Face à une potentielle censure du gouvernement de Michel Barnier, les débats autour du budget 2025 prennent une tournure alarmante. Selon l’exécutif, le gel du barème de l’impôt sur le revenu, en cas de non-vote, pourrait entraîner une hausse d’impôts pour 17,6 millions de Français. Alors que l’inflation devrait être de 2 % en 2024, l’absence d’indexation de ces barèmes aurait des répercussions directes sur les ménages. Cette menace, agitée par le gouvernement, soulève des interrogations : s’agit-il d’un véritable péril fiscal ou d’un levier de pression politique ?
Résumé en 5 points
- En cas de non-vote du budget 2025, le barème de l’impôt sur le revenu resterait inchangé, ce qui entraînerait une hausse automatique des impôts pour 17,6 millions de foyers.
- 380 000 contribuables supplémentaires deviendraient imposables en raison de la stagnation des seuils fiscaux malgré l’inflation.
- Cette situation pourrait générer 3 milliards d’euros de recettes fiscales, selon une étude de l’OFCE.
- Le gouvernement pourrait proposer une loi spéciale temporaire pour éviter un vide juridique, avec des ajustements possibles rétroactifs en 2025.
- Cette menace d’augmentation est vue par certains experts comme une stratégie politique pour inciter les oppositions à adopter le budget.
L’absence d’indexation : un piège pour les contribuables
Actuellement, les barèmes de l’impôt sur le revenu sont adaptés chaque année pour tenir compte de l’inflation. Cette mesure permet d’éviter que l’augmentation des salaires ou des revenus ne pousse les contribuables dans des tranches d’imposition plus élevées, sans gain réel de pouvoir d’achat. Dans le projet de budget 2025, le gouvernement avait prévu une revalorisation de 2 % des tranches. Sans ce mécanisme, les seuils resteraient figés au niveau de 2024, piégeant près de 380 000 foyers jusque-là non imposables et augmentant les prélèvements pour des millions d'autres.
Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les recettes fiscales supplémentaires générées par ce gel atteindraient 3 milliards d’euros. En moyenne, un ménage proche du niveau de vie médian perdrait entre 50 et 100 euros par an. Pour les contribuables déjà dans la deuxième ou troisième tranche, l’impact serait encore plus marqué, accentuant l’injustice fiscale perçue.
Un levier temporaire mais légal
En cas de blocage du budget, une loi spéciale transitoire pourrait entrer en vigueur dès janvier, comme le prévoit l’article 45 de la Constitution. Cette loi permettrait de reconduire le budget 2024, gelant ainsi temporairement les barèmes. Toutefois, les spécialistes du droit fiscal, comme Victor Fouquet, rappellent qu’une modification rétroactive est envisageable : l’administration fiscale pourrait corriger la situation au printemps 2025 et, si nécessaire, rembourser les excédents d’impôt via un crédit d’impôt.
Malgré ces assurances, cette solution temporaire ne résout pas tout. Les ménages devront faire face à des prélèvements plus élevés pendant plusieurs mois, avec des conséquences sur leur trésorerie. Cette perspective nourrit la défiance et intensifie la pression sur les parlementaires pour éviter ce scénario.
Une communication gouvernementale sous le feu des critiques
Certains économistes et politiciens dénoncent une stratégie de peur orchestrée par l’exécutif. Évoquer une hausse d’impôts pour 17,6 millions de foyers serait, selon eux, une tentative de faire plier les oppositions. Ce genre de rhétorique n’est pas inédit : en 2012, un gel des barèmes avait déjà poussé près de 940 000 foyers dans l’imposition. Ce précédent nourrit les inquiétudes, mais aussi les critiques à l’égard de la gestion gouvernementale.
Eric Coquerel, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, se veut rassurant : « Un texte budgétaire corrigé pourrait être adopté dès le début de l’année ». Cependant, pour beaucoup, la situation illustre une nouvelle fois les limites de la majorité actuelle et l’impact des blocages politiques sur les Français.
Vers une résolution ou une prolongation de la crise ?
Si les barèmes restent gelés, les contribuables pourraient être nombreux à ressentir une augmentation dès les premiers mois de 2025. Les experts s’accordent toutefois à dire que cette situation est rattrapable, mais qu’elle dépendra de la rapidité avec laquelle une solution politique sera trouvée. En attendant, le spectre d’une pression fiscale accrue reste bien présent, renforçant l’urgence d’un compromis.
Entre réalité fiscale et jeu politique, cette crise budgétaire s’annonce comme un test majeur pour le gouvernement et les citoyens. Le compte à rebours est lancé pour éviter un choc fiscal inédit.