Romain Amalric : L'équipe d'Agen termine la saison en étant relégable, avec cette dernière victoire face à Oyonnax pour ne pas finir dernier. C'était important de repasser devant Oyonnax et d'être 13e de ce championnat ?Philippe Sella : C'était important de faire une saison pleine en Top 14, en essayant de prendre du plaisir et de gagner plein de matchs. Des objectifs ont été atteints dans le contenu, l'animation sportive, dans l'offensif. Même si on a quand même manqué de concrétisation sur ce plan offensif. Sur la défense, on a été défaillant, mais on est neuvième marqueur d'essais dans ce Top 14, ce qui n'est pas négligeable. Pour une équipe qui descend, c'est plutôt pas mal. Par contre, on est avant-dernier en défense, c'est là où le bât blesse, je le dis souvent. C'est un secteur qui sera vraiment à travailler à l'intersaison. On a une équipe qui n'a jamais lâché, qui a été plutôt généreuse. Mais tous les objectifs n’ont pas été remplis puisqu'on finit relégable. Avec du recul, tu considères que vous aviez les armes pour vous maintenir en Top 14 ? Dans un championnat où on est de loin le quatorzième budget, on savait que ça allait être difficile. Mais on dit que plus c'est dur et plus c'est bon, donc on s'est dit qu'on allait aller jusqu'au bout pour justement prendre le plaisir d'évoluer dans un gros championnat où il y a des joueurs de niveau international et qui arrivent du monde entier. On n'a pas tout à fait les mêmes moyens, mais on a fait en sorte de participer et d'y mettre tout notre cœur. Malheureusement, on n'a pas réussi à être suffisamment performant dans la continuité. On n'a pas su avoir de maîtrise suffisante dans les rencontres. On a sept ou huit matchs que l'on perd alors qu'on peut les gagner, ça passe très près. On ne peut pas avoir de regrets parce que tout le monde doit donner le meilleur sur l'ensemble de la saison. On a un groupe qui bosse bien ensemble. Dans une saison où tu gagnes peu de matchs, il peut y avoir vraiment des tensions, du mouvement, de la mauvaise humeur. Bien qu'il y ait eu peu de victoire, l'ensemble du club, les joueurs et le staff ont oeuvré ensemble pour aller au bout. C'est important de le dire, car c'est tellement plus facile quand il y a des victoires de faire des fêtes ensemble et de passer du bon temps. Le public a été présent et jusqu'au bout, jusqu'au dernier match d'Oyonnax. Il y avait 8000 personnes qui étaient derrière leur équipe jusqu'au feu d'artifice.
"On ne sera pas les seuls à avoir de l'ambition"
Désormais, c'est la Pro D2, on sait que c'est un championnat qui devient lui aussi de plus en plus difficile. Est-ce qu'Agen va se donner les ambitions de remonter directement dès la saison prochaine ? Il faut avoir de l'ambition, et on ne sera pas les seuls à en avoir. Il y a toujours cinq ou six clubs qui peuvent prétendre monter à l'étage supérieur. Ce championnat de Pro D2, on le connait bien parce qu'on y était l'année précédente du Top 14. Il y a une chose importante, c'est que le club soit sain, avec des finances saines et une maîtrise par rapport à différentes dépenses, pour que le club puisse être pérenne au haut niveau. On a cette volonté de rester dans le haut du rugby professionnel : les clubs qualifiables pour jouer les demi-finales et une montée. Être dans les 5 premiers, c'est déjà une ambition. Il ne faut pas se le cacher, l’ambition est de vouloir toujours faire mieux. Si tu peux être sur le podium, c'est encore mieux évidemment. Sachant que pour ça, il faut de la régularité, c'est un engagement, une détermination. Parce qu'il y a 30 matchs à jouer, et dès qu'il y a une décompression, la concurrence prend le devant, ça il faut en être conscient. Nous avons de l’ambition, mais sans mettre non plus le club en péril par rapport à l'avenir. On a une formation qui marche depuis déjà des années, faisons en sorte que ces joueurs qui ont joué déjà en Top 14 ou en Challenge Cup puissent prendre encore une fois un peu plus d'expérience et prendre la main aussi pour être des joueurs cadres dans le futur.
"Pour les phases finales de cette saison, c'est dur de faire des pronostics, mais c'est tellement plus beau comme ça"
Peux-tu nous donner ton analyse sur ce qu'il va se passer pour les phases finales et les barrages de ce Top 14. Vous avez joué les six clubs qualifiés, y en a-t-il un ou deux qui sortent un peu du lot pour être à Barcelone le 24 juin ? Un club qui sort du lot, il n'y en a peut-être pas vraiment. Je trouve qu'il y a un développement qui est allé un peu plus loin sur la préparation physique et sur le côté puissance des équipes. Dans les puissances d'équipe il y a Montpellier, on en parle beaucoup, mais il y a Toulon toujours et le Racing. Ce sont des équipes qui sont vraiment très puissantes. Mais ce serait une offense envers Clermont de ne pas parler d’eux, qui finissent premier du Top 14, ils sont puissants aussi, mais ils ont quelque chose d'autre qui leur a permis de finir premier lors de la saison régulière. Voilà les clubs. Ce n'est pas un club, j'en ai donné quatre. Je n'ai pas donné Toulouse et Castres, car ils ont peut-être un petit déficit de puissance par rapport aux autres. Mais quand ils arrivent à enclencher, à mettre du mouvement, de l'initiative dans la contre-attaque, ils sont capables de gagner contre n'importe qui, que ce soit à la maison ou à l'extérieur. Ce sont deux équipes où on a pris beaucoup de points, on connait leur valeur. Si on regarde les trois dernières saisons, on voit qu’en 2013, le Castres Olympique est champion et l'an dernier c'est le Stade français, deux équipes qu'on attendait pas forcément jusqu'au bout de la compétition. En 2014 c'était Toulon qui était plutôt à ce moment-là le favori. Ce n'est pas forcément le favori qui est champion de France en Top 14. Exactement. Les exemples ont été donnés, c'est aussi ça la magie des phases finales. C'est ce que l'on attend dans ce Top 14. Quand je vois ce qu'à réussi à faire Toulouse dernièrement, je me dis que ce serait peut-être le stade français de l'année 2016. Castres, on connait leur capacité à jouer au plus haut niveau et sur les phases finales avec les joueurs qu'ils ont. Ce sont des équipes qui peuvent être des troubles fêtes, c'est toujours difficile de se déplacer dans un match de barrage, mais ils l'ont déjà fait, ce n'est pas écrit. On peut toujours faire des suppositions, dire que Montpellier est l'équipe à battre parce qu'ils ont gagné le Challenge Cup et qu'ils sont hyper puissants. Toulon fait moins de bruit aujourd'hui, mais peut-être. Le Racing veut prendre une revanche sur cette finale de Champions cup puisque la coupe leur tendait les bras. C'est dur de faire des pronostics, mais c'est tellement plus beau comme ça.