Lionel Roux : "Gaël Monfils a vraiment les armes sur terre-battue"

Romain Amalric : Tu étais consultant pour Canal durant le tournoi de Monte-Carlo, c'est souvent là bas qu'on commence à prendre la température des forces de chacun. J'aimerai avoir ton sentiment sur les Français, en tout cas sur Jo Wilfried Tsonga et Gaël Monfils qui se sont affrontés en demi-finale. Si ce n'est jamais arrivé, c'est en tout cas très rare ? Lionel Roux : C'est une très belle chose de les voir s'affronter tous les deux en demi-finale. C'est vrai que le tournoi de Monaco lance la saison de la terre battue. C'est vraiment un plaisir d'avoir vu Gaël évoluer toute la semaine par rapport aux tours qu'il a passés à chaque fois, mais aussi par rapport à son jeu, sa concentration et son investissement. Ça n'est jamais facile quand on est favori et qu'il a beaucoup d'attentes derrière. Il a réussi en demi-finale contre Jo, un de ses copains avec qui ils sont liés à vie puisqu'ils ont tout fait ensemble depuis le début. Souvent, Jo avait un petit ascendant sur Gaël. Là, il a réussi à gérer ce match et même la finale après, même si le dernier set est perdu assez sèchement, ça faisait bien longtemps qu'on n’avait pas vu un joueur français tenir la dragée haute à Raphaël Nadal, quand en plus, c'était du grand Rapha. Est-ce qu'on peut tirer des conclusions à trois semaines de Roland Garros, en se disant que Gaël a été plus fort que Tsonga, qu'il est donc le meilleur sur terre battue et qu'il sera notre meilleure chance ? Depuis un petit moment, je pense que Gaël est vraiment le plus fort des quatre français, et aussi sur cette surface. Même si Joe a déjà très bien joué à Roland Garros où il a fait deux demi-finales, Gaël a vraiment les armes sur cette surface : il retourne bien, il passe bien et il défend bien. Il a montré à Monaco qu'il est capable d'attaquer avec beaucoup de puissance et d'intelligence de jeu. Avant, c'était un petit peu tout feu tout flamme, là il arrive à construire son point et à venir de temps au temps au filet pour les terminer. Si Gaël continue comme il le fait depuis le début de la saison, en gérant ses temps de repos, ses temps d'entraînements et en faisant attention à son hygiène de vie, on voit bien que comme par hasard, il n'est pas blessé, et que c'est celui qui a gagné le plus de matchs pendant les masters depuis le début de la saison. Il n'est pas loin des meilleurs quand il arrive à être constant comme ça et a une bonne préparation. Il est arrivé plusieurs fois à Roland Garros sans préparation et il a pourtant réussi à faire les quarts et les demis. Alors en ayant cette confiance emmagasinée, ces matchs gagnés et cet état d'esprit... Là, quand il parle à son clan, il affiche ses ambitions, il a envie d'aller au bout. Et si avant, ses ambitions étaient gagner une pression, là, il les affiche. Et sur le cours derrière, ce n'est plus le même bonhomme.