Judith Soula : Tu as été blessé au tendon du biceps début mai puis été opéré. Alors tout d'abord, comment vas-tu ? Benjamin Kayser : Ça va, l'opération s’est bien passée. Il faut juste que je sois patient dans ces moments où au contraire, mes coéquipiers font preuve d'impatience. Ils ont hâte d'y être. Moi, il faut que j'avale la pilule. Je suis un supporter comme tout le monde et j'essaye de m'impliquer un maximum pour apporter à l'équipe.Ça va être insupportable pour toi demain soir ? Franchement, ce n'est pas drôle, même si évidemment il y a bien pire. On se prépare toute l'année, dans une année qui a été vraiment chaotique pour nous à titre personnel et à titre collectif. On a l'impression que cette année est interminable. On a commencé le 3 juillet dernier et enchaîné avec une coupe du Monde avec un goût un peu spécial à la fin. Franchement, on a eu une période compliquée d'octobre à fin janvier avec des perturbations comme j'en ai eu rarement à l'ASM, avec notamment trois défaites consécutives à domicile. Ça n'a pas été facile. Et enfin une période plus aboutie où l’on était vraiment heureux et enthousiaste. Ce ne sera pas pour moi cette année, mais ça n'empêche que le plus important c'est que je trouve que les mecs vont bien, l'équipe aussi. On est dans une bonne dynamique, je trouve vraiment qu'ils ont les crocs. En tout cas, il n'y aura pas d'excuses de fraîcheur physique ou psychologique, ce n'est pas du tout le cas. On a juste envie de faire un grand match et de porter haut nos couleurs. J'espère de tout cœur que ça va nous emmener à la finale, ce qui serait la première étape. J'ai entendu parler de Barcelone, mais il y a un sacré défi qui nous attend avant demain soir. J'espère vraiment qu'on va faire un grand match pour secouer une équipe du Racing qui maîtrise son sujet.
"La dalle psychologique qu'il faut avoir pour gagner un Top 14, ça ne se répare pas en quinze jours."
Dans ces moments là, tu es avec le groupe en ce moment, as tu un rôle important ? Malheureusement, je ne peux pas suivre les copains sur le terrain parce que ce n'est pas d'actualité pour moi, mais j'essaye de m'impliquer un maximum pendant la semaine. Il y a parlé purement et simplement avec les deux mecs qui me remplacent de très belle manière, John Ulugia et Pellow Van der Westhuizen. On a besoin de tout le monde et ce sont des joueurs de grande qualité. Ce ne sont pas des Français donc j'essaye de leur expliquer un maximum ma connaissance des joueurs, des profils, des arbitres, tout ce que je peux leur apporter. Ensuite, on est une bande de copains, on n'a pas envie de se laisser tomber donc j'essaye d'apporter mon maximum dans l'analyse. Mais aussi d’apporter ma contribution dans l'enthousiasme qui règne dans le groupe. De l'appétit, du sourire, de l'envie de bien faire, c'est ce que les mecs ont ressenti en tout cas. Tu parlais de fraîcheur, le fait de ne pas avoir joué les barrages, pour toi c'est un avantage ? Les barrages je ne sais pas, mais c'est vrai cette campagne de coupe d'Europe, qu'on aurait adoré jouer -c'était un désastre fin janvier de ne pas être qualifié dans on ne va commencer à dire que c'était une bonne chose. Mais en tout cas, le côté positif de ça c'est que ça nous a permis de souffler dans une saison à rallonge, assez impitoyable en terme de blessures, et avec une Coupe du Monde en début d'année. Franck Azéma l'a assez répété, mais je ne sais même plus combien il y a eu d'opérations cette année. Quand un mec sortait de l'infirmerie, un autre y rentrait. C'était vraiment un peu du non-stop en chassé croisé. Le barrage, je ne sais pas si ça va être déterminant, mais tout ce que je sais c'est que cette période des deux derniers mois où l'on a pu uniquement se concentrer sur le Top 14, sur nous, et progressivement récupérer les blessés, ça a été une bouffée d'oxygène énorme. J'espère que c'est ce qui va faire la différence, parce que l'année dernière on l'a payé très cher. On était vraiment sur les rotules à l'image de nos pertes de joueurs pendant la semaine qui nous amenait à la finale. Entre la demie et la finale, on a perdu 5 mecs, je crois, c'était infaisable. En tout cas là, ce ne sera pas notre excuse, j'espère vraiment que ça va faire la différence, car la fraîcheur physique c'est une chose, ça se rattrape. Mais l'appétit, la dalle psychologique qu'il faut avoir pour gagner un Top 14, ça ne se répare pas en quinze jours.