Depuis 1789, la France connaît régulièrement des soulèvements populaires, voire des révolutions. Le peuple français a même acquis la réputation de "râleurs", une caractéristique que, selon Uderzo, remonterait aux Gaulois.
Les Français sont-ils des râleurs incurables ?
On comprend les références à Astérix, mais bien avant Uderzo et Goscinny, César et Cicéron, deux grands écrivains, qualifiaient les Gaulois de barbares. Cependant, César ajoutait que les Gaulois étaient moins barbares que les Belges, les Bretons et les Germains.
Il faut remonter plutôt à Jean-Jacques Rousseau, qui est peut-être à l'origine de la tradition révolutionnaire française que vous évoquez. En 1762, Rousseau publie « Du Contrat Social ». Dans cet ouvrage, Rousseau établit qu'une organisation sociale « juste » repose sur un pacte garantissant l'égalité et la liberté entre tous les citoyens. Ce pacte est contracté entre tous les participants, c'est-à-dire l'ensemble des citoyens. Plutôt qu'un peuple de râleurs, on dirait que les Français sont un peuple épris de liberté.
En plus de deux cents ans, des ruptures du pacte ?
Absolument, et les Français sont passés maîtres dans l'art de la révolution. Après 1789, qui a laissé place à un empereur, il y a eu les Trois Glorieuses en 1830. Cette deuxième révolution, dite révolution de juillet, a permis à la famille d'Orléans de doubler les Bourbons et de reprendre le pouvoir. Ensuite, en 1848, c'est la révolution de février. Avec leurs origines gauloises, c'est parce qu'on a interdit un banquet que le peuple parisien s'est soulevé. La Seconde République est proclamée par Lamartine, marquant la fin définitive de la monarchie en France. Pourtant, un autre empereur a encore pris le pouvoir, mais il a perdu une bataille à Sedan en 1870. Cette date est souvent oubliée, mais le 4 septembre, c'est la révolution de velours : les casseurs ont juste endommagé le Palais Bourbon, essayant de faire le moins de bruit possible car la Prusse assiégeait la capitale. Ainsi, on entame la Troisième République.
Bon là, c'est définitif, il n'y a plus ni roi ni empereur !
Eh oui, à partir de là, les révolutions suivantes se feront entre le peuple et les capitalistes. On arrive en 1930, où, suite au Crack boursier de 1929 aux États-Unis, c'est toute la planète qui souffre. La crise mondiale finit par provoquer la montée des dictatures dans le monde, mais en France, le peuple se révolte et aboutit en 1936 au Front Populaire. C'est la signature des accords de Matignon, qui prévoient une hausse des salaires et la reconnaissance des droits syndicaux. La semaine de 40 heures et deux semaines de congés payés sont instaurées. Ça fait rêver, non ?
Avant de terminer, on citera Victor Hugo : "Les grandes révolutions naissent des petites misères comme les grands fleuves des petits ruisseaux." Les grands débats politiques ou philosophiques des élus sont souvent indifférents au peuple. On conclura donc par cette autre citation de Victor Hugo, toujours extraite des « Choses vues », ce recueil de mémoires publié à titre posthume : "Il vient une heure où protester ne suffit plus : après la philosophie, il faut l'action."… Parfois une urne suffit.
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