"Rétablir l'ordre, rétablir l'ordre, rétablir l'ordre". Le nouveau ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a annoncé la couleur lundi, se gardant toutefois de faire des promesses budgétaires sur lesquelles les syndicats de police se disent vigilants.
"Nous devons avoir le courage de la fermeté (...) pour le collégien tabassé, pour la jeune fille violée, pour la veuve du gendarme endeuillée, pour nos compatriotes qui, en raison de leurs origines, de leurs couleurs de peau, de leurs croyances, sont menacés", a-t-il martelé, dans la cour de Beauvau, après le discours de son prédécesseur, Gérald Darmanin.
Lors de la passation lundi matin, le nouveau ministre Les Républicains (LR) de l'Intérieur, nommé samedi, a décliné ses "trois priorités": "La première, rétablir l'ordre. La deuxième, rétablir l'ordre. La troisième, rétablir l'ordre."
"Les Français veulent plus d'ordre, d'ordre dans la rue, d'ordre aux frontières", a ajouté cette figure de la droite conservatrice, tenant d'une ligne dure sur l'immigration.
"Honte à ceux qui distillent dans leurs discours la haine vis-à-vis de nos forces de l'ordre", a-t-il encore dit, promettant qu'il ne "laisserait pas faire".
- "Inexécution des peines" -
Pour sa première journée en tant que ministre de l'Intérieur, M. Retailleau n'a cessé d'affirmer qu'il entendait oeuvrer contre "l'ultra-violence" et a largement pointé "l'inexécution des peines", appelant à "un dialogue" avec le nouveau garde des Sceaux, Didier Migaud.
"Je crois qu'il faut que nous, du côté du ministère de l'Intérieur, on fasse le job. Mais il faut aussi que l'on revoie vraisemblablement un certain nombre de cadres pour changer une politique pénale qui, je pense, depuis très longtemps, a laissé s'installer ce droit à l'inexécution des peines", s'est indigné Bruno Retailleau lors du JT de TF1.
Le ministre a également assuré vouloir "prendre tous les moyens (...) pour baisser l'immigration en France" et exprimé sa volonté d'"utiliser (son) pouvoir réglementaire pour aller au bout de ce que l'on peut faire" pour réduire l'immigration illégale.
Présents lors de la passation dans la cour de Beauvau lundi matin, les responsables des syndicats policiers se sont dits "en phase" sur le message de fermeté affiché d'entrée, mais inquiets sur d'éventuels coups de rabot budgétaire.
"J'ai retenu la priorité, rétablir l'ordre. Ca nous va bien dans la volonté. Mais ça ne doit pas être juste un coup de menton. Il faut des moyens, des effectifs", a assuré le secrétaire général d'Un1té, Grégory Joron. Il doit aussi y avoir "un tandem bien aligné avec le ministre de la Justice", le divers gauche Didier Migaud.
"Les priorités du ministre de l'Intérieur correspondent au fameux choc d'autorité que l'on demande à Alliance Police nationale", a de son côté déclaré le secrétaire général d'Alliance Fabien Vanhemelryck.
"On lui fait confiance mais si vous voulez rétablir l'ordre, il faut aussi une réponse pénale forte. On verra si l'ensemble du gouvernement est en phase" avec ce discours, a ajouté le patron d'Alliance.
- "Soupçons" -
Les syndicats ont réclamé le respect des engagements pris en matière budgétaire, et notamment de la Loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (Lopmi), qui prévoit une hausse du budget du ministère de l'Intérieur de 15 milliards d'ici à 2027.
"On a des soupçons de penser qu'on veut faire des économies sur le dos des policiers", a ajouté M. Vanhemelryck.
"On attend du nouveau ministre qu'il y ait une continuité sur les engagements pris", a renchéri Grégory Joron. "Si on nous met un coup de canif, on va resombrer, c'est la Lopmi qui nous maintenait à l'eau".
Interrogé sur cette question du budget lundi soir lors de son premier déplacement au commissariat de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) où il a salué des policiers blessés vendredi lors d'une intervention, le ministre a répondu d'abord vouloir "voir exactement où on est sur le plan budgétaire", ajoutant: "Mais je les défendrai".
"Ils ont été très sollicités (...), on a beaucoup demandé à nos forces de l'ordre, et ce n'est pas la première fois qu'on leur demande beaucoup, ça fait quand même plusieurs années qu'ils sont sur la brèche. Il faut que l'Etat, la République tiennent ces engagements-là", a-t-il assuré.
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Par Tiphaine LE LIBOUX, Nicholas MC ANALLY / Paris (AFP) / © 2024 AFP