu annoncer sa décision "suffisamment tôt" pour préparer "une transmission sereine" portée par l'un de ses fidèles, le sénateur socialiste Rémi Féraud.
A 53 ans, l'ancien maire du Xe arrondissement et chef du groupe de la majorité municipale au Conseil de Paris, "a la capacité de rassemblement nécessaire" aux yeux d'Anne Hidalgo.
- Duel avec Emmanuel Grégoire -
Sa succession s'annonce en réalité tout sauf sereine: il y a une semaine, son ex-premier adjoint Emmanuel Grégoire, devenu député, avec qui elle est en froid, s'est déclaré candidat pour "apaiser les tensions" et devenir "le maire de la réconciliation des Parisiennes et des Parisiens".
Le parlementaire PS de 46 ans a déjà reçu le soutien de 450 militants de la fédération socialiste parisienne qui en compte environ 3.000. Il organise ce mardi soir un premier rassemblement autour de sa candidature.
"Emmanuel Grégoire a fait le choix de partir à l'Assemblée nationale pour porter le combat contre l'extrême droite: il y aura vraisemblablement une dissolution d'ici la fin 2025. On ne peut pas être candidat à tout", a balayé l'ex-candidate à la présidentielle.
Anne Hidalgo reproche à son ancien dauphin sa proximité avec le patron du PS, Olivier Faure, qu'elle accuse d'être responsable de sa défaite à la présidentielle de 2022, avec un score historiquement bas (1,74%).
"Rémi a vocation à devenir le prochain maire de Paris. Mais ça n'est pas moi qui décide, je n'impose rien, je donne simplement une indication. Ce sera aux militants socialistes parisiens d'en décider", assure l'édile.
Rémi Féraud a expliqué la semaine dernière à l'AFP vouloir "organiser le rassemblement tout de suite, avec les maires d'arrondissements, les élus et les militants".
"Je ne suis pas d'accord avec Emmanuel Grégoire quand il dit qu'il faut changer de récit. Au contraire, il faut le prolonger pour que l'histoire de la gauche à Paris puisse se poursuivre", analyse-t-il.
La première secrétaire du parti socialiste parisien, Lamia El Aaraje, adjointe à l'urbanisme de la maire en charge de "Paris 2030" pour préparer la campagne, s'est rangée mardi derrière le sénateur parisien, en saluant "l'acte démocratique" de Mme Hidalgo.
- La droite dispersée -
Anne Hidalgo "souhaite" que les écologistes et les communistes se rallient à la candidature de son dauphin "dès le premier tour des municipales", mais exclut toute alliance avec La France insoumise.
Les militants écologistes de Paris ont de leur côté exprimé le souhait d'une union pour les municipales, a confié à l'AFP David Belliard, l'adjoint écologiste chargé des transports. "Une petite révolution pour nous qui avons toujours préféré présenter une liste autonome au premier tour", décrypte l'ancien candidat EELV aux municipales de 2020.
Chez les communistes parisiens, qui font partie comme les écologistes de la majorité municipale, le sénateur Ian Brossat a fait savoir qu'il était un "candidat possible".
La droite parisienne, dans l'opposition depuis 2001, est elle aussi éparpillée. Vue comme sa candidate numéro un, la ministre de la Culture et maire LR du VIIe arrondissement Rachida Dati, poursuivie pour corruption dans un volet de l'affaire Carlos Ghosn, a perdu du poids politique depuis que son groupe a été rétrogradé en deuxième position au sein de l'opposition parisienne.
Il s'est vidé cet été de la moitié de ses élus au profit d'un nouveau groupe qui promet de "rassembler", avec l'un de ses leaders, l'ex-député Horizons Pierre-Yves Bournazel, "candidat possible" selon ses dires.
Par Juliette COLLEN / Paris (AFP) / © 2024 AFP