Nicolas Sarkozy avait utilisé le même tremplin pour se propulser à l'Elysée en 2007: le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau s'est lancé mercredi dans la course à la présidence des Républicains, au risque de raviver une "guerre des chefs" à droite avec Laurent Wauquiez.
Porté par les sondages où il a bondi depuis son arrivée à Beauvau en septembre, le ministre a choisi d'annoncer sa candidature dans un courrier adressé aux militants qui devraient être appelés à élire le nouveau président de LR lors d'un congrès ce printemps.
"Aujourd'hui, je veux faire pour mon parti ce que je fais à la tête de mon ministère: parler vrai et agir vite", écrit-il dans ce message dont l'AFP a obtenu une copie, confirmant une information du Figaro.
Surfant sur les récentes victoires de la droite à la mairie de Villeneuve-Saint-Georges (94) et lors d'une législative partielle dans son fief de Boulogne-Billancourt (92), succès attribués à sa participation au gouvernement par ses partisans, Bruno Retailleau donne ainsi un coup d'accélérateur à sa campagne avant un bureau politique crucial prévu lundi pour fixer la date du congrès.
Et prend également le risque de déclencher une "guerre des chefs dévastatrice" à droite. Laurent Wauquiez l'avait prévenu lors d'un dîner en tête-à-tête il y a une semaine à Beauvau, où le patron des députés LR lui avait rappelé un "accord" entre les deux hommes sur la distribution des rôles.
"A toi d'incarner la droite au gouvernement, à moi de reconstruire notre famille politique", l'avait mis en garde le patron des députés LR qui envisage également de se lancer dans la course pour 2027, avec l'intention lui aussi d'utiliser la présidence du parti de droite comme tremplin pour la présidentielle.
- "Voter ce n'est pas diviser" -
Mercredi, l'entourage de Laurent Wauquiez a répété à l'AFP que Bruno Retailleau prenait la "lourde responsabilité d'ouvrir une guerre des chefs".
![Le président du groupe des députés LR à l'Assemblée nationale, Laurent Wauquiez (G) et Bruno Retailleau, alors chef des sénateurs LR au Sénat, le 19 septembre 2024 à Paris](https://www.sudradio.fr/wp-content/uploads/2025/02/efb6227a39f530d8ace1786dab364c73ed73dcb7.jpg)
Le président du groupe des députés LR à l'Assemblée nationale, Laurent Wauquiez (G) et Bruno Retailleau, alors chef des sénateurs LR au Sénat, le 19 septembre 2024 à Paris
Ludovic MARIN - AFP/Archives
Dans son courrier, le ministre tente de rassurer: "Je ne veux pas de nouvelles déchirures et de nouvelles blessures dans notre parti", écrit-il, ajoutant qu'il ne se prêterait "pas au jeu des petites phrases".
"Voter ce n'est pas diviser", a-t-il renchéri sur France Inter, estimant que sa candidature à la tête de LR il y a un peu plus de deux ans contre Eric Ciotti n'avait pas provoqué de guerre des chefs.
Il avait alors obtenu 46,3% des voix face au député des Alpes-Maritimes, qui a quitté ses fonctions à la tête du parti après avoir fait alliance en juin avec le Rassemblement national aux législatives, laissant le poste vacant depuis bientôt neuf mois.
Fort de sa popularité, M. Retailleau a reçu récemment le soutien de plusieurs personnalités de droite. L'ex-chef du gouvernement Michel Barnier l'a qualifié de "grand ministre", le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand soutient sa candidature, Louis Sarkozy, le fils de l'ancien président, le présente comme la "seule lumière" qui soit apparue dans "la triste séquence" de la dissolution...
Et Xavier Bertrand a écarté sur BFMTV toute "contradiction" entre la présidence de LR et les fonctions de ministre de l'Intérieur, prenant l'exemple de Nicolas Sarkozy qui a conquis l'Elysée en 2007 en occupant ces deux postes.
Le président des Hauts-de-France, qui s'est déjà déclaré candidat à la présidentielle, a toutefois réfuté le "caractère automatique" entre la présidence de LR et la course à l'Elysée.
D'autres candidats potentiels de droite proposent d'ailleurs des primaires ouvertes pour désigner un seul candidat qui ne serait pas éliminé au premier tour comme lors des deux dernières présidentielles, à l'image du ministre de la Justice Gérald Darmanin ou de David Lisnard, le président de l'Association des maires de France (AMF).
Dans son courrier aux militants, Bruno Retailleau appelle à "agir vite", estimant qu'"une nouvelle dissolution est possible et qu'il nous faut rapidement nous mettre en ordre de bataille".
Par Antonio RODRIGUEZ / Paris (AFP) / © 2025 AFP