Arnaud Benedetti, Professeur à la Sorbonne, rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire et auteur de “Aux portes du pouvoir. RN, l'inéluctable victoire ?” éd. Michel Lafon, est l'invité d'Alexis Poulin dans Poulin sans réserve pour détailler la progression du Rassemblement National dans les sondages et dans les esprits.
"La dynamique est du côté du Rassemblement National"
Arnaud Benedetti rappelle que "aujourd'hui la seule véritable force politique qui est en progrès c'est le Rassemblement National. Le Rassemblement National est aujourd'hui le premier parti ouvrier de France. Ce qui me frappe c'est que c'est un vote d'actifs et un vote de jeunes, des catégories générationnelles qui sont dans l'avenir." Le RN est ainsi à l'opposé de Renaissance, dont le socle électoral rassemble plutôt les retraités, c'est-à-dire "des catégories qui sortent du jeu."
"Le Rassemblement National progresse à peu près partout territorialement", ajoute Arnaud Benedetti qui note un "renforcement du socle sociologique". "Les nouvelles générations d'électeurs qui rentrent sont des générations qui ont été socialisées dans un affaiblissement de l'effet de diabolisation." Le vote RN est aujourd'hui "de moins en moins honteux, de plus en plus assumé, on voit bien qu'il y a une transformation du rapport au vote." Pour Arnaud Benedetti, "le plafond de verre paraît chimérique."
"Le Rassemblement National s'est professionnalisé"
Si le RN a réussi cette prouesse, c'est que "les partis de gouvernement sont aujourd'hui aux yeux de larges segments de l'opinion publique considérés comme usés." "C'est quarante années de vie politique qui se sont organisées autour d'un modèle de gouvernement représentatif de ce qu'on a appelé la pensée unique." De plus, "il y a une transformation du Rassemblement National, le Rassemblement National s'est professionnalisé", notamment en professionnalisant son expertise, avec des personnalités comme Hervé Bataille qui "essaie de rendre crédible le Rassemblement National comme force de gouvernement, faire de ce parti politique un parti qui est crédible dans sa capacité à représenter une alternance politique."
Pour ce faire, le RN a dû modérer son discours sur plusieurs sujets. "L'euro, le Frexit, l'immigration... c'est Eric Zemmour qui a repris tout ça. Jordan Bardella soutient les positions occidentales sur la défense de l'Ukraine", énumère Arnaud Benedetti. "Le Rassemblement National a en partie gagné la bataille culturelle qui est la mère de toutes les batailles politiques, le débat sur la loi immigration illustre cette triangulation. Cette bataille culturelle précède le développement de la bataille politique." Ainsi, aujourd'hui, "la vraie question c'est la question de la crédibilité, c'est plus une question de morale."
"Ce qui domine c'est un anti-macronisme"
Emmanuel Macron pourrait donc bien être le président qui aura permis au RN d'accéder au pouvoir. "Ce qui domine sur la scène politique nationale c'est un anti-macronisme dominant, le bulletin de vote Bardella va être utilisé par de nombreux électeurs comme un vote utile anti-Macron", prédit Arnaud Benedetti en anticipant les élections européennes. "Aujourd'hui Marine le Pen c'est la dernière carte qu'on peut utiliser pour essayer quelque chose de nouveau."
La seule solution qui reste à Emmanuel Macron pour éviter de partager le perron de l'Elysée avec Marine le Pen semble être de "purger l'abcès tout de suite, dissoudre l'Assemblée nationale, laisser le Rassemblement National gouverner dans un exercice de cohabitation, entraîner le Rassemblement National dans un échec." Quoi qu'il en soit, alors même qu'Emmanuel Macron a fait campagne sur l'opposition au RN, aujourd'hui, il "n'apparaît plus comme le rempart."
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