Gabriel Attal, le 7 avril 2024, a donné les grands axes de sa prochaine réforme du système de santé en France avec un objectif : améliorer l’accès aux soins. Parmi les mesures, il y a le grand retour de la taxe lapin, une taxe visant à sanctionner les patients qui prendraient rendez-vous chez un médecin et ne s’y rendraient pas sans prévenir en amont. Le gouvernement estime que ça retirerait, chaque année, pas moins de 27 millions de créneaux de rendez-vous médicaux en France.
Taxe lapin : "À un moment où on n’a pas assez de médecins, ne pas avoir les rendez-vous honorés est quelque chose d’assez choquant"
Pour Étienne Minvielle, professeur à l’École Polytechnique et spécialiste de la santé, "c’est une bonne idée". "À un moment où on n’a pas assez de médecins, ne pas avoir les rendez-vous honorés est quelque chose d’assez choquant." Quant au nombre de 27 millions par an avancé par le gouvernement, il estime qu’il est juste bien que ce soit difficile à estimer. "C’est énorme". "Même si on ne sait pas exactement le chiffre, le phénomène est très important."
De fait, "introduire une taxe de cette nature, c’est assez logique", estime-t-il. "Quelque part, c’est responsabiliser le patient" car il juge "choquant" les rendez-vous inutilisés.
Le fonctionnement de la taxe lapin, dont le montant a été annoncé à 5 euros, est "très simple sur le principe", analyse Étienne Minvieille. "C’est exactement comme quand on réserve un hôtel ou un restaurant." Les patients seront ainsi appelés à laisser leurs coordonnées bancaires, "et 5 euros seront directement positionnés sur le compte". Cette somme sera alors prélevée si le patient n’honore pas son rendez-vous.
Il explique que "c’est à la main du médecin" que reviendra la charge de prélever l’argent. "Le médecin peut juger que le patient était dans une situation telle qu’il n’avait pas le choix." De quoi limiter les problèmes pour les personnes les plus fragiles ou aux situations compliquées. "Ça va être effectivement quelque chose d’assez souple sur le principe."
Toutefois, le spécialiste de la santé soulève la problématique de la "prise de rendez-vous directe", par téléphone par exemple, dans laquelle la carte bancaire du patient n’est pas enregistrée, contrairement aux plateformes de réservation en ligne. "C’est pas tout à fait clair la modalité", explique le professeur de Polytechnique.
"Je reste relativement optimiste sur l’application de la mesure"
Le montant de 5 euros paraît arbitraire. Pourquoi le patient ne paierait-il pas tout simplement l’intégralité de la somme ? "C’est un point de discussion", assure Étienne Minvieille. Il juge qu’on "pourrait monter" et faire payer plus. "Mais je pense que, politiquement, c’est assez compliqué quand même." Augmenter le montant de la taxe pèserait potentiellement trop lourd sur les finances des ménages, notamment les plus précaires, et risque d’envenimer les tensions entre la population et le gouvernement. En outre, cette somme est "ce qui se fait déjà en Allemagne". "Je crois que c’est la règle un petit peu universelle."
Et il assure qu’en Allemagne, cela fonctionne. Alors que concernant les autres mesures de responsabilisation du patient, "en pratique, en fait, ça ne marche pas très bien", mais pour celle-ci, "ça devrait être plus efficace", juge-t-il. "Je reste relativement optimiste sur l’application de la mesure."
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