La menace d'une guerre des chefs "dévastatrice" entre le patron des députés Laurent Wauquiez et le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau plane sur Les Républicains qui se sont réunis mercredi pour tenter de lancer leur "refondation".
Les hostilités ont débuté dès mardi soir lors d'un dîner en tête à tête à Beauvau entre les deux hommes, rivaux potentiels pour prendre la tête du parti, tremplin pour se propulser dans la course à l'Elysée.
Lors de cet entretien, Laurent Wauquiez a demandé au ministre le respect d'un "accord" passé entre eux sur la distribution de leurs rôles au sein des Républicains, selon des propos transmis à l'AFP par l'entourage de l'élu de Haute-Loire.
"A toi d'incarner la droite au gouvernement, à moi de reconstruire notre famille politique", a insisté Laurent Wauquiez, avant de lui lancer un avertissement sans ambigüité.
"Si tu romps cet accord, tu porteras la responsabilité d'allumer une guerre des chefs qui sera dévastatrice", a-t-il mis en garde, quelques heures avant qu'il ne présente devant le bureau politique ses propositions pour la "refondation" de la droite, mission dont il a été chargé à l'automne.
- Avantage Retailleau -
Un sondage divulgué mercredi par l'hebdomadaire Le Point est-il à l'origine de ce mouvement d'humeur? Cette enquête donne en tous cas l'avantage à Bruno Retailleau, dont la cote de popularité a grimpé depuis qu'il s'est installé à Beauvau en septembre dans le gouvernement de Michel Barnier.
Réalisée fin janvier par l'institut OpinionWay à la demande de Force républicaine, mouvement lancé par l'ancien candidat à la présidentielle François Fillon et repris par le ministre de l'Intérieur lui-même, elle place en tête Bruno Retailleau pour prendre la tête du parti (24%), devant Xavier Bertrand (21%), Valérie Pécresse (15%) et Laurent Wauquiez (15%).
Et, selon l'hebdomadaire, l'annonce de la candidature de l'ancien sénateur de Vendée à la tête des Républicains serait "une question de jours, voire d'heures".
Il y a une semaine, Laurent Wauquiez avait déjà appelé la droite à éviter une guerre des chefs, estimant que le parti, qui a frôlé la disparition en juin lorsque son ex-président Eric Ciotti a scellé une alliance avec le Rassemblement national, ne peut se permettre de nouvelles divisions internes.
Abattant la carte du "collectif" et donnant la priorité à la "refondation" du parti, Laurent Wauquiez cherche à temporiser face à l'appétit grandissant du ministre de l'Intérieur.
Mercredi matin, lors d'un bureau politique, il a appelé à une "refondation qui doit donner le signal d'une droite qui se rebâtit et qui a appris de ses erreurs du passé".
Parmi les "propositions d'évolution" du parti, des "référendums internes" pour les adhérents, qui valideront par ailleurs les investitures aux élections, ou la création d'un statut de "sympathisant".
- Nouveau nom -
Mais Laurent Wauquiez a écarté l'un des sujets qui fâche à droite: le mode de désignation de son candidat à la présidentielle, dont il a confirmé qu'il ne sera pas traité dans l'immédiat.
Tandis que le remuant président de l'Association des maires de France (AMF), David Lisnard, plaide pour des primaires ouvertes à toute la droite, et que d'autres attendent des sondages qu'ils désignent leur "candidat naturel", le patron des députés LR en appelle à "l'esprit d'équipe".
Le bureau politique a par ailleurs acté la réunion "très prochainement" d'un... nouveau bureau politique, pour "adopter les nouveaux statuts, puis la convocation d'un congrès", lors duquel doit être adopté un "nouveau nom" du parti, après une consultation préalable des adhérents.
Le week-end dernier, Les Républicains ont remporté deux succès électoraux à la mairie de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne) et au premier tour de la législative partielle de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), attribués à la présence du très droitier Bruno Retailleau au gouvernement, selon ses partisans.
Mais, pour Laurent Wauquiez, ces résultats prouvent uniquement que "la refondation de la droite avance".
Selon lui, les quelque "20.000 questionnaires" remplis par les adhérents ont dégagé une préoccupation "numéro un": la question "des normes administratives et de la lourdeur administrative".
Par Antonio RODRIGUEZ / Paris (AFP) / © 2025 AFP