Une décision controversée. C'est dans ce contexte que le Sénat a voté l'amendement de la sénatrice Nadège Havet visant à supprimer le taux de TVA réduit sur l'eau en bouteille en plastique. Actuellement fixé à 5,5%, le taux passerait désormais à 20%, exception faite pour les eaux en bouteille vendues en outre-mer. À l'heure où la situation économique et financière de la France dégringole et que le vote du budget pour l'année à suivre s'annonce plus qu'incertain, les sénateurs ont estimé que s'attaquer à la TVA sur l'eau en bouteille pourrait rapporter entre 150 et 300 millions d'euros par an à l'État.
Augmentation de la TVA sur l'eau en bouteille : un amendement défendu "au regard des préoccupations soulevées par le scandale Nestlé Waters".
Le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, s'est fermement opposé à cet amendement, arguant que "la TVA n'était pas un outil fiscal incitatif". Pourtant, "dans un contexte où la question de la gestion des ressources naturelles, de la responsabilité des entreprises et des enjeux écologiques sont vraiment au coeur des débats, il est devenu nécessaire de repenser cette politique fiscale", a défendu le sénateur socialiste Hervé Gillé. Une position assumée coûte que coûte par la chambre haute, particulièrement après le "scandale Nestlé Waters".
Pour rappel, une enquête du Monde et de la cellule investigation de Radio France révélait en début d'année que Nestlé, ainsi que d'autres industriels, avaient délibérément caché au public que l'eau qu'ils pompaient était contaminée... le tout sous la complicité du gouvernement alors en place. En effet, depuis 2021, l'exécutif était au courant des pratiques illégales de Nestlé, mais a préféré alléger la réglementation plutôt que de saisir la justice. Face à ces accusations, le géant de l'agroalimentaire a rapidement reconnu avoir utilisé des traitements à base d'ultraviolets et de filtres au charbon actif pour désinfecter ses eaux minérales. Une pratique tout simplement interdite mais justifiée, selon Nestlé, par le besoin de maintenir la "sécurité alimentaire".
TVA sur l'eau en bouteille : l'objectif de l'augmentation est d'inciter les consommateurs à se tourner vers l'eau du robinet... mais est-ce une bonne idée ?
Dès lors, l'augmentation de la TVA sur l'eau en bouteille en plastique tend vers un objectif clair : pousser les Français à davantage consommer l'eau du robinet. Une avancée écologique saluée par les défenseurs du projet, mais qui n'échappe pas aux critiques. En effet, les opposants à l'amendement craignent que l'augmentation de la TVA sur l'eau en bouteille en plastique n'alourdisse le budget des ménages. En d'autres termes : l'adoption de la mesure entraînera, de fait, une augmentation significative des prix des bouteilles d’eau en supermarché.
Désormais, face à cette situation, peut-on affirmer que l'eau du robinet est une alternative fiable aux eaux en bouteille en plastique et, surtout, inoffensive pour la santé ? Certes, avant de parvenir aux usagers, l'eau du robinet a été traitée, de même que les taux de pesticides relevés si situent dans la moyenne acceptable, mais peut-on réellement s'y fier ? Pas totalement, puisque régulièrement, des seuils sont dépassés, des alertes sont données et de nouvelles molécules sont classées comme cancérigènes.
Eau du robinet : des dérives semblent également avoir été constatées.
Par exemple, l'Agence régionale de santé de Normandie a récemment interdit aux habitants de quinze communes de Seine-Maritime de consommer l'eau potable du robinet, notamment pour "l’usage alimentaire, la boisson, le lavage des dents, la toilette des nourrissons, la préparation des aliments et les glaçons ". En cause : la contamination d'un réseau d'eau due à des particules d'argile et de limon libérées de l'érosion des terres après de fortes pluies. Autre exemple : les PFAS, aussi appelés polluants éternels, que l'on retrouve partout dans notre environnement... et maintenant même dans l'eau du robinet, selon une enquête menée en septembre par France Bleu et la Cellule investigation de Radio France ! En clair : sur les 89 prélèvements effectués, 43% des échantillons contenaient des polluants éternels. Parmi eux, 27 échantillons présentaient des PFAS interdits ou classés comme cancérogènes, dont 5 à des niveaux préoccupants.
Par ailleurs, un autre fait, dévoilé par "Sur le front - Qui pollue notre eau du robinet ?", l'enquête d'Hugo Clément pour France 5, semble pour le moins troublant. Lorsque la pollution dépasse les seuils recommandés dans l'eau du robinet, on peut penser que les autorités sanitaires décident de dépolluer l'eau ou de fermer le puits... Détrompez-vous ! En réalité, quand les seuils de pollution sont dépassés sur un point de captage, l'eau est tout simplement mélangée à un autre point de captage. Dès lors, la pollution est toujours présente -mais diluée-, repassant ainsi en dessous des seuils réglementaires. Une pratique très répandue et qui réussit malgré tout à échapper à tout contrôle, révèle l'enquête.
Dès lors, puisque l'augmentation de la TVA sur l'eau en bouteille en plastique est à partir de maintenant applicable, les habitudes de consommation des Français risquent de considérablement changer. Pour ce qui est de l'eau en bouteille ou au robinet, les dérives dans les processus semblent avoir été observées de chaque côté... à vous maintenant de choisir l'eau que vous préférerez boire au quotidien !
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