Comment avez-vous vécu ce weekend historique pour le rugby à 7 français, aussi bien chez les hommes que les femmes ?
C'est juste impressionnant. En plus ça a été massivement suivi à la radio et la télévision. Tout le monde en a parlé. Ça lance magnifiquement la page olympique qui s'ouvre, et ça fait du bien au rugby.
On a eu un peu peur après la défaite des hommes contre les Argentins (26-12), puis l'équipe a su réagir. Est-ce que ce groupe a un supplément d'âme ?
Il ne faut pas oublier qu'avant la finale, les Argentins battent tout le monde. C'est ce qui rend la performance des Bleus exceptionnelle. Je veux surtout mettre en avant le travail formidable et la masterclass en management de Jérôme Daret et son staff sur l'arrivée et l'intégration d'Antoine Dupont dans le collectif. Je suis très admiratif sur ce point-là. De manière plus globale, il y a un boulot considérable de la part de la DTN, de Jean-Marc Lhermet. On voit que le travail paie.
Les filles ont également fait un beau tournoi, c'est une valeur sûre pour la Fédération ?
C'est très important. La pratique féminine est en train d'exploser en France, avec des taux de croissance du nombre de licenciées supérieurs à 20%. Il faut qu'on accompagne ça d'une amélioration des installations parce qu'il y a encore trop de filles qui se changent dans les vestiaires arbitre, dans les bus ou les voitures. Il faut que ça suive, mais quel coup de projecteur sur le rugby féminin et je leur tire mon chapeau. Une médaille d'argent, ce n'est peut-être pas ce qu'elles attendaient. Le staff et les filles voulaient sans doute une victoire avant les Jeux. Mais on peut tout de même les saluer, et on les attend à Paris, sans leur mettre de pression supplémentaire.
Quand on voit les performances d'Antoine Dupont sur ce tournoi, on se dit que certains des meilleurs joueurs du monde peuvent jouer dans les deux disciplines. Est-ce que son cas personnel peut permettre d'accélérer la médiatisation du 7 ?
La question me fait un peu sourire parce qu'à l'époque, certains se sont presque insurgés de nous voir laisser Dupont partir sur du rugby à 7, alors qu'il aurait dû faire le Tournoi des Six Nations. On voit bien que du point de vue de la régénération, ça lui a fait du bien. Sur les audiences il y a eu des pointes à 2,8 millions de téléspectateurs sur France 3. Beaucoup d'écoutes également à la radio et d'interactions sur les réseaux sociaux. L'avenir de ce sport est intéressant parce qu'il apporte un vrai plus dans la progression des joueurs et la régénération physique et mentale. Je suis ravi de voir Jérôme Daret participer aux réunions sur le futur de la discipline. La France a été à l'écart pendant trop longtemps des discussions internationales. On a décidé d'investir, parce qu'on ne veut plus être sur le fauteuil passager mais sur celui du conducteur. La France est une nation majeure du rugby et doit assumer ce rôle.
Comment peut-on arriver à faire fructifier la performance sportive pour favoriser la structuration de la discipline à l'échelle nationale ?
Effectivement, le rugby à 7 existe à l'international avec nos équipes de France. Mais à part quelques associations, il est très peu présent dans nos clubs. Dès mon élection j'ai demandé, sachant la lumière que pouvait prendre cette discipline avec les Jeux olympiques de Paris, qu'il y ait deux à trois dates de rugby à 7 en début et en fin de saison, dans toutes les ligues régionales et pour toutes les catégories cadets et juniors. Cela permet d'encadrer la pratique à 15 par des tournois de rugby à 7, et donne l'opportunité à tous les jeunes qui souhaitent faire du 7 d'y accéder dans leur club. Beaucoup de nations le font, on doit s'y mettre également.
D'un point de vue des équipes nationales de 7, est-ce que la part budgétaire du rugby à 7 est comparable au 15 pour la Fédération ? Est-ce qu'il y aura une progression ?
On mise sur le fait qu'il y aura un avant et un après Jeux olympiques. Aujourd'hui, pour le dire assez crûment, le rugby à 7 est un vrai centre de coût pour la FFR. Il n'y a pas de véritable revenus liés à la discipline, que ce soit de la part de World Rugby ou des Jeux olympiques. On est dans une pratique en investissement. Je pense qu'elle est très intéressante pour le développement du rugby dans le monde. C'est plus facile pour les nations émergentes d'investir dans le rugby à 7 que le 15. Du point de vue de la mondialisation du rugby - la vérité est que le rugby n'est pas un sport mondial - le 7 est intéressant, bien qu'il représente un investissement.
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