Philippe Douste-Blazy : "Le nombre de cas du variant anglais augmente à peu près de 70% par semaine"
Les nouveaux variants de la Covid-19 semblent compliquer l’action du gouvernement qui réfléchit désormais sérieusement à reconfiner les Français. "Il faut être inquiet parce qu’il y a deux sortes de mutations dans un virus", explique Philippe Douste-Blazy, ancien ministre et auteur de Maladie française (Archipel), qui rappelle que les mutations sont normales. "Il y a celles qui font que le virus est moins dangereux, puis il y a celles qui font que le virus est soit plus contagieux, soit plus dangereux, soit les deux."
Pour lui, actuellement, "nous avons affaire à deux voire trois mutations" du Sars-CoV-2. Le variant anglais, pour commencer, qui "est particulièrement contagieux" et dont on sait que le nombre de cas augmente "à peu près de 70% par semaine, donc là c’est un vrai sujet". Philippe Douste-Blazy souligne que ce variant n’est "pas plus dangereux" mais que s’il y a plus de cas "vous allez avoir plus d’hospitalisations, et c’est ce qu’il se passe".
"Il y a une course contre la montre incroyable entre la vaccination d’un côté, et le variant de l’autre"
Jean-François Delfraissy a parlé d’une deuxième pandémie parallèle, en parlant du variant anglais. "En fait, vous avez deux nouvelles importantes aujourd’hui : la première, elle n’est pas bonne, c’est qu’il y a ce variant britannique mais il y a aussi le variant sud-africain qui, lui, a une seconde caractéristique et c’est que non seulement il est plus contagieux, mais il est insensible, pour une partie, aux anticorps ; et puis la deuxième nouvelle, elle est bonne, par contre : c’est qu’au treizième jour, on voit en Israël qu’il y a une baisse de 60% de gens qui ont une forme grave", explique l’ancien ministre. C’est la preuve d’une "efficacité importante de ce vaccin". "Donc il y a une course contre la montre incroyable entre la vaccination d’un côté, et le variant de l’autre."
La diminution des formes graves de la maladie est une bonne nouvelle, souligne Philippe Douste-Blazy, car "il faut arriver à vacciner les 20 millions de personnes dites à risque, surtout les 5 millions de plus de 75 ans et les 800.000 ou un million qui ont des comorbidités". Il précise qu’une fois que ce sera fait, il sera possible de rouvrir les restaurants et autres activités fermées dont les propriétaires sont en crise.
Doses de vaccin : "Je ne comprends pas pourquoi la Commission européenne n’a pas mis le paquet"
Olivier Véran a annoncé que l’ensemble de la population française pourrait être vaccinée vers la fin de l’été 2021. "Je ne sais pas si c’est possible", estime l’ancien ministre qui souligne que dimanche 24 janvier 2021 "il y a eu 18.000 vaccinés". Il reste également la question des doses disponibles pour la vaccination. "Je ne comprends pas pourquoi il y a certains pays comme les États-Unis ou Israël qui ont pu avoir des doses massives, et que la Commission européenne n’ait pas mis le paquet, quand on voit le nombre de milliards que coûte un confinement ou un couvre-feu par semaine..."
Jean Castex, dimanche 24 janvier 2021, s’est félicité que la barre du million de vaccinés en France ait été dépassée. "Je préfère un million que 500.000, ça c’est sûr." Philippe Douste-Blazy explique qu’il faut vacciner les soignants très rapidement, comme c’est le cas en Allemagne ou en Italie. Il critique en partie la stratégie du gouvernement de commencer la vaccination par les Ehpad où les gens ont des problèmes cognitifs. "Les Ehpad avec des gens parfaitement valides, oui."
Le variant "nous oblige à mettre les bouchées doubles", explique l’ancien ministre de la Santé, car s’il y a effectivement moins de contaminations par jour par rapport aux pics de 2020, "on voit le nombre d’hospitalisation en réa, monter".
"Il faut isoler de manière extrêmement forte les personnes positives"
Le reconfinement total de la population française semble de plus en plus se profiler à l’horizon. "Là, il y a deux solutions", souligne Philippe Douste-Blazy. "Si on veut que l’économie reprenne il faut, depuis le début dans cette épidémie, taper très vite, très fort." Toutefois, il explique qu’il faut également, une fois ce coup dur passé, baisser "très très très rapidement le nombre de cas, et ensuite vivre normalement".
"Le jour où on va pouvoir baisser à 3.000 ou 4.000 cas par jour, alors ça veut dire que l’épidémie est sous contrôle. Et ce jour-là, il faut diagnostiquer, tracer les personnes et isoler les personnes positives." Pour lui, il faut que les Français acceptent qu’il faut "isoler de manière extrêmement forte les personnes positives", chose mal acceptée par la population et les pouvoirs publiques. Sans cela, "nous ne pourrons pas contenir" le virus. "Depuis le début des temps de l’humanité, il y a des épidémies. Il y aura, dans les années qui suivent, des épidémies. Chaque fois qu’il y a une personne infectée, il faut juste qu’elle ne rencontre pas une autre personne non infectée. C’est le B-A-BA de la médecine infectieuse."
"Il vaut mieux confiner maintenant, de manière courte et assez violente"
Pour lui, "il y aura reconfinement", surtout si "le variant anglais continue comme il est". Quant à savoir quand le reconfinement aura lieu, Philippe Douste-Blazy estime qu’il "vaut mieux confiner maintenant, de manière courte et assez violente et ensuite pouvoir rouvrir le plus rapidement possible". Au contraire, ne rien faire et attendre pourrait conduire à un "confinement du niveau que vous avez eu au mois de mars 2020. C’est une catastrophe sur le plan économique".
L'ancien ministre préconise un reconfinement de 15 jours-3 semaines : "dans le confinement, on voit bien que tous les chiffres baissent de manière drastique immédiatement au bout de 15 jours, souligne-t-il. Pour lui, il s'agirait de réouvertures très réaménagées de ce qu'on appelle les commerces non-essentiels. Ce qui est important, c'est de laisser les enfants à l'école, car aujourd'hui, rien ne nous fait dire qu'il y a plus de contaminations. Mais si le variant devait toucher les enfants, alors il faudra laisser les écoles fermées".
"Faut-il arrêter le monde entier parce que les gens qui meurent de cette maladie ont plus de 81 ans ? C'est une vraie question"
Sur le choix d'un confinement ciblé pour les personnes les plus âgées et les personnes fragiles, "c'est ce que je pense depuis le début ! affirme Philippe Douste-Blazy. La moyenne d'âge des personnes qui meurent est de plus de 80 ans, rappelle-t-il, faut-il arrêter le monde entier parce que les gens qui meurent de cette maladie ont plus de 81 ans ? C'est une vraie question, estime-t-il. Je pense qu'il vaut mieux d'abord protéger au maximum les personnes à risque et laisser surtout l'économie des plus jeunes ! Il y a deux variants, mais il y en aura peut-être un troisième, un quatrième...".
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