single.php

Pour des lycéens corses, anatomie du métier de producteur de cinéma

"J'aime voir le film se créer, toucher un peu à tous les postes". Marie-Ange Luciani, productrice des films multirécompensés "Anatomie d'une chute" et "120 battements par minute", est revenue cette semaine dans son ancien lycée d'Ajaccio dévoiler aux élèves les coulisses de son métier.

Pascal POCHARD-CASABIANCA - AFP

"J'aime voir le film se créer, toucher un peu à tous les postes". Marie-Ange Luciani, productrice des films multirécompensés "Anatomie d'une chute" et "120 battements par minute", est revenue cette semaine dans son ancien lycée d'Ajaccio dévoiler aux élèves les coulisses de son métier.

Six César, un Oscar, une Palme d'or, deux Golden Globe, un Bafta... Le thriller judiciaire de Justine Triet, "Anatomie d'une chute", a presque tout raflé.

La productrice a d'ailleurs apporté son César du meilleur film pour que les élèves du lycée Laetitia Bonaparte d'Ajaccio touchent au rêve, dans le cadre de l'opération "un artiste à l'école".

La productrice Marie-Ange Luciani s'exprime devant des élèves de son ancien lycée d'Ajaccio, le 15 janvier 2025

La productrice Marie-Ange Luciani s'exprime devant des élèves de son ancien lycée d'Ajaccio, le 15 janvier 2025

Pascal POCHARD-CASABIANCA - AFP

Elle retrace son parcours. Après des études de littérature "avec option cinéma" à Aix-en-Provence puis à la Sorbonne à Paris, elle obtient un DESS d'administration du spectacle. Mais "c'est en faisant des stages qu'on apprend les métiers du cinéma", assure cette "autodidacte" de 45 ans.

"Stagiaire dans une société de distribution de films, j'ai rencontré un producteur, Gilles Sandoz, qui m'a tout appris du métier". "Ruiné, il appelait pour avoir des avances alors moi, la stagiaire, on me disait +réponds-lui+".

Gilles Sandoz lui propose alors de devenir son assistante de production: "j'ai dit +d'accord mais je veux être productrice+ sans savoir ce que c'était", glisse celle qui travaillera cinq ans avec lui avant de rejoindre "Les Films de Pierre", créée notamment par Pierre Bergé et qu'elle rachètera après sa mort.

"Je trouve assez génial de se dire qu'elle a réussi en partant avec un producteur qui n'avait plus d'argent, qu'elle se soit dit +je lâche tout pour faire ça+", réagit pour l'AFP Andréa Schraup, en Terminale.

La productrice Marie-Ange Luciani devant son ancien lycée d'Ajaccio, le 15 janvier 2025

La productrice Marie-Ange Luciani devant son ancien lycée d'Ajaccio, le 15 janvier 2025

Pascal POCHARD-CASABIANCA - AFP

"Aujourd'hui, avec Parcoursup, on se dit qu'il faut avoir des bonnes notes, être pris dans les écoles. Mais ça montre qu'on peut réussir sans école et qu'on peut même se tromper puisqu'elle est partie d'études littéraires pour finir en production. C'est un beau message", ajoute l'élève de 17 ans, qui voudrait être architecte.

- Un mariage -

Partant de l'exemple "d'Anatomie", la productrice entre dans les détails de son métier. Tout commence par une idée: "Justine Triet est venue nous voir en disant je voudrais faire un film d'hiver, dans la neige, avec peut-être un enfant aveugle, un piano, une femme qui peut-être aurait tué son mari".

L'écriture du film, "qui peut durer d'un à cinq ans", commence alors, avec des rendez-vous réguliers producteurs-scénaristes. "Humainement, c'est vraiment un mariage, on s'appelle tous les jours", glisse celle qui produit deux films par an.

Des élèves du lycée Laetitia Bonaparte posent avec un César remporté par la productrice Marie-Ange Luciani, le 15 janvier 2025 à Ajaccio

Des élèves du lycée Laetitia Bonaparte posent avec un César remporté par la productrice Marie-Ange Luciani, le 15 janvier 2025 à Ajaccio

Pascal POCHARD-CASABIANCA - AFP

"Une fois le scénario mûr pour être lu, je vais démarcher différentes chaînes de télévision, régions, distributeurs" pour rassembler "cinq millions d'euros, ce qui n'est pas beaucoup pour un film tourné en 45 jours".

Financements obtenus, place au recrutement des "70 personnes sans les acteurs" qui vont "fabriquer le film". Et après huit semaines de préparation, c'est le tournage, "ma phase préférée, quand on voit si toute la musique qu'on a essayé de composer marche ensemble".

Le producteur est alors souvent "plus en retrait", mais "reçoit les images chaque soir et parle avec le réalisateur pour le rassurer ou parfois demander de refaire". Viennent ensuite "12 à 20 semaines" de montage. Mais ça a duré "42 semaines" pour "Anatomie", raccourci de 3H à 2H31.

Pour donner ses meilleures chances au film, "on l'a montré au festival de Cannes, qui l'a sélectionné" en compétition. Puis tout s'enchaine, montée des marches, palme d'or, ventes à l'international, 1,9 million de spectateurs en France.

"Le succès, ça fait peur ?", demande une élève. "Il y a une petite dépression après", concède la productrice. "Quand ça marche, c'est la fête, sinon, ça va très mal. Puis on se relève et on fait le film d'après. A chaque fois, il faut recommencer à zéro".

Par Maureen COFFLARD / Ajaccio (AFP) / © 2025 AFP

L'info en continu
12H
11H
10H
09H
07H
23H
Revenir
au direct

À Suivre
/